Les ténébrions, des coléoptères nuisibles à la filière avicole et vecteurs potentiels d’agents pathogènes - La Semaine Vétérinaire n° 1496 du 18/05/2012
La Semaine Vétérinaire n° 1496 du 18/05/2012

Formation

PRODUCTIONS ANIMALES/VOLAILLES

Auteur(s) : KARIM ADJOU*, JULIEN VILLEVAL**

L’INSECTE ET SON COMPORTEMENT

Le petit ténébrion, Alphitobius diaperinus, est un insecte de l’ordre des coléoptères et de la famille des Tenebrionidae d’origine tropicale (voir photo 1). À la faveur des échanges commerciaux internationaux, le petit ténébrion est devenu une espèce cosmopolite qui a colonisé différents élevages hors sol, tels que les dindes, les poules pondeuses, les poulets et les porcs, ainsi que des cheptels extérieurs comme les bovins et les chevaux. A. diaperinus constitue à ce jour une nuisance majeure.

Les larves sont lucifuges (voir photo 2) : elles fuient la lumière, d’où le nom de ténébrion, qui vient du mot “ténèbres”. Ce comportement n’est pas aussi général chez les adultes, divisés en 2 groupes : le premier, fortement attiré par la lumière, peut s’envoler et se regrouper autour de sources de lumière extérieure ; le second fuit la lumière et a tendance à se concentrer dans les fissures des murs.

La population d’A. diaperinus suit les fluctuations saisonnières des températures extérieures. Durant les vides sanitaires hivernaux, les insectes sont susceptibles de se retrouver dans un environnement hostile (températures inférieures à 0 °C) entraînant une importante mortalité ; la population est alors affaiblie. Les insectes se réfugient dans le sol (sous les mangeoires et près des murs), dans les fissures des murs ou des isolants des parois des bâtiments (voir photos 3 et 4). Le retour de conditions d’élevage optimales et la hausse des températures externes au printemps jus­qu’en automne favorisent le développement de la population. Il est alors possible d’observer plusieurs pics de pullulation en été et en automne, voire en hiver si les conditions climatiques extérieures lors du vide sanitaire sont favorables.

Immédiatement après le retrait des mangeoires de la surface de la litière (6 heures avant le départ des animaux pour l’abattoir), un déplacement des insectes à la surface de la litière pour rejoindre les parois du bâtiment et les matériaux d’isolation est noté. À la suite du départ des bêtes pour l’abattoir, le bâtiment est maintenu ouvert, donc directement soumis aux conditions climatiques extérieures. La baisse progressive de la température de l’air ambiant et de la litière accentue ce processus de déplacement des insectes vers des sites refuges. De plus, les adultes et les larves trouvent abri dans le sol. Cet habitat offre, en effet, aux insectes des conditions thermiques plus stables qu’à l’extérieur. Cependant, ces températures demeurent toujours inférieures à celle observées en période d’élevage.

Les larves de dernier stade, en creusant des galeries afin de trouver un lieu obscur et calme pour la nymphose, causent un maximum de dégâts dans les élevages. Elles s’attaquent à différents types d’isolants thermiques, tels que les laines de verre ou de roche, le polystyrène expansé ou la mousse de polyuréthane. Les galeries, susceptibles d’atteindre 4 mm de diamètre, provoquent la destruction des cloisons isolantes du bâtiment et génèrent d’importantes pertes caloriques. Les adultes et les larves creusent également le sol à la recherche de nourriture, ce qui rend la litière pulvérulente en cas d’infes­tation massive.

SON RÔLE DE VECTEUR D’AGENTS PATHOGÈNES

De nombreux travaux de recherche étudient le rôle d’A. diaperinus dans la transmission d’agents pathogènes aux volailles. Il se contaminerait au contact des fèces ou en se nourrissant sur des cadavres d’animaux (voir photo 5).

Les micro-organismes responsables de maladies peuvent être :

→ des virus : ceux des maladies de Marek, de Gumboro, le coronavirus de la dinde et le virus responsables de la leucose (rôle très limité toutefois), celui de la variole (rôle très négligeable), le virus de la maladie de Newcastle (très peu probable), ainsi que celui de l’influenza aviaire ;

→ des bactéries : Escherichia coli, Salmonella Typhimurium, Campylobacter spp., Staphylococcus spp. ;

→ des champignons : Aspergillus flavus ;

→ des parasites : Eimera spp., Histomonas meleagridis, les cestodes (hôtes intermédiaires de Raillietina et Chaonotaenia infundibulum), les nématodes.

MOYENS DE LUTTE

La lutte biologique

La lutte biologique consiste à combattre les insectes ennemis des cultures en utilisant leurs agents pathogènes, leurs prédateurs ou leurs parasites naturels (des insectes ou des acariens entomophages ou des parasites, des bactéries ou des virus). L’objectif principal est de réduire le recours aux pesticides chimiques. Ce procédé biologique est largement utilisé pour contrôler les populations d’insectes nuisibles aux cultures. Toutefois, il n’est pas développé dans la lutte contre les ténébrions en élevage.

La lutte mécanique

Cette méthode comprend tout moyen matériel permettant la destruction ou la régulation d’une population d’insectes sans utilisation de matière(s) active(s) d’origine chimique.

Plusieurs pièges existent :

→ les pièges collants sous différentes présentations : rubans, rouleaux, plaques, etc., avec ou sans système d’enroulement au fur et à mesure du “remplissage” du support par les insectes ;

→ les brasseurs d’air : appareils qui, quel que soit leur type de conception, visent à créer un milieu défavorable aux insectes ;

→ les destructeurs électriques d’insectes volants.

La lutte mécanique, seulement complémentaire à un autre système, ne peut être utilisée que dans des zones ou des locaux spécifiques.

La lutte chimique

La lutte chimique est fondée sur l’utilisation de produits insecticides d’origine naturelle ou de synthèse. Les principales familles d’insecticides sont les organophosphorés, les pyréthrinoïdes, les carbamates et les inhibiteurs de synthèse. Les modes d’action des insecticides reposent sur la perturbation du système nerveux, de la respiration cellulaire, de la mue ou de la mise en place de la cuticule.

Pour le traitement insecticide dans les élevages, 3 types de produits se distinguent selon leurs usages :

→ les insecticides utilisables pour le traitement des bâtiments ;

→ ceux qui traitent les stockages de déjections et les litières ;

→ ceux utilisables sur les animaux.

Ainsi, une même molécule est susceptible d’avoir plusieurs formulations selon son usage.

Toute formulation doit obtenir une autorisation de mise sur le marché (AMM) pour pourvoir être commercialisée. Selon son usage, un produit insecticide répond à une législation spécifique.

Les traitements chimiques ont différents modes d’action.

→ Les organophosphorés (adulticides) agissent par contact, par ingestion et par inhalation. Puissants inhibiteurs de l’acétylcholinestérase, ils bloquent le système nerveux de l’insecte. Celui-ci présente alors une hyperactivité, suivie de convulsions, puis de paralysie et de mort.

→ Les pyréthrinoïdes (adulticides) agissent par contact et par ingestion. Ils ne franchissent pas la barrière cutanée des mammifères.

→ Les carbamates (adulticides) sont généralement associés à un attractif sexuel.

→ Les inhibiteurs de synthèse (larvicides) de la cuticule des larves bloquent la synthèse de la cuticule, ce qui perturbe l’éclosion des œufs de parents traités, les phases de mues de la larve et la formation de la pupe.

Les principales méthodes d’application des insecticides de synthèse en élevage sont la pulvérisation, la dispersion de granulés, l’application d’un badigeon, la nébulisation et la thermonébulisation.

La lutte, préventive, est menée tout au long de l’année, même si l’infestation survient principalement à la belle saison (printemps et été).

Il convient, bien entendu, de faire également attention en élevage avicole en éliminant les cadavres et les aliments moisis, qui constituent des sources de nourriture pour l’insecte, et en réparant tous les éléments abîmés du bâtiment afin d’empêcher les ténébrions de se réfugier dans des parties non touchées par les traitements insecticides.

PORTRAIT DE L’INSECTE

→ Le ténébrion est un petit coléoptère brun foncé qui se déplace dans les bâtiments d’élevage en creusant des galeries dans les parois et le sol. Il se cache en présence de lumière.

→ La durée de son cycle de reproduction varie selon la température ambiante, et la reproduction s’arrête en cas de forte chaleur. Il est résistant au froid.

→ L’adulte et la larve sont capables de demeurer plusieurs semaines sans nourriture. Le stade nymphal permet au ténébrion de résister longtemps.

→ Les larves se nourrissent de protéines trouvées dans la litière (œufs, larves de mouches).

→ L’adulte s’alimente de moisissures qu’il trouve au niveau de l’aliment humide et du fumier.

→ Le ténébrion aime la chaleur et l’humidité.

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