La lutte contre la leishmaniose s’organise - La Semaine Vétérinaire n° 1495 du 11/05/2012
La Semaine Vétérinaire n° 1495 du 11/05/2012

5e journée du Resfiz à Nice

Actu

SANTÉ ANIMALE

Auteur(s) : MAËLLE GOUIX

De nouveaux cas et foyers de leishmaniose canine apparaissent dans des zones jusqu’alors indemnes, accompagnés d’une extension des phlébotomes, seuls vecteurs biologiques de Leishmania sp.

La leishmaniose canine ne préoccupe plus seulement les confrères de la zone d’enzootie des phlébotomes, comme l’ont démontré les conférences présentées lors de la 5e journée d’actualités du Réseau d’épidémiosurveillance franco-italien des zoonoses (Resfiz) à Nice (Alpes-Maritimes), en partenariat avec Virbac, sur les leishmanioses humaines et animales.

Les résultats de 3 enquêtes nationales (menées en 1986, en 2004 et en 2011 par l’unité DPM1 d’Oniris grâce à la collaboration des confrères métropolitains) ont exposé les réalités du terrain.

Les cas de leishmaniose clinique ont fortement augmenté de 1986 à 2004 : les cliniques diagnostiquant plus de 50 cas par an couvrent 8 puis 13 départements respectivement. En 2004, 40 000 chiens malades cliniquement sont suivis (soit une estimation de 200 000 chiens infectés). Fin 2011, la zone d’enzootie recouvre le tiers sud de la France, soit 32 départements. Tandis que dans le bassin méditerranéen, zone d’enzootie traditionnelle de la leishmaniose, l’incidence diminue (sauf dans les Alpes-Maritimes et la Corse), la poussée vers l’Ouest (Tarn, Lot-et-Garonne, Pyrénées-Atlantiques) se renforce et se poursuit. La répartition éclatée des cas de leishmaniose autochtone, hors de la zone d’enzootie, concerne 31 départements.

L’étude de 2011 révèle aussi que les mêmes 7 signes d’appel dominent, en zone enzootique ou non : baisse de l’état général, amaigrissement, squamosis, alopécie, atteinte des griffes, adénomégalie et lésions de la truffe.

Origine des foyers de leishmaniose

L’infection à L. infantum en zone enzootique (comme le sud de la France) se maintient, malgré la faible proportion (0,5 à 3 %) de vecteurs porteurs. L’importance de la transmission non vectorielle chez le chien (transmissions verticale, vénérienne et par transfusion sanguine) n’est pas clairement connue, mais elle permettrait d’expliquer les cas autochtones en dehors des zones d’enzootie des phlébotomes.

En revanche, le nombre croissant de cas déclarés en Europe du Nord (Royaume-Uni, Allemagne, Danemark, etc.) concerne des animaux infectés importés d’Europe du Sud. Cela soulève des questions sur le risque représenté par ces “réservoirs canins hors zone d’enzootie”, en particulier en présence de vecteurs potentiels, d’autant que les changements climatiques pourraient modifier la répartition et la dynamique des vecteurs.

La prévention, une nécessité

La prévention est la clé de la lutte contre la leishmaniose. L’emploi d’insecticides répulsifs doit être strictement respecté d’avril à novembre dans le bassin méditerranéen, et associé à des mesures sanitaires visant à minimiser l’exposition des chiens aux phlébotomes, puisque l’effet cumulatif des piqûres de phlébotomes engendre le risque, sur le long terme, de voir s’exprimer la maladie. Ces précautions, bien connues des praticiens, ont prouvé leur efficacité.

La mise sur le marché, en septembre 2011, du vaccin CaniLeish® de Virbac (premier vaccin ayant obtenu l’AMM en Europe contre la leishmaniose canine) renforce les moyens de prévention. Ce vaccin stimule, chez les chiens non infectés, une réponse immunitaire discernable de celle provoquée par une infection naturelle par le test de sérologie rapide Speed Leish K®. La production d’anticorps devient détectable chez les chiens vaccinés au 56e jour suivant le début du protocole vaccinal, soit 2 semaines après la dernière injection, selon le laboratoire. Une autre étude pilote a tenté de déterminer l’effet de la vaccination sur l’infectiosité pour les phlébotomes des chiens vaccinés infectés subcliniques. Bien que le faible nombre de chiens inclus dans l’étude ne permette pas de conclure, les premiers résultats sont encourageants et laissent imaginer que la vaccination peut bloquer le cycle de transmission du parasite.

Espèces réservoir et leishmaniose humaine

La leishmaniose est connue chez le chat, qui serait à considérer comme un hôte accidentel dans les zones d’enzootie comme le sud de la France. Les chats testés se révèlent souvent positifs à l’immuno-fluorescence indirecte ou à la polymerase chain reaction (PCR) et, comme ils sont infectieux pour les phlébotomes P. perniciosi et L. longipalpis, leur rôle dans l’épidémiologie de la leishmaniose devrait être mieux évalué. Le parasite a aussi été détecté chez de nombreuses espèces non domestiques (renard, loup, lynx, lièvre, rat, etc.). Le rôle épidémiologique du renard soulève de nombreuses questions, car cet animal est abondant en Europe, mobile, vit à proximité des hommes, et les taux d’infection mesurés sont parfois supérieurs à ceux des chiens infectés qui vivent dans les mêmes zones géographiques (la prévalence par PCR peut atteindre 40 à 75 % en zone méditerranéenne). De plus, le profil de la maladie dans la population de renards en Europe reflète un critère essentiel pour la viabilité de l’hôte réservoir : taux d’infection élevé et rares cas symptomatiques… Les espèces capables de devenir, dans des conditions idoines, un réservoir de Leishmania pour l’homme ne sont pas encore toutes connues.

Chez l’homme, la leishmaniose viscérale à L. infantum du sud de l’Europe est une zoonose qui affecte les jeunes enfants et les adultes immunodéprimés2. Dans cette région, ce n’est pas tant de posséder un chien infecté, mais de vivre en zone de circulation du parasite qui augmente le risque de contamination des membres de la famille.

Un consensus autour de quelques recommandations

LeishVet1, association scientifique internationale de vétérinaires spécialisés dans la leishmaniose fondée en 2005, a établi des recommandations pour le diagnostic, le traitement et la prévention de la maladie chez le chien. Lors de forte suspicion de leishmaniose, mieux vaut réaliser d’abord une sérologie quantitative puis, si nécessaire, un examen parasitologique. Il est également recommandé d’effectuer une sérologie quantitative 3 mois après le début de l’exposition pour les chiens, sains ou suspects, qui vivent dans une région non endémique, mais ont voyagé en zone endémique. Pour le dépistage des chiens sains infectés en zone endémique, il convient de préférer une sérologie seule, ou une combinaison sérologie-PCR (plutôt qu’une PCR seule) avant un voyage en zone non endémique, un don de sang, ou si une détection annuelle est souhaitée par le propriétaire.

LeishVet propose en outre une gradation en 4 stades de sévérité de la maladie et fournit des conseils sur le traitement médical, qui repose sur l’association d’antimoniate de méglumine2, ou de miltéfosine2, et d’allopurinol2.

1 Voir www.leishvet.org (site en préparation).

2 Médicament à usage humain.

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