LA PROTECTION DES TORTUES AU COSTA RICA - La Semaine Vétérinaire n° 1521 du 21/12/2012
La Semaine Vétérinaire n° 1521 du 21/12/2012

Reportage

Protéger les tortues de mer qui viennent pondre à Parismina est un projet né en 2000 de la volonté de Jerry Cruz et d’une dizaine d’habitants de ce village de la côte Caraïbe du Costa Rica. À l’époque, le braconnage était autorisé. Les tortues, capturées la nuit, agonisaient la journée au soleil. Jerry et ses compagnons ne supportaient plus un tel spectacle. Par ailleurs, les opportunités de travail pour les jeunes de Parismina étaient faibles, voire inexistantes : le village, séparé de la terre ferme par un canal, oblige à prendre un bateau, puis à emprunter une piste pendant deux heures pour rejoindre la ville la plus proche. Il n’y avait aucune industrie ni aucune agriculture.

La plage de Parismina était l’une des plus fréquentées par les tortues de mer qui venaient pondre. La tortue luth était recherchée pour ses œufs, la tortue verte, pour sa viande et ses œufs, et la tortue à écailles ou carette, pour la beauté de sa carapace.

En consultant les instigateurs d’autres projets de protection des tortues, celui de l’ Asociaciòn Salvemos Las Tortugas de Parismina (Astop) a pris forme. Son objectif était d’empêcher le braconnage en surveillant les plages en période de ponte, notamment la nuit, et ensuite de protéger les œufs.

Des débuts difficiles

La plupart des habitants de Parismina étaient opposés au projet, qui impliquait l’arrêt d’une tradition lucrative. Face à leur manque d’engouement, Jerry et ses amis n’ont pas baissé les bras. Encouragés par les résultats d’associations similaires, ils étaient convaincus que ce programme pouvait marcher. Il leur fallait seulement un peu de temps et des résultats pour convaincre le reste du village.

Chaque nuit, ils parcouraient les 6 km de plage de Parismina de 20 h à 4 h du matin, interceptaient les braconniers, surveillaient les tortues venues pondre sur la plage jusqu’à leur retour dans la mer et localisaient les œufs. Un espace “nurserie”, surveillé 24 heures sur 24, a été créé. Il est délimité sur la plage pour protéger les œufs, sauvés par les membres d’Astop, qui écloront deux mois plus tard, sous surveillance également.

Les rencontres avec les braconniers peuvent être dangereuses, mais les garde-côtes, qui patrouillent avec les guides locaux, vont permettre que ce changement d’habitudes se fasse sans heurts. Chacun va alors effectuer 10 à 12 km de marche dans le sable de 20 h à minuit ou de minuit à 4 h du matin, selon les rondes. Tous ces intervenants travaillent bénévolement durant cette première année.

Ouverture du projet au monde extérieur

À la fin de la première année, un site Internet est créé. Il présente un programme de volontariat avec des possibilités de logement chez l’habitant. Par ailleurs, l’association contacte des écoles américaines et propose des formules de “tourisme-volontariat” de quatre nuits. L’argent rentre enfin dans les caisses et les patrouilleurs de nuit commencent à être rémunérés.

Jerry tient alors une réunion au centre du village pour informer la population des possibilités d’embauche et essayer de rallier les braconniers à sa cause. « Pouvoir proposer un salaire (15 $ par ronde de 4 heures) en a convaincu certains. Nous nous sommes concentrés sur les braconniers, car ils ont beaucoup d’expérience pour trouver les œufs. Les avoir à nos côtés nous permet de faire d’une pierre deux coups », explique-t-il. Aujourd’hui, environ 15 guides ou patrouilleurs travaillent pour Astop. De plus, en 2005, une nouvelle loi a été votée, interdisant strictement le braconnage des tortues de mer ou de leurs œufs. Les auteurs d’infraction sont désormais passibles de trois ans de prison.

La collecte de données pour un meilleur suivi

Chaque saison, de mars à octobre, Astop accueille environ 200 bénévoles et 200 étudiants. Lors des patrouilles, lorsque les guides repèrent une tortue, ils lui laissent le temps de faire son nid et de commencer la ponte pour ne pas l’effrayer et risquer qu’elle ne retourne à la mer sans pondre. Une fois la ponte commencée, il faut collecter et compter les œufs, mesurer la longueur et la largeur de la carapace, vérifier la présence d’une plaque d’immatriculation ou en poser une. Chaque tortue retourne donc à la mer avec un numéro d’identification accordé par la Wider Caribbean Sea Turtle Conservation Network (Widecast) de l’université de Gainesville, en Floride. Astop collecte également toutes les données recueillies par les associations de protection du Costa Rica, du Nicaragua, du Panama et des îles caribéennes.

Aujourd’hui, quels sont les résultats d’Astop ?

Deux équipes de trois guides parcourent 10 km chaque nuit pendant huit mois de l’année, soit plus de 17 000 km de marche. Avant le projet, 98 % des tortues venues pondre sur les côtes de Parismina étaient tués par les braconniers. En douze ans de travail, de patrouille et d’éducation de la population, ce pourcentage a chuté à 10 %. Pour la saison 2012, 267 nids de tortues luth ont été localisés, avec en moyenne 77 œufs par ponte et un taux de 60 % de bébés tortues menés à terme, similaire à celui observé dans la nature. Ce sont donc plus de 12000 petits qui ont rejoint la mer Caraïbe en 2012. Mais les chances de survie entre le départ du nid et le passage à l’âge adulte sont seulement d’une tortue pour mille. En effet, les prédateurs (comme les oiseaux, la pollution et surtout les poissons) tuent 999 d’entre elles. Le projet permet donc d’amener une douzaine de tortues à l’âge adulte. Les membres de l’association savent qu’il existe encore quatre braconniers dans le village et d’autres qui viennent de hameaux voisins. En l’absence de preuves, aucune intervention n’a été rendue possible pour le moment.

Astop concentre ses efforts sur la nouvelle génération. En effet, au contact des volontaires et des mem­bres engagés, les enfants sont sensibilisés à l’importance de protéger les tortues et la nature en général. Jerry compte sur eux pour abolir complètement le braconnage et rendre aux tortues ce qui leur appartient : la liberté.

PHYSIOLOGIE DES TORTUES MARINES

→ La plupart des tortues pondent au moins deux fois par saison, certaines jusqu’à dix fois en une seule saison.

→ Les tortues ne pondent pas deux années consécutives. Elles peuvent manquer d’une à sept saisons de ponte, avant de revenir déposer leurs œufs.

→ Les tortues se reproduisent avec plusieurs mâles à chaque saison et peuvent garder leur sperme pendant trois ans : tous les œufs produits ne sont donc pas forcément du même mâle.

→ Il semble que les tortues vertes reviennent pondre sur la plage où elles sont nées.

→ Le sexe des petites tortues dépend de la température autour du nid : de 23 à 29 °C, les mâles sont en proportion plus importante. C’est l’inverse si la température se situe entre 29 et 37 °C.

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