Les urgences rythmologiques chez le chien - La Semaine Vétérinaire n° 1523 du 18/01/2013
La Semaine Vétérinaire n° 1523 du 18/01/2013

Formation

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Romain Pariaut*, Gwenaël Outters**

Fonctions :
*diplomate Acvim (Cardiology), Ecvim-CA (Cardiology), maître de conférences en cardiologie à la Louisiana State University, Bâton Rouge (États-Unis).

POINTS FORTS

– La maladie de l’oreillette, le bloc de 3e degré et l’hyperkaliémie sont des causes fréquentes de bradycardie.

– La lidocaïne est le traitement de choix des tachycardies ventriculaires.

– La lidocaïne se révèle efficace dans le traitement de certaines tachycardies supraventriculaires.

– La syncope survient à partir d’un défaut d’irrigation de 8 secondes.

BRADYARYTHMIE

Dysfonction sinusale (maladie de l’oreillette ou sick sinus syndrome)

La dysfonction sinusale, un trouble du nœud sinusal caractérisé par une bradycardie, est fréquente chez le schnauzer miniature, surtout femelle, le westie et le teckel âgés. L’électrocardiogramme montre des périodes d’asystolie qui conduisent à des syncopes répétées lorsqu’elles durent au-delà de 8 secondes.

La théophylline (5 à 15 mg/kg /12 heures, per os) donne de bons résultats dans un premier temps, mais souvent la dose doit être progressivement augmentée et les effets indésirables induits (agitation, troubles digestifs) sont alors difficilement gérables. La terbutaline (Bricanyl(r)1 0,2 mg/kg/ 8 à 12 heures), qui stimule le système adrénergique, est utilisée par voie intraveineuse en urgence et par voie orale sur le long terme. Un pacemaker résout définitivement le problème.

En présence d’une bradycardie sinusale, il est important de suspecter une maladie systémique qui stimule le tonus vagal (affection respiratoire chronique, trouble neurologique ou perturbation gastro-intestinale chronique). Les symptômes observés sont le reflet de la bradycardie et de la maladie associée. Cette bradycardie vagale est corrigée rapidement par l’atropine (0,04 mg/kg par voie intraveineuse). L’absence de réponse signe une dysfonction du nœud sinusal.

Bloc atrio-ventriculaire

Les animaux victimes de blocs atrio-ventriculaires, souvent des chiens de race de petite taille âgés, sont présentés pour des syncopes ou une faiblesse généralisée.

Le premier degré correspond le plus souvent à une fibrose légère du nœud atrio-ventriculaire qui conduit difficilement l’impulsion électrique des oreillettes vers le ventricule : le rythme est normal avec une prolongation de l’espace P-R.

Les blocs de deuxième degré sont caractérisés par quelques ondes P isolées : le nœud atrio-ventriculaire conduit encore moins bien les impulsions et certaines ondes ne sont pas transmises au ventricule.

Le bloc de troisième degré consiste en une dissociation complète entre les ventricules et les oreillettes : l’électrocardiogramme montre une succession d’ondes P uniquement et un rythme d’échappement ventriculaire généré par le système de secours du ventricule à raison de 20 à 40 battements par minute (bpm). Le traitement médical n’est généralement pas efficace. L’atropine, en urgence, augmente la fréquence de battement des oreillettes, mais n’a pas de répercussion sur le ventricule. Une perfusion continue d’isoprénaline permet parfois d’augmenter la fréquence ventriculaire. Le traitement idéal est la pose d’un pacemaker.

Liée à une hyperkaliémie

L’hyperkaliémie est secondaire à une maladie d’Addison, à une obstruction urinaire, à une rupture vésicale ou à une thromboembolie artérielle, par exemple.

Le potassium, toxique pour le cœur, provoque une bradycardie, une augmentation de l’amplitude de l’onde T puis une disparition de l’onde P.

Le gluconate de calcium à 10 % (0,5 à 1,5 mg/kg, toutes les cinq à dix minutes par voie intraveineuse) présente un effet de cardioprotection, en attendant un second traitement.

Le furosémide (2 à 4 mg/kg par voie intraveineuse), associé à une fluidothérapie, diminue la kaliémie lors d’hypocorticisme, mais n’a aucun effet en cas de thromboembolie.

L’insuline rapide (Actrapid(r)1 0,25 à 0,5 U/kg par voie intraveineuse), associée à du glucose à 25 % (2 g/UI d’insuline), favorise la pénétration du potassium dans les cellules. Ce traitement est possible chez le chat en thromboembolie, sous couvert d’une surveillance de la kaliémie et de la glycémie. La terbutaline (0,01 mg/kg par voie intraveineuse) favorise également le retour du potassium dans les cellules.

TACHYARYTHMIES

Tachycardie ventriculaire

Elle touche les chiens de grande taille (boxer, dobermann) en association avec une cardiomyopathie, ou accompagne des affections qui impliquent des processus d’ischémie/reperfusion (syndrome dilatation-torsion de l’estomac par exemple). Elle se manifeste par des pertes de connaissance et des extrémités froides. La tachycardie est régulière, avec des complexes anormalement larges et une fréquence de 240 bpm. L’animal est oxygéné, perfusé et tranquillisé (butorphanol 0,2 mg/kg et diazépam 0,25 mg/kg par voie intraveineuse, pour diminuer le stress et le tonus adrénergique). Les maladies systémiques sont recherchées et traitées : bilan sanguin, ionogramme, dosage de la troponine, échocardiographie (dysfonctionnement systolique, tumeur), etc.

Chez le chien, la tachycardie au-dessus de 180 à 200 bpm, accompagnée d’une kaliémie normale, répond à l’administration de lidocaïne (l’hypokaliémie diminue l’efficacité de cette molécule) à la dose de 2 mg/kg par voie intraveineuse toutes les cinq à dix minutes, trois fois, relayée par une perfusion continue à 40 à 70 µg/kg/min. La toxicité nerveuse de la lidocaïne étant plus importante chez le chat, la posologie est de 0,5 mg/kg en induction.

Le sotalol (2 mg/kg per os chez le chien, effet en deux à quatre heures) est un traitement chronique de la tachycardie ventriculaire. Il est utilisé en urgence pour les cas réfractaires à la lidocaïne.

L’amiodarone est rarement employée en raison des nombreux effets indésirables qui lui sont associés. Lors d’échec des traitements médicaux, la cardioversion électrique est possible : le défibrillateur est utilisé en mode synchronisé, de 3 à 5 joules/kg chez un animal tranquillisé (propofol).

Quant aux antiarythmiques, ils ne diminuent que faiblement le risque de mort subite. Seul le traitement de la cause de l’arythmie peut la combattre.

Fibrillation atriale

La fibrillation atriale est la tachycardie supraventriculaire la plus fréquente. Rencontrée chez les chiens de grand gabarit (complication d’une insuffisance cardiaque congestive), elle se caractérise par un rythme irrégulier, des complexes étroits et l’absence d’onde P. Elle nécessite une prise en charge en urgence lors d’état de choc ou de décompensation cardiaque.

Le rythme doit être ralenti en bloquant la transmission des impulsions électriques à travers le nœud atrio-ventriculaire à l’aide de diltiazem (0,1 à 0,4 mg/kg toutes les cinq minutes par voie intraveineuse ou en perfusion de 0,05 à 0,15 mg/kg/h, puis relais oral de 1 à 2 mg/kg toutes les huit heures). Les risques d’hypotension sont importants. Pour les contrecarrer, la dobutamine ou le pimobendane peuvent être associés.

L’aténolol est utilisé à la posologie de 0,2 à 1 mg/kg/12 à 24 heures.

L’esmolol (0,2 à 0,5 mg/kg par voie intraveineuse) est un Β-bloquant d’action courte à administrer en perfusion continue, mais dont l’effet s’estompe rapidement si l’hypotension associée est trop forte.

  • 1 Pharmacopée humaine.

LES TACHYCARDIES CHEZ LE CHAT

Les tachycardies félines sont rares, souvent secondaires à une cardiomyopathie hypertrophique ou à une hyperthyroïdie. Chez cette espèce, la distinction entre les tachycardies ventriculaires et supraventriculaires à l’électrocardiogramme est subtile.

Les Β-bloquants sont préférés à la lidocaïne, toxique chez le chat. Toutefois, ces arythmies félines ne nécessitent généralement pas de traitement spécifique.

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