Implantation d’un pacemaker chez deux chiens - La Semaine Vétérinaire n° 1524 du 25/01/2013
La Semaine Vétérinaire n° 1524 du 25/01/2013

Formation

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Audrey Gautherot*, Laëtitia Lucarelli**, Éric Bomassi***, Stéphane Libermann****, Jean-François Rousselot*****

Fonctions :
*praticiens au CHV des Cordeliers à Meaux (Seine-et-Marne).
**praticiens au CHV des Cordeliers à Meaux (Seine-et-Marne).
***praticiens au CHV des Cordeliers à Meaux (Seine-et-Marne).
****praticiens au CHV des Cordeliers à Meaux (Seine-et-Marne).
*****praticien à Colombes (Hauts-de-Seine).

POINTS FORTS

– L’implantation d’un pacemaker unipolaire monochambre de type VVIR pour traiter des dysfonctionnements sinusaux de haut grade donne de bons résultats.

– Les complications sont mineures par une voie d’abord abdominale transdiaphragmatique.

En médecine vétérinaire canine, la pose d’un pacemaker est le traitement de choix des bradyarythmies symptomatiques, en particulier les blocs atrioventriculaires de 2e degré de haut grade et de 3e degré, le sick sinus syndrome, la paralysie auriculaire permanente et le bloc sino-atrial. Cet article décrit la technique d’implantation d’un pacemaker chez deux chiens présentant respectivement un sick sinus syndrome et un bloc sino-atrial de 3e degré.

CAS CLINIQUE

Description des cas

→ Un westie mâle âgé de neuf ans (chien n° 1) est référé pour l’exploration de crises de lipothymie et de bradycardie (fréquence cardiaque comprise entre 60 et 70 bpm). Un électrocardiogramme est réalisé, qui confirme la bradycardie et objective un rythme irrégulier avec une alternance de séquences sinusales et de longues pauses (voir ECG 1a). Un examen échocardiographique est pratiqué, qui ne montre aucune anomalie. Les causes extracardiaques sont exclues (tumeur, désordre électrolytique, origine iatrogénique). Les symptômes et le signalement de l’animal orientent le diagnostic vers une hypothèse de sick sinus syndrome, qui est confirmée par un holter sur 24 heures.

→ Un berger allemand femelle âgé de onze ans (chien n° 2) est référé pour une sévère bradycardie (fréquence cardiaque de 40 bpm). Une syncope survenue la veille de la consultation est rapportée. À l’examen, la chienne présente une intolérance à l’effort marquée. Un électrocardiogramme est effectué, qui montre un rythme d’échappement ventriculaire alternativement gauche et droit, avec un passage par la région hissienne (pacemaker d’échappement ventriculaire baladeur) et l’absence d’ondes P (voir ECG 2a). L’examen échocardiographique révèle une dilatation minime de l’atrium gauche. L’hypothèse diagnostique est un bloc sino-atrial de 3e degré, que confirme la réalisation d’un holter sur 24 heures.

Stabilisation médicale préopératoire

Le chien n° 1 reçoit de la théophylline (0,5 mg/kg une fois par jour) en association à de la terbutaline (0,5 mg/kg deux fois par jour) les quinze jours précédant l’intervention chirurgicale. Le chien n° 2 reçoit du furozénol (1 mg/kg deux fois par jour) et du pimobendane (1 mg/kg deux fois par jour) les vingt jours avant l’implantation du pacemaker.

Matériel

Le matériel utilisé ici est un pacemaker monochambre de type VVIR avec une sonde épicardique ventriculaire unipolaire (voir tableau). La sonde de stimulation (cathode) est implantée sur le ventricule et le stimule. Elle est inhibée par ce dernier. Le boîtier de stimulation (anode) est soumis à un asservissement de fréquence lui permettant d’augmenter sa fréquence lors d’un effort. Le pacemaker ne se déclenche que si nécessaire, lorsque la fréquence cardiaque est inférieure à 60 bpm.

Implantation du pacemaker

→ Les chiens sont prémédiqués à l’aide de l’association midazolam (0,2 mg/kg par voie intraveineuse) et chlorhydrate de morphine (0,1 mg/kg par voie intraveineuse). Ils sont induits à l’alfaxalone (par voie intraveineuse, à dose d’effet) et maintenus à l’isoflurane à 2 % dans un débit de 1 l d’oxygène.

→ Ils sont positionnés en décubitus dorsal et tondus largement (des ars aux cuisses). L’anesthésie est monitorée (pression artérielle non invasive, ECG, saturation, capnogramme). L’abord chirurgical est abdominal, transdiaphragmatique.

→ La loge du boîtier de stimulation est réalisée avec le bistouri électrique dans la paroi musculaire abdominale gauche (entre les muscles transverse et oblique interne), avant l’implantation du pacemaker. Une incision radiaire est pratiquée sur le diaphragme, laissant apparaître le péricarde. Une péricardotomie est effectuée. La sonde unipolaire est positionnée de manière à diriger le câble conducteur vers l’avant du thorax, avant de faire une rétroflexion complète vers l’abdomen. L’électrode terminale est fixée par deux points simples de nylon l’apposant sur l’épicarde apexien ventriculaire gauche (voir photo 3). La pile et la portion distale du conducteur enroulé sur lui-même sont placées dans la loge abdominale, qui est refermée par un surjet simple (voir photos 4a et 4b). Le péricarde n’est pas suturé. Le diaphragme et la paroi abdominale sont fermés de manière usuelle. Le vide pleural est restauré par un drain thoracique retiré en période postopératoire immédiate.

Suivi postopératoire

Le monitorage est maintenu en phase postopératoire et la douleur est traitée par un protocole de kétamine diluée (0,06 mg/kg/h pendant 6 heures) et de chlorhydrate de morphine (0,1 mg/kg par voie sous-cutanée toutes les 4 heures).

Les chiens sont rendus à leurs propriétaires 24 heures après l’intervention chirurgicale.

Les suivis cliniques à cinq jours montrent une disparition des symptômes (lipothymie pour le chien n° 1 ; syncope pour le chien n° 2). Aux contrôles à quinze jours postopératoires, le holter sur 24 heures met en évidence un fonctionnement quasi exclusif (chien n° 1, voir ECG 1b) à exclusif (chien n° 2, voir ECG 2b) du dispositif. Le déclenchement de celui-ci est objectivé par la présence de spike (déflexion verticale) qui précède les complexes. Aux contrôles à six mois (chiens nos 1 et 2) et à onze mois (chien n° 2), les examens cliniques sont normaux.

DISCUSSION

Le pacemaker unipolaire monochambre de type VVIR utilisé ici présente l’avantage d’être plus accessible (approvisionnement via les hôpitaux de médecine humaine) que les dispositifs qui s’implantent de manière mini-invasive (par voie endovasculaire, nécessitant une fluoroscopie).

Deux voies d’abord existent avec ce matériel. La méthode de référence décrit une approche transdiaphragmatique par laparotomie. Cette voie est intéressante en l’absence d’un pacemaker temporaire, et offre de bonnes visualisation et accessibilité à l’apex cardiaque gauche. Un abord par thoracotomie est néanmoins possible.

La technique d’implantation de référence consiste en la réalisation d’une loge musculaire entre le muscle transverse de l’abdomen et le muscle oblique interne pour contenir le boîtier de stimulation. Cette loge protège ce dernier et empêche sa migration. Cependant, l’emploi d’une sonde unipolaire épicardique avec un boîtier de stimulation bipolaire peut entraîner des courants de fuite responsables de la stimulation des muscles striés en contact avec celui-ci. Cette complication bénigne, observée de façon intermittente chez le chien n° 2, serait prévenue par l’insertion de la pile en position sous-cutanée. Cependant, plus facilement accessible, le dispositif serait alors davantage exposé aux chocs et au risque de déplacement.

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