Les Britanniques battent le fer contre les feux

Le rendez-vous annuel de la Beva s’est déroulé dans la même ville que le symposium du laboratoire Elanco¹.

Ces journées ont été diversifiées, avec 5 sessions de formation en même temps (dont l’une consacrée aux travaux de recherche), des conférenciers de renom majoritairement anglais, irlandais et américains, mais aussi des débats qui contribuent à leur succès.

Ce congrès a aussi été placé sous le signe des jeux Olympiques de Londres de cet été. Les confrères équins britanniques ont pu s’enorgueillir de “leurs” médailles.

Une diversité de thèmes

Outre-Manche, selon David Rowlands (Devon, Royaume-Uni), 2 000 à 2 500 vétérinaires sont concernés par l’équine. Ce congrès leur offre des formations techniques de qualité et interactives, des tables rondes sur des sujets importants pour leur exercice (comme les assurances) et également des débats dans lesquels la profession britannique soutient une position engagée. Ainsi les feux, par thermocautérisation, ont-ils fait salle comble, avec près d’une centaine de congressistes venus assister aux discussions encadrées par Paul Jepson. En novembre 2011, le Royal College of Veterinary Surgeons (RCVS, équivalent britannique de l’Ordre) avait déjà affirmé que les feux ne pouvaient pas être légitimement réalisés par un vétérinaire dans le cadre d’un traitement médical, a rappelé Roger Smith, professeur à l’Equine Orthopeadics Royal Veterinary College. La démonstration a aussi été faite, au cours du congrès, que cette pratique est à bannir pour des raisons de bien-être (douleur associée), mais aussi de manque de rationalité scientifique et d’efficacité. « Le groupe de travail du RCVS estime que cela devrait figurer dans l’Animal Welfare Act », a souligné notre confrère. Les feux, assimilés à une mutilation, feraient alors l’objet d’une interdiction et de sanctions.

Le bien-être omniprésent

Les sujets relatifs au bien-être animal sont aussi l’une des préoccupations du président de la Beva, Ben Mayes : « Rappelons que c’est notre devoir de sauvegarder le bien-être des chevaux », a-t-il souligné lors de la séance inaugurale.

Les confrères équins britanniques sont, en effet, particulièrement sensibles à cette question. En témoigne une session d’une journée consacrée à ce sujet, sous divers angles. Des situations concrètes auxquelles le praticien peut être confronté ont été passées en revue, comme celle d’assister un agent dans un cas de maltraitance. « Vous devez clarifier votre rôle, savoir ce que l’inspecteur attend de vous, vous assurer de l’appui de la police, si nécessaire, et connaître vos responsabilités », a détaillé Andrew Williamson (Norfolk, R.-U.). « En tant que vétérinaire, vous décidez de ce qui est nécessaire pour l’animal », a-t-il poursuivi. Notre confrère recommande également la prise de clichés, de vidéos, de notes précises, voire des prélèvements de sang envoyés à un laboratoire externe (en conservant une partie de l’échantillon) et un examen post-mortem si l’animal doit être euthanasié. « Consacrez-y le temps qu’il faut, le rôle du vétérinaire est important dans ce recueil d’informations », a-t-il conclu.

« Comment se sortir des cas où les intérêts commerciaux de votre pratique sont en conflit avec celui des chevaux dont vous assurez les soins ? », s’est interrogée pour sa part notre consœur Sarah Coombs (clinique équine Milton, Dorset, R.-U.), sans tabou. Elle a rappelé que la déontologie vétérinaire du RCVS explique bien que « par-dessus tout, l’effort constant sera d’assurer la santé et le bien-être des animaux dont le vétérinaire s’engage à la prise en charge ».

Des efforts à porter aussi sur l’éducation

Notre confrère Roly Owers (World Horse Welfare, R.-U.) a soulevé la problématique des unwanted horses, de la crise économique et de la surproduction de chevaux par rapport au marché.

Andy Stringer (directeur des programmes vétérinaires de la Société protectrice des animaux et de la nature, la Spana) a quant à lui mis en perspective le cas des chevaux qui travaillent : « Nous estimons leur nombre à 100 millions. Ils ont un rôle important dans l’agriculture, [mais] il y a un manque de reconnaissance de ces animaux de travail dans les législations et les administrations nationales et internationales. » En outre, la plupart ne bénéficient pas de soins vétérinaires.

L’euthanasie à l’ordre du jour

La thématique de l’euthanasie des équidés a été déclinée dans le cadre d’une maladie chronique incurable ou de chevaux âgés ou non désirés. « Il y a une pression sur notre profession, pas seulement pour prolonger la vie de l’animal, mais également pour estimer la qualité de celle-ci », a expliqué Lesley Barwise-Munroe (Alnorthumbria Veterinary Group, Northumberland, R.-U.). Le praticien a donc un rôle de conseil et de communication essentiel à jouer dans ce cadre. L’échange avec le propriétaire doit être méthodique.

Les paraprofessionnels font florès

L’association vétérinaire britannique a aussi ouvert ses tribunes aux sujets d’actualité concernant les paraprofessionnels, dont les dentistes équins et les physiothérapeutes. Outre-Manche, le libéralisme est de mise dans ces disciplines où fleurissent des non-vétérinaires, qui tiennent parfois un stand au sein de l’exposition commerciale.

Notre confrère John Walmsley (Liphook Equine Hospital, Hants, R.-U.) a retracé les avancées importantes qu’a connues la médecine vétérinaire équine durant ces 40 dernières années, mais aussi la communication, « qui a apporté un changement considérable dans notre fonctionnement. […] Les progrès en imagerie médicale et dans le domaine de la sédation ont aussi changé notre pratique ».

Ben Mayes n’a pas manqué non plus, dans son discours inaugural, de pointer les préoccupations vis-à-vis des antimicrobiens ou encore des maladies exotiques.

Le nouveau visage des confrères équins

Des sujets socioprofessionnels s’inséraient parmi les sessions plus techniques : comment trouver un emploi, l’intérêt ou non d’un internat, etc.

La féminisation de la profession au Royaume-Uni est une question qui rejoint la tendance française. « Il y a aujourd’hui en Angleterre plus de femmes vétérinaires que d’hommes », a souligné notre confrère Julian Samuelson (Kent, R.-U.). Une enquête, menée en collaboration avec le RCVS, s’est attachée à mesurer l’impact de cette situation sur la rémunération, le temps de travail, la satisfaction par rapport au métier et la succession légale dans les cliniques. Des données à pondérer avec, par exemple, l’influence notable de la génération : « Les vétérinaires de moins de 40 ans sont plus satisfaits de leur travail que ceux qui ont dépassé cet âge », a précisé Julian Samuelson.

Un constat en revanche dramatique est toujours pointé du doigt : celui de l’endettement des étudiants pour leurs études, qui ne cesse d’augmenter.

Le rendez-vous pour l’édition 2013 du congrès de la Beva est d’ores et déjà pris : il aura lieu à Manchester.

• 1 Voir en page 16 de ce numéro.