Le python birman décime la faune autochtone des Everglades

L’engouement pour des espèces de plus en plus exotiques conduit à l’arrivée de nouveaux compagnons dans les foyers. Ainsi, la popularité des reptiles ne cesse d’augmenter, bien qu’ils nécessitent des conditions de détention particulières et contraignantes. Souvent maintenus dans des environnements mal adaptés, les animaux parviennent à s’enfuir. Parfois, ce sont même les propriétaires, lassés, qui s’en débarrassent dans le milieu naturel. Ils rejoignent alors des écosystèmes dont ils sont rarement originaires et pour lesquels ils peuvent devenir nocifs. C’est le cas du python birman (Python molurus bivittatus), l’une des 9 espèces de serpents constricteurs, responsable du déclin de nombreuses espèces présentes dans les Everglades (Floride, États-Unis).

Le python birman, un compagnon encombrant

Originaire d’Asie du Sud-Est, le python birman a été importé par milliers dans les années 90 aux États-Unis comme espèce d’agrément. Ce reptile, qui peut vivre une dizaine d’années, devient rapidement encombrant : les plus grands spécimens mesurent jusqu’à 8 m de long.

Les reptiles sont souvent des espèces problématiques lorsqu’elles sont relâchées en dehors de leur aire de répartition. Un exemple tristement célèbre est celui du Boiga irregularis, qui a provoqué la disparition de nombreuses espèces à la suite de son introduction sur l’île de Guam¹, dans l’archipel indonésien, peu avant 1950.

Depuis 2000, le python birman a colonisé la Floride et s’est même installé dans le parc national des Everglades. La commission pour la conservation de la faune de Floride estime à plusieurs dizaines de milliers le nombre d’individus présents aujourd’hui dans ce parc². Les premières études menées sur ce nouveau prédateur ont constaté qu’il se nourrissait d’une quarantaine d’espèces différentes, des plus petits micromammifères aux alligators, en passant par les lynx. Visiblement, rien n’échappe à son appétit vorace. Il entre ainsi directement en compétition avec les prédateurs les plus haut placés dans la chaîne alimentaire.

Un prédateur responsable du déclin de nombreuses espèces

Pour quantifier l’impact de ce prédateur sur les espèces sauvages du parc des Everglades, un groupe de chercheurs a comparé les relevés des populations animales avant l’installation du python entre 1993 et 1999, puis après son arrivée entre 2003 et 2011³. Les résultats sont inquiétants.

Certaines espèces auparavant couramment observées ont vu leurs effectifs s’effondrer en quelques années. Selon les calculs des chercheurs, les populations ont chuté de plus de 98 % pour les opossums et les ratons laveurs, des espèces habituellement communes, et de plus de 87 % pour les lynx roux. Aucun renard ni lapin n’a été observé dans les zones envahies par le serpent. Pour les espèces déjà rares avant l’arrivée du reptile, comme le tantale d’Amérique (Mycteria americana), le risque de disparition est élevé.

Pour enrayer ce phénomène, différentes mesures ont été mises en place. Ainsi, en Floride, pendant la saison de chasse, les chasseurs licenciés sont autorisés à prélever pour destruction les serpents qu’ils capturent afin de participer à l’effort de réduction des effectifs de cette espèce. Ils peuvent également vendre la viande et la peau des individus capturés. Certains résidents de Floride bénéficient d’un permis pour capturer les pythons en toute saison. De plus, une loi a été promulguée pour interdire l’importation et le transport d’un État américain à un autre de 4 espèces de serpents, dont le python birman.

Une nécessaire responsabilisation des propriétaires

Le cas du python birman vient s’ajouter à celui d’autres espèces d’agrément, comme les tortues de Floride, devenues problématiques une fois relâchées dans la nature en dehors de leur aire de répartition naturelle. Cela pose une fois de plus la question de la responsabilisation des amateurs et des futurs propriétaires vis-à-vis des dégâts potentiellement générés par ces espèces sur l’environnement. Devant l’enthousiasme déclenché par ces animaux attractifs, les vétérinaires ont un rôle éducatif à jouer, aussi bien pour mettre en garde les éventuels propriétaires sur les contraintes inhérentes à l’entretien de ces reptiles que sur les risques pour l’environnement.

• 1 J.A. Savidge : « Extinction of an island avifauna by an introduced snake », Ecology, 1987, 68(3): 660-668.

• 2 http://myfwc.com

• 3 M.E. Dorcas, J. D. Willson, R.N. Reed, R.W. Snow, M.R. Rochford, M.A. Miller, W.E. Meshaka Jr, P.T. Andreadis, F.J. Mazzotti, C.M. Romagosa, K.M. Hart : « Severe mammal declines coincide with proliferation of invasive Burmese pythons in Everglades National Park », proceedings of the National Academy of Sciences of USA, 2012, 109(7): 2418-2422.