LES PÉRIPLES D’UN VÉTÉRINAIRE DEVENU GLOBE-TROTTER

D’où vient sa passion du voyage ? Marc Wuyts l’ignore : « Ma famille, à Anvers, est assez sédentaire. Elle est regroupée dans le même quartier et bouge peu, sinon pour se rendre en vacances en Espagne, comme tout Belge qui se respecte ! » Ses premiers voyages en stop, alors qu’il est encore étudiant, lui font sillonner l’Europe. Installé en France, où il exerce son métier de vétérinaire, il poursuit sa quête du monde, sac à dos, avec sa femme. Puis ce sera à moto, avec ses enfants. Aller-retour Tronget (dans l’Allier, où il habite)-Aqaba (Jordanie), tour de la Méditerranée, Maroc, etc. Avec des amis globe-trotters, il parcourt de long en large, en trail, le Burkina Faso et le Ghana.

En 1988, il s’essaie à une mission humanitaire en Afghanistan, avec Vétérinaires sans frontières : « J’avais la quarantaine et l’envie de tout plaquer. Je ne supportais plus les lamentations éternelles des éleveurs. La rurale m’apparais­sait trop répétitive. J’avais envie de m’orienter vers la canine, pour faire plus de médecine. Puis je suis revenu. » En 2006, sollicité par un ami vétérinaire, il part pendant 3 semaines au Niger avec une ONG¹ afin de former des auxiliaires vétérinaires. Mais l’appel du grand large survient 2 ans plus tard…

« J’ai surtout découvert que j’aimais voyager à vélo  »

Il rejoint alors Pékin à vélo, pour voir son ami Stéphane Houdet² devenir champion paralympique de tennis handisport en double messieurs. Tous 2 devaient s’associer lorsque Stéphane Houdet a été amputé d’une jambe, à la suite d’un terrible accident de moto, en Autriche. Il a abandonné son métier de vétérinaire pour rebondir, avec succès, dans le sport professionnel pour les personnes handicapées. Le périple jusqu’en Chine dure plus de 4 mois au sein d’un groupe de la Fédération française de cyclotourisme : « C’était le club Med ! Toute la logistique était prise en charge par l’organisation. Le matin, le petit-déjeuner nous attendait, les rafraîchissements suivaient lorsqu’il faisait chaud. Mais, hormis ce confort, que je ne recherche pas, et les contraintes du groupe, qui ne correspondent pas à ma nature de solitaire, j’ai surtout découvert que j’aimais le voyage à vélo. Ce qui me fascinait, c’était de prendre chaque jour de la distance avec mon environnement habituel. Je me sentais un autre. J’ai découvert alors que je suis bien lorsque je suis complètement dans le voyage, ne sachant plus quel jour on est, déconnecté des pesanteurs de la vie quotidienne. Comme dans un état second. » Sur place, il en profite pour faire un détour par Hanoï (Viêt Nam), où vit son beau-frère, avec en tête, déjà, le projet d’un nouveau grand voyage, à vélo. Ce sera en Afrique.

« Sous la tente, dans la brousse, j’ai revendu mes parts à mon associée  »

Retardé par un accident de vélo et un tendon sectionné lors d’une randonnée cycliste organisée par des vétérinaires, il rejoint, fin 2010, 2 compagnons “Paris-pékinistes” comme lui, à Dakar. Sa femme, Suzanne, sera du voyage entre Ouagadougou, au Burkina, et Kam­pala, en Ouganda, soit pendant 3 mois. Sénégal, Mali, Burkina, Bénin, puis un saut en avion au-dessus du Congo pour gagner Nairobi (Kenya). Le périple se poursuit à travers l’Ouganda, la Tanzanie, le Malawi, la Zambie, la Namibie et l’Afrique du Sud… Marc Wuyts arrive au Cap pres­que 8 mois plus tard : il a parcouru 13 000 km à vélo, et il est prêt à repartir…

« Lorsque nous sommes partis du Sénégal, nous ne savions pas pour combien de temps. Mais plus je m’enfonçais au cœur de l’Afrique, plus m’apparaissait évidente la nécessité de régler ma situation professionnelle avant de revenir en France. Sous ma tente, le soir, dans la brousse, j’ai revendu mes parts à mon associée, par courriel. Je me suis senti ensuite tellement libéré, comme sur un petit nuage, de la Tanzanie jusqu’au Cap. Ne plus jamais me lever la nuit… »

Buenos Aires-Quito, en passant par Ushuaïa !

Les soucis professionnels, les impayés, les relations avec la clientèle avaient fini par miner son moral sans qu’il identifie cette réalité comme telle. L’angoisse l’étreignait au point, confie Suzanne, qu’il avait peur de la maladie : « Il lui fallait toujours se hâter de mener ses projets à terme, comme si le temps lui manquait. » « C’est vrai, reconnaît-il, que je pense à la mort tous les jours. Chez moi, je ne peux pas rester en place ; je suis beaucoup plus cal­me en voyage. » Sans doute plus serein maintenant, il est cependant déjà reparti au Niger, pour une autre mission avec une ONG belge créée par un de ses amis ; puis en Australie pour voir sa fille, ainsi qu’en Nouvelle-Zélande. Chez lui, à Tronget, Marc Wuyts se lance un nouveau défi à vélo : Buenos Aires-Quito, en passant par Ushuaïa !

• 1 Organisation non gouvernementale.

• 2 Stéphane Houdet (N 94) est le récent vainqueur du tournoi 2012 de Roland-Garros (tennis handisport simple messieurs), ce qui le place dorénavant n° 1 mondial. Il a déjà remporté, en double messieurs, parfois à plusieurs reprises, Roland-Garros, l’Open d’Australie, l’US Open et Wimbledon.