Formation
ANIMAUX DE COMPAGNIE
Auteur(s) : ROMAIN PARIAUT*, GWENAËL OUTTERS**
Fonctions :
*diplomate Acvim (cardiology) et Ecvim-CA (cardiology), professeur assistant à l’université de Louisiane, à Bâton-Rouge (États-Unis).
– Il convient de limiter le stress et d’oxygéner dès l’admission des animaux dyspnéiques.
– À l’auscultation, les râles crépitants pulmonaires sont subtils.
– Les trois volets du traitement sont la diminution de la pression veineuse pulmonaire (diurétiques et vasodilatateurs), l’amélioration de la fonction systolique (agents inotropes) et l’association repos/oxygénation.
– La réponse à un traitement agressif au furosémide est généralement favorable.
– La fluidothérapie est évitée (sauf exceptionnellement chez le chat pour compenser l’hypokaliémie).
L’œdème aigu du poumon (OAP) est une accumulation de liquide d’origine plasmatique dans l’espace alvéolaire. Il apparaît le plus souvent en phase terminale d’une insuffisance cardiaque gauche, qui est à l’origine d’une hypertension veineuse puis d’un œdème interstitiel et enfin alvéolaire.
Le signalement est un élément important du diagnostic de l’OAP. Les chiens de race de petite taille (en particulier les cavaliers king charles) et âgés sont fréquemment atteints d’une insuffisance mitrale associée à une surcharge volumique. Le second groupe est représenté par les chiens de race de grande taille, présentant une cardiomyopathie dilatée (CMD), caractérisée par une surcharge volumique et une diminution de la contractilité (30 à 50 % des dobermanns en souffrent). Le chat d’âge moyen à avancé est le plus souvent atteint d’une cardiomyopathie hypertrophique avec un dysfonctionnement diastolique, mais une contractilité conservée.
L’animal dyspnéique est instable : l’examen clinique est réduit pour limiter la contention et le stress.
Le souffle d’insuffisance mitrale est généralement bien audible, associé à une toux persistante et à de l’agitation. En phase de décompensation, les râles crépitants pulmonaires sont subtils : leur absence n’élimine pas un OAP. Lors d’une CMD, le souffle est plus ténu, mais des bruits de galop et/ou une arythmie sont parfois détectables. Les commémoratifs rapportent dans ces cas une diminution de l’appétit, de la faiblesse et/ou des épisodes de perte de connaissance. Chez le chat, l’anomalie cardiaque (souffle, bruit de galop) n’est audible que dans 60 à 70 % des cas, et les crépitements pulmonaires sont difficilement discernables. Des commémoratifs d’injection de corticoïdes, de fluidothérapie, de changements d’environnement ou de vomissements sont à rechercher, car ils peuvent constituer des facteurs déclenchants ou associés à l’OAP.
La tachycardie accompagne généralement l’OAP cardiogénique, de sorte que la présence d’une arythmie sinusale respiratoire chez le chien oriente vers une autre cause de dyspnée.
La radiographie se pratique dès que l’animal est capable de tolérer la contention nécessaire à l’obtention des vues. L’OAP cardiogénique est généralement accompagné d’une dilatation de l’oreillette gauche. Évidente chez les chiens de petite taille, cette image est plus délicate à identifier chez les chiens de grand gabarit et encore plus chez le chat, du fait de la position de l’oreillette sur le cœur. Chez le chat, l’absence de cardiomégalie élimine généralement l’OAP cardiogénique. Les anomalies du tissu pulmonaire sont également visibles. La vue dorso-ventrale (animal posé sur le sternum) offre une bonne visualisation de la zone caudo-dorsale des poumons, localisation typique de l’œdème pulmonaire. Sur cette vue, chez les chiens de race de petite taille, la dilatation de l’oreillette est bien visible entre 2 et 3 h. L’évaluation des vaisseaux pulmonaires dans les champs caudaux est plus facile à partir d’une vue dorso-ventrale que ventro-dorsale. Chez les chiens de grande taille atteints de CMD, l’oreillette ne se dilate pas autant ; la silhouette cardiaque est élargie, très allongée en vue latérale en raison de la dilatation ventriculaire gauche. L’œdème s’accumule en région caudo-dorsale et débute en général dans la région droite. La dilatation de la veine pulmonaire par rapport à l’artère est parfois difficile à voir : la veine est médiale sur une vue dorsale, et ventrale sur une vue latérale. Chez le chat, la distribution de l’œdème est souvent plus diffuse.
En cas de doute, le test au furosémide est diagnostique : un bolus de 2 mg/kg est administré toutes les 1 à 6 heures. En cas d’OAP, l’amélioration clinique apparaît en 12 à 24 heures. Il est dangereux de poursuivre le protocole plus longtemps sans amélioration. Les œdèmes pulmonaires non cardiogéniques résultent d’une augmentation de la perméabilité capillaire et, par conséquent, ne s’améliorent pas à la suite de l’administration de diurétiques.
À l’échographie, le diamètre de l’oreillette gauche est mesuré, et les épanchements péricardique et pleural sont visualisés. L’artefact hydro-aérique dit en “queue-de-comète”, qui débute sur la ligne pleurale et s’étend comme un jet de laser vers le bas de l’écran lors de l’examen échographique des poumons, est assez caractéristique de la présence d’un œdème.
Les trois volets du traitement sont la diminution de la pression veineuse pulmonaire (diurétiques et vasodilatateurs), l’amélioration de la fonction systolique (agents inotropes) et l’association repos/oxygénation.
→ L’oxygène est apporté par le biais d’une sonde ou, mieux, d’une cage à oxygène pour les animaux de petit format (contrôle de la température et de la concentration d’oxygène et de dioxyde de carbone).
→ Le furosémide est généralement administré par voie intraveineuse, en débutant par 4 mg/kg, suivi d’une injection de 2 mg/kg toutes les 2 à 3 heures, puis à raison de 1 à 4 mg/kg toutes les 4 à 8 heures en fonction de la réponse. La fréquence des injections repose sur un suivi régulier de la fréquence respiratoire de l’animal. Le premier bolus peut être entretenu par une perfusion continue à la posologie de 0,2 mg/kg/h (voire 0,5) qui permet d’assurer une diurèse tout en maintenant le volume circulant afin d’éviter la baisse du débit de filtration glomérulaire. Des bolus intermédiaires sont possibles si la réponse thérapeutique n’est pas suffisante. Il est admis que plus la dose de furosémide est élevée, plus son effet diurétique est important, au moins jusqu’à 4 mg/kg. Le pic d’effet est rapide (30 minutes) par voie veineuse, pour une action courte (3 heures). Le traitement est agressif au départ, pour assurer une diminution de la fréquence respiratoire au cours des deux premières heures. Le relais oral est le plus souvent pris à partir de la 24e heure pour une durée d’hospitalisation moyenne de 72 heures. Pendant cette phase, la diurèse, l’urémie et la créatinémie sont suivies.
→ L’administration de pimobendane (de 0,25 à 0,33 mg/kg toutes les 8 à 12 heures) est initiée dès que l’administration orale de médicaments est possible. Une légère tranquillisation avec du butorphanol ou de la buprénorphine améliore l’état des animaux agités.
→ Les inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (IECA) sont prescrits à la maison, en traitement chronique à long terme.
Ces cas sont assez rares si le traitement initial est suffisamment agressif.
Le nitroprusside1 (de 2 à 10 mg/kg/min pendant 8 à 12 heures), un vasodilatateur, peut provoquer une hypotension sévère nécessitant un suivi continu de la pression artérielle, ce qui rend son usage difficile. La dobutamine1, un agent inotrope, s’utilise par voie intraveineuse (2 à 10 mg/kg/min).
→ Chez les races de grande taille, la baisse de contractilité répond à l’administration d’inotropes et la fibrillation atriale peut être gérée par le diltiazem, un inhibiteur calcique (1 à 2 mg/kg, toutes les 8 heures, par voie intraveineuse), tout en surveillant la pression artérielle. Cependant, la prise en charge de l’œdème reste prioritaire.
→ Chez le chat, en l’absence d’une baisse de la contractilité confirmée par l’échographie, le pimobendane n’est pas indiqué. La dose de furosémide employée est généralement plus faible que celle utilisée chez le chien, de l’ordre de 1 à 2 mg/kg toutes les 8 à 12 heures. Pour cette espèce, beaucoup plus sensible à l’hypokaliémie diurético-induite, une fluidothérapie à très faible débit complémentée en potassium est parfois nécessaire. Par ailleurs, chez le chat cardiopathe, l’épanchement thoracique est une cause fréquente de détresse respiratoire, la thoracocentèse est alors pratiquée en urgence.
L’administration de diurétiques provoque des désordres électrolytiques, en particulier des hypokaliémies chez le chat, des hyponatrémies ou des hypochlorémies, ainsi que des dysfonctionnements rénaux. La déshydratation, l’alcalose métabolique et l’hypotension sont surveillées. Pour ces raisons, il faut toujours offrir à boire aux animaux hospitalisés tout en évitant la fluidothérapie.
De retour à la maison, une fréquence respiratoire au repos supérieure à 40 mpm est un signe sensible de la présence d’OAP, utilisable par les propriétaires.
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