Réaliser une extraction dentaire chez le lapin : les prémolaires et les molaires (2e partie) - La Semaine Vétérinaire n° 1499 du 08/06/2012
La Semaine Vétérinaire n° 1499 du 08/06/2012

Formation

NAC

Auteur(s) : JULIEN GOIN

Fonctions : praticien à Pornic (Loire-Atlantique)

L’extraction dentaire des prémolaires et des molaires consiste à retirer chirurgicalement une ou plusieurs de ces dents, qui sont dépourvues de différence anatomique, pour corriger une affection dentaire. Elle est indiquée lors de malocclusion jugale sévère, gênante ou récidivante, ainsi qu’en présence d’un abcès, d’une infection ou d’une fracture dentaire sévère (voir photos 1 et 2). La technique détaillée est celle de l’extraction par voie buccale.

Le protocole anesthésique (par voie gazeuse ou parentérale) et l’analgésie sont abordés dans la première partie de cet article, parue dans notre précédent numéro1. Ils ne présentent pas de particularité par rapport à l’extraction des incisives.

ÉTAPES DE L’EXTRACTION

Préparation du site opératoire et tenue des instruments

Le lapin est placé en décubitus ventral. La cavité buccale est maintenue ouverte par la mise en place d’un ouvre-bouche et, éventuellement, d’un écarteur à joues (voir photo 3). Les dents à extraire peuvent être préalablement raccourcies afin de faciliter l’intervention. Les dents et les gencives sont aseptisées à l’aide d’une compresse imbibée d’antiseptique. Une main tient les instruments, tandis que l’autre immobilise le maxillaire (pour l’extraction des dents supérieures) ou la mandibule (pour l’extraction des dents inférieures).

Section des attaches dentaires

Le syndesmotome à molaires de Crossley est inséré entre la gencive et chacune des faces de la dent. Pour les faces médiale et latérale, l’extrémité aplatie parallèlement à l’axe de l’instrument est utilisée, en pratiquant de petits mouvements de bascule gauche/droite. Pour les faces craniale et caudale, l’extrémité aplatie perpendiculairement à ce même axe est utilisée, en pratiquant de petits mouvements de bascule avant/arrière.

Ces mouvements permettent la section du ligament périodontal (voir photos 4 et 5).

Extraction de la dent

Une fois la dent rendue complètement mobile, celle-ci est extraite à l’aide d’un davier à molaires. La présence du bourgeon dentaire est vérifiée (voir photos 6 à 8).

Écrasement du tissu germinatif

Le tissu germinatif, situé au fond de l’alvéole et à l’origine de la croissance dentaire, est écrasé par une pression exercée avec l’une des extrémités du syndesmotome. Cette étape permet de prévenir une repousse dentaire ultérieure.

Ces différentes phases sont répétées pour chacune des dents concernées. La présence d’une petite hémorragie est fréquente et normale pendant ces étapes. Les dents inférieures sont plus difficiles à extraire que les supérieures. Il n’est pas nécessaire de retirer les dents saines opposées, même en cas d’extraction de plusieurs dents, car cela ne génère habituellement pas de malocclusion postopératoire secondaire. Le lapin réussit en général à user correctement ses dents malgré l’extraction. Il convient toutefois de prévenir le propriétaire que des contrôles ultérieurs seront nécessaires.

Suture gingivale

La gencive est nettoyée à l’aide d’une compresse imbibée d’antiseptique. Lorsque l’extraction ne concerne qu’une seule dent, la suture gingivale est facultative. Au-delà, une suture est conseillée afin de favoriser la cicatrisation et de prévenir le risque d’impaction alimentaire au sein des alvéoles dentaires (voir photo 9). Lorsque l’extraction concerne 5 dents ou plus, il est conseillé de réaliser 2 interventions successives à quelques semaines d’intervalle.

Soins postopératoires

Un examen radiographique postopératoire peut être réalisé afin de vérifier l’absence de fragments dentaires et de lésions osseuses iatrogènes, mais son intérêt est moindre que lors d’extraction d’incisives, car les racines des prémolaires et des molaires sont plus petites et moins susceptibles de se fracturer pendant l’intervention. Un traitement antibiotique (enrofloxacine, 10 mg/kg/j, per os) et anti-inflammatoire (méloxicam, 0,3 mg/kg/j, per os) est prescrit jusqu’au contrôle, effectué 10 jours après l’opération.

AUTRES VOIES D’ABORD CHIRURGICALES

Pour améliorer la visualisation des dents, notamment lorsque la malocclusion concerne les molaires les plus distales, certains auteurs conseillent de réaliser une buccotomie, qui consiste en une incision au niveau de chaque commissure labiale. D’autres privilégient l’extraction par voie externe, via la joue, avec incision cutanée, dissection musculaire et forage de l’os. Ces 2 dernières techniques sont toutefois plus traumatisantes que celle décrite ci-dessus, qui est à recommander en l’absence d’autres lésions nécessitant un abord chirurgical externe (par exemple, retrait chirurgical d’un abcès dentaire, voir photo 10).

  • 1 Voir La Semaine Vétérinaire n° 1498 du 1er/6/2012 en pages 46-47.

Références bibliographiques

  • Boussarie D, Rival F. Atlas de dentisterie du lapin de compagnie. Éditions VetNAC, 2010.
  • Quesenberry KE, Carpenter JW. Ferrets, rabbits and rodents. Clinical medicine and surgery. Editions Saunders, 3rd edition, 2012.
  • Harcourt-Brown F. Textbook of rabbit medicine. Editions Butterworth-Heinemann, 2002.

RAPPELS ANATOMIQUES

> Formule dentaire du lapin : I 2/1 C 0/0 PM 3/2 M 3/3 (28 dents).

> Absence de différence anatomique entre les prémolaires et les molaires.

> Dents à croissance continue dont l’usure est assurée par la mastication de fibres végétales (hypsodontie).

MATÉRIEL SPÉCIFIQUE NÉCESSAIRE

> Gants.

> Compresses.

> Antiseptique (chlorhexidine diluée, par exemple).

> Ouvre-bouche.

> Écarteur à joues.

> Syndesmotome (luxateur) à molaires de Crossley.

> Davier à molaires.

> Matériel de suture (voir photo) : porte-aiguilles, pince mousse, ciseaux, fil résorbable de faible diamètre (Vicryl® 4-0).

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