LORSQUE VACHE DU JAPON RIME AVEC RECONVERSION - La Semaine Vétérinaire n° 1494 du 04/05/2012
La Semaine Vétérinaire n° 1494 du 04/05/2012

REPORTAGE

Auteur(s) : SERGE TROUILLET

Notre confrère Philippe Prévost se consacre à l’élevage de chevaux, de charolaises et de bœufs de Kobe, une race japonaise. Un pari entrepreneurial autour d’un concept original.

Lorsque vous demandez à Philippe Prévost, vétérinaire parti de l’industrie pharmaceutique, ce qu’il a décidé de faire à 50 ans, il répond assez facilement : « Tout plaquer. » L’élevage de chevaux de sport, qu’il pratique depuis 15 ans, est un bon départ d’autant que l’expérience est, jusqu’à présent, assez concluante au regard des prix de vente de ses poulains. Néanmoins, cela ne suffit pas à un homme habitué à des projets de businessman et, surtout, animé par une passion secrète : l’élevage. Le hasard veut que notre confrère découvre la viande de Kobe, une viande de bœuf japonais exceptionnelle par son persillé et qui vaut de l’or : à 350 € le kilo de viande, la carcasse d’un bœuf de Kobe coûte près de 10 000 € ! En France, seul un éleveur du Nord élève des vaches de Kobe. « En ayant auparavant développé ma propre entreprise, filiale d’une maison mère italienne, j’ai été habitué aux aéroports ou à ce que certains nomment l’international, confie Philippe Prévost. Qui peut voir le lien aujourd’hui avec un élevage qui, à première vue, peut paraître traditionnel pour cette région lyonnaise Et bien justement, le lien demeure dans l’ouverture hors de nos frontières, non dans la diffusion de mes produits, mais bien plus dans une intégration et de culture de fournisseurs étrangers. »

Aujourd’hui, Philippe Prévost développe son élevage en 3 pôles : la production et l’exploitation de poulains de sport vendus à 3 ans pour les mâles et 6 à 8 ans pour les juments (l’élevage existe depuis plus de 10 ans), ensuite un cheptel de vaches charolaises (dont les génisses sont utilisées comme mères porteuses) vendues sur pied ou en vente directe sous forme de caissettes (un mode de vente qu’il compte développer), enfin un élevage à créer de toutes pièces de bœufs de Kobe. En partenariat avec un éleveur argentin et parce que les Japonais refusent toute forme d’exportation en mort ou en vif, Philippe Prévost a mis en place des embryons de bovins de Kobe pour initier, d’ici à 3 ans, la vente de cette viande d’exception et constituer progressivement un troupeau souche de mères. Car la paillette d’insémination de sperme de taureau de Kobe deviendra forcément plus compétitive en termes de prix que l’embryon à plus de 1 000 € !

Un projet lourd qui suppose de voir loin

Le projet est ambitieux : « Ma banque me suit, même si je n’ai pas choisi la facilité. Mais mon projet est original et fait parler autant qu’il fait écrire. J’y crois, mais je sais que les 3 premières années seront décisives. Je découvre les aléas de l’élevage et je suis frappé par l’imprévisible. Dans l’industrie, on connaît l’imprévu, mais là, c’est sans cesse, ne serait-ce que dans l’organisation de la journée. »

Humainement, Philippe Prévost s’appuie sur son épouse, praticienne à Lyon, et sur l’ancien propriétaire de sa ferme, Alain Rigaudier, qui de vendeur est passé au statut de salarié. Il assiste Philippe Prévost et son aide se révèle particulièrement précieuse pour les travaux des champs : « La moitié de mon temps au moins est occupée par des tâches administratives. J’essaie de me concentrer sur la partie élevage, d’autant que j’ai mes 8 premiers veaux de Kobe depuis cet hiver. Il a fallu gérer la construction des bâtiments et poursuivre l’élevage équin, que nous maîtrisons à peu près. Je me concentre maintenant sur le cheptel bovin. J’essaie de développer la commercialisation et j’ai des projets pour faire vraiment partager l’élevage à nos différents visiteurs. Alain Rigaudier gère la partie culturale, que je ne souhaite pas prendre en charge aujourd’hui. Il y a tant à faire partout ! »

Philippe Prévost profite-t-il d’un acquis par sa première formation de vétérinaire ? Rien n’est moins évident, d’autant qu’il n’a pas eu réellement d’expérience de clinicien. Son acquis se décline entre le savoir-faire de la gestion d’un projet et le pari entrepreneurial autour d’un concept original. Son acquis réel réside dans sa passion pour l’élevage et sa capacité à savoir transformer ce qui le fait rêver chez les chevaux en un singulier projet sur des vaches. Dès lors, sa reconversion s’appuie à la fois sur son expérience professionnelle et sur une âme d’enfant : un savoir-faire et un savoir-être. En cela, son projet est impressionnant.

LE JAPON ET LE BŒUF DE KOBE

Jusqu’au milieu du XXe siècle, la consommation de viande au Japon était restreinte, a fortiori celle de bœuf (un peu plus de 5 kg par habitant et par an), 10 fois moins forte dans les années 50 que dans les pays occidentaux au développement comparable. La vache traditionnelle japonaise wagyu est issue de croisements avec des races européennes (qui se sont arrêtés au moment de la crise de 1910). Seuls 2 troupeaux insulaires sauvages sur les îles de Mishima et de Kuchinoshima demeurent totalement autochtones. La sélection qui suivit se fit au profit de l’aptitude au travail et en raison des qualités gustatives du produit. La qualité exceptionnelle du persillé fut presque plus un effet du hasard. Après la guerre, le gouvernement nippon a reconnu 3 races de vaches noires wagyu et institué l’enregistrement du bétail.

Interdite à l’exportation, la viande de bœuf de Kobe, consommée en fines tranches, est aujourd’hui réputée pour ses qualités organoleptiques, avec un arôme de beurre alors que les graisses sont plus pauvres en cholestérol que les graisses animales habituelles.

L’élevage du bœuf de Kobe comporte ses originalités : distribution de bière l’été pour amplifier l’appétit des animaux face à des rations hyperénergétiques et massages réguliers de la peau tous les jours, pendant 20 minutes pour une meilleure distribution du gras au niveau musculaire. Si Philippe Prévost, en bon scientifique, préfère raisonner sur des bases génétiques et une alimentation adaptée pour arriver à ses fins, il n’en respecte pas moins le rituel si cher aux Japonais et qui fait partie du rêve…

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