HDR EN SCIENCE, LE PLUS HAUT DIPLÔME UNIVERSITAIRE - La Semaine Vétérinaire n° 1509 du 28/09/2012
La Semaine Vétérinaire n° 1509 du 28/09/2012

REPORTAGE

Auteur(s) : CLÉMENTINE DENY

Depuis la suppression de la thèse d’État, un nouveau diplôme vient sanctionner la fin des études universitaires. L’habilitation à diriger des recherches (HDR) s’obtient via un bilan de la recherche réalisée et encadrée. Voyage de quelques heures à travers la soutenance d’un diplôme où la critique de la raison est censée être pure…

Le 23 novembre 1988, par arrêté interministériel, le plus haut diplôme universitaire est créé : l’habilitation à diriger des recherches. Il sanctionne « la reconnaissance du haut niveau scientifique du candidat, du caractère original de sa recherche dans un domaine scientifique ou technologique suffisamment large, et de sa capacité à encadrer de jeunes chercheurs ». Curieusement, le décret reconnaît à niveau égal les thèses de 3e cycle et « les doctorats permettant l’exercice de la médecine, de l’odontologie, de la pharmacie, de la médecine vété­rinaire et un diplôme d’études approfondies (DEA) », sous réserve que le candidat puisse justifier d’une solide expérience de chercheur.

Si ce diplôme est né après la suppression de la thèse d’État, il n’en est pas le remplaçant à l’identique. Une circulaire de janvier 1989 précise ainsi que la finalité essentielle, sinon exclusive de l’HDR est de permettre l’accès au corps des professeurs d’université.

Un jury, un président, 3 rapporteurs

Officiellement, cette reconnaissance universitaire est nécessaire pour encadrer les étudiants thésards. Pourtant, l’impétrant encadrant devra fournir la preuve de sa capacité à le faire. Or, en recherche, l’expérience vaut la preuve ! Du coup, le candidat à l’HDR devra présenter une expérience d’encadrement de thèses, officieuse ou le plus souvent officielle, sous la forme de codirections.

Si chaque université a une certaine latitude pour organiser les examens d’HDR, les textes donnent un cadre relativement strict : remise d’un dossier de candi­dature étayé de publications scientifiques sous forme d’ouvrages ou d’articles, document de synthèse de son activité scientifique justifiant de pertinence et d’autonomie dans l’animation de la recherche. Un jury est constitué sous la responsabilité d’un président et d’au moins 3 rapporteurs, parmi lesquels 2 au minimum habilités à diriger des recherches et dont l’indépendance (absence de copublication, personnalité extérieure au laboratoire du candidat, etc.) et la compétence dans le domaine concerné ne peuvent être remises en cause. Enfin, la soutenance d’HDR est publique, sauf si la confidentialité de la recherche est exigée. Elle commence par un exposé, suivi d’une phase de questions-réponses avec le jury qui, ensuite, délibère.

Un jeu où la souris doit se faire plus belle que le chat…

Pour Nicolas Bez, candidat du jour, géostatisticien en halieutique, la rédaction du document de synthèse a débuté 2 ans auparavant et la rédaction proprement dite lui a pris 2 mois à temps plein : « Nous n’avons pas de réelles contraintes en termes de forme pour le document de synthèse, à la différence d’une thèse. Ce qui est jugé, c’est la valeur de la démarche scientifique et la capacité d’encadrement. Après, pour le reste, on fait un peu comme on veut… ». Des membres du jury, ce jour-là, n’ont pas manqué de souligner le caractère peu orthodoxe du document de synthèse… Il est vrai qu’il est question de conte et de princesse ! La soutenance, qui a duré plus de 2 heures, est apparue, vue de l’extérieur, comme une joute oratoire proche de la torture. « Il ne faut pas le voir comme cela. Comme chercheur, nous avons une extrême habitude du jugement de nos pairs et la séance des questions-réponses relève de notre pratique quotidienne. Le souvenir que je garde de cet examen est un sentiment de plaisir, celui de rendre compte de ses travaux. Certes, le candidat est dans une position de faiblesse. Il sort d’une présentation de trois quarts d’heure et doit répondre à des questions précises. Soyons honnêtes, pour certaines, je pense n’avoir eu la réponse per­tinente qu’une fois l’épreuve ter­minée en raison du stress, de la fatigue et du regard pesant de la salle. Mais, au final, on ressort de ce parcours enrichi par l’obligation de faire un point d’étape, ce qui est une chance dans une carrière et un luxe que s’offre le chercheur. » Pour le jury, les questions-réponses sont aussi un exercice de style particulier qui consiste à verbaliser un travail d’évaluation. « J’ai eu la chance de faire parti d’un jury de thèse, précise Nicolas Bez. L’exercice est périlleux. On doit donner un avis sous forme de questions, trouver un juste équilibre entre critique et dithyrambe, adopter le bon format de prise de parole et éviter de sombrer dans la crise de l’ego en profitant de la faiblesse de celui qui passe l’épreuve. »

L’exercice de la soutenance passe aussi par le délibéré du jury qui s’enferme. Que se disent-ils ? Peu­vent-ils renvoyer le candidat à ses chères recherches ? Honnêtement, au stade de la soutenance, c’est peu probable, mais cette phase de délibération sacralise l’obtention du diplôme, le plus haut des universités. À 47 ans, un symbole disparaît pour Nicolas Bez : le candidat doit renoncer à sa carte d’étudiant… à la rentrée prochaine.

HDR DE NICOLAS BEZ

Le document de synthèse de Nicolas Bez est intitulé Rencontre d’une distance et d’une probabilité. Le titre est simple, le contenu plus complexe. « Je suis géostatisticien dans un domaine appliqué aujourd’hui très sensible. Les approches statistiques sont mes outils. L’halieutique est l’univers dans lequel je les applique. En tant que chercheurs, nous devons proposer des modèles d’évaluation des dynamiques de populations. Ces évaluations ont de l’importance quant à l’avenir et à la survie tant de la biodiversité marine que des pêcheurs. Or notre matériau, le poisson, constitue le modèle parfait de quelque chose sans cesse en mouvement dans l’espace et dans le temps. Voilà la première originalité, accessible au non-spécialiste, qui complique la conceptualisation.

La seconde originalité vient du fait qu’ici ce n’est pas toujours le chercheur qui décide des données qui lui sont transmises et qu’il doit traiter, mais les professionnels, qui font remonter les informations qu’ils collectent et dont ils disposent au quotidien. »

Pendant sa soutenance, Nicolas Bez a ainsi montré que l’analyse spatio-temporelle des données GPS des navires thoniers (issues du Vessel Monitoring System), des informations confidentielles utilisées dans le cadre de la police des mers par le ministère de la Pêche, permet d’établir une cartographie des champs de proies indépendante des déclarations des pêcheurs. Ce travail de recherche s’inscrit dans le cadre du projet européen Ceder, associé à l’encadrement d’une thèse de 3e cycle soutenue par la jeune chercheuse Emily Walker.

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