Diagnostic et origine des régurgitations - La Semaine Vétérinaire n° 1490 du 06/04/2012
La Semaine Vétérinaire n° 1490 du 06/04/2012

Formation

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : OLIVIER DOSSIN*, GWENAËL OUTTERS**

Fonctions :
*diplomate Ecvim, maître de conférences en médecine à l’ENV de Toulouse. Article rédigé d’après une conférence présentée au congrès de l’Afvac 2011.

POINTS FORTS

– Un interrogatoire minutieux permet, la plupart du temps, de différencier la régurgitation et le vomissement.

– L’épreuve de repas ou d’abreuvement en consultation peut aider à caractériser les régurgitations d’origine pharyngée.

– Les radiographies thoraciques permettent de rechercher des signes de complication de broncho-pneumonie par aspiration.

RÉGURGITATIONS VERSUS VOMISSEMENTS

La régurgitation est une expulsion passive, par la bouche, d’aliments non digérés, le plus souvent recouverts de salive ou de mucus. Son aspect tubulaire n’est pas spécifique. Perprandiale, elle reflète une atteinte pharyngée ou une sténose/obstruction œsophagienne haute. Postprandiale, elle évoque une atteinte de l’œsophage ou de la jonction œsophago-gastrique.

Le vomissement est un phénomène actif et réflexe qui conduit à l’expulsion du contenu de l’estomac et du duodénum proximal. Il commence par une nausée, caractérisée chez le chien par de l’inquiétude, un lèchement des babines, un rictus, de la prostration ou de l’agitation. L’estomac devient atone, les sécrétions acides diminuent pendant que celles de mucus augmentent. La seconde phase de haut-le-cœur correspond à la mise sous tension de l’estomac : apparition de contractions abdominales, d’inspirations à glotte fermée, encolure allongée et bouche ouverte. Les contractions abdominales compriment ensuite l’estomac et permettent l’expulsion du contenu gastrique : c’est le vomissement.

ÉLÉMENTS D’ORIENTATION

Commémoratifs

L’interrogatoire des propriétaires est primordial pour différencier le vomissement et la régurgitation. Il débute par des questions larges puis se poursuit par d’autres de plus en plus précises : ont-ils observé la présence d’efforts ? Des contractions de l’abdomen De l’inquiétude avant l’expulsion ?, etc. Malgré cela, la description permet le diagnostic dans à peine deux tiers des cas.

La situation par rapport au repas peut constituer un élément piégeur : certaines régurgitations œsophagiennes sont décalées de plusieurs heures, tandis que les régurgitations pharyngées et le repas sont simultanés. La présence de bile oriente davantage vers des vomissements. Les animaux qui présentent des affections œsophagiennes régurgitent souvent de la salive, à côté de régurgitations alimentaires. Le moulage tubulaire de l’aliment expulsé oriente vers des régurgitations (particulièrement lors d’œsophagite ou de sténose œsophagienne), sauf chez le chat, susceptible de présenter, en raison de ses caractéristiques anatomiques, des vomissements tubulaires. Les affections avec une forte dilatation de l’œsophage sont parfois accompagnées de bruits de gargouillis lorsque l’animal respire ou court : il n’est pas rare que les propriétaires sachent décrire ces bruits.

Examen clinique

L’examen clinique s’intéresse à la cavité buccale et au pharynx pour rechercher des corps étrangers ou des éléments obstructifs. Le ptyalisme est un élément symptomatique de la nausée. Cependant, il peut aussi être présent lors d’affections œsophagiennes qui entraînent des régurgitations. L’inspection et la palpation de l’encolure mettent en évidence certaines dilatations sévères de l’œsophage. Les régurgitations motivent un examen de l’appareil respiratoire, à la recherche d’une broncho-pneumonie par fausse déglutition ou aspiration de contenu digestif.

En consultation, il peut être utile de faire manger ou boire l’animal afin de noter les difficultés de déglutition et/ou de visualiser des régurgitations perprandiales, qui orientent vers une dysphagie pharyngée ou une sténose œsophagienne proximale.

2 SITUATIONS “PIÈGE”

Un vomissement qui ressemble à une régurgitation est peu fréquent. C’est pourtant le cas d’un animal qui présente une incompétence du cardia ou un reflux gastro-sophagien ; l’analyse du contenu expulsé aide alors au diagnostic différentiel (présence de bile, pH).

Une régurgitation qui ressemble à un vomissement se rencontre plus fréquemment, en particulier dans les situations de mégaœsophage avec une dilatation sévère surtout chez les chiens de grand format qui, pour expulser l’important contenu œsophagien, mobilisent les muscles abdominaux, mimant ainsi des efforts de vomissement. De même, dans le cas de sténose œsophagienne ou d’œsophagite haute, l’abdomen se contracte pendant la régurgitation, rapidement suivie d’une possible réingestion du contenu expulsé : le propriétaire peut décrire une participation active de l’abdomen alors qu’il s’agit d’une régurgitation.

LOCALISATION DE LA LÉSION LORS DE RÉGURGITATION

L’examen clinique soigneux et complet (bouche, encolure, appareil respiratoire) permet de déterminer l’étage digestif atteint. Les régurgitations orales sont secondaires à des troubles de la préhension alimentaire. Les dysphagies pharyngées sont souvent associées à des efforts de déglutition marqués, l’animal étendant sa tête et son encolure, à de la toux et de la salivation et à des régurgitations perprandiales. Les affections œsophagiennes sont caractérisées par des régurgitations postprandiales, conjointement à de la toux et de la salivation.

La radiographie, simple ou précédée d’un repas baryté, est diagnostique des atteintes œsophagiennes. La fluoroscopie permet une épreuve fonctionnelle. L’endoscopie type la lésion et met en place le traitement, lors de sténose par exemple.

ÉTIOLOGIE DES RÉGURGITATIONS

→ Les régurgitations pharyngées ont 3 types de cause. Le passage du bol alimentaire peut être gêné par un corps étranger ou une tumeur. Les situations de paralysie pharyngée, nerveuse, musculaire ou fonctionnelle entraînent des dysphagies. Enfin, l’achalasie cricopharyngée correspond à un asynchronisme entre les contractions du pharynx et l’ouverture du sphincter œsophagien : ces animaux présentent parfois des rejets alimentaires par le nez.

→ Les régurgitations œsophagiennes peuvent être secondaires à une hypomotricité (mégaœsophage), à une obstruction (corps étranger, tumeur, sténose, compression extrinsèque), à un état inflammatoire responsable de rétropéristaltisme (œsophagite) ou à des défauts du système valvulaire gastro-œsophagien antireflux.

EXAMENS COMPLÉMENTAIRES

→ Le mégaœsophage est idiopathique ou secondaire. La myasthénie grave et l’hypocorticisme sont des causes majeures de mégaœsophage secondaire. La radiographie, accompagnée en cas de doute d’un repas baryté, permet le diagnostic. L’endoscopie n’est pas nécessaire, si ce n’est pour obtenir un bilan de la sévérité des lésions œsophagiennes.

L’hypomobilité œsophagienne a été récemment décrite par des confrères1 de l’université de Cambridge chez de jeunes chiens, en particulier des terriers susceptibles de présenter des régurgitations transitoires ou d’être asymptomatiques. Ces animaux présentent des anomalies fluoroscopiques sans aucun autre signe radiologique : reflux gastro-œsophagien et augmentation du temps de transit. Cette affection, de mécanisme inconnu, est spontanément réversible dans 50 % des cas environ.

→ Les œsophagites sont explorées par endoscopie ; les examens radiographiques ne sont pas utiles.

→ La sténose œsophagienne, une complication classique de l’anesthésie générale, se diagnostique par radiographie, avec des produits de contraste ou par endoscopie, qui permet également le diagnostic et le traitement par dilatation avec ballonnets.

→ Lors de dextroposition de l’aorte, l’œsophage est comprimé par le ligament artériel à gauche, la crosse aortique mal positionnée à droite et la base du cœur ventralement. La dysphagie et les régurgitations apparaissent lorsque l’animal commence à ingérer des aliments solides lors du sevrage. Ces animaux présentent souvent, de façon réactionnelle, une paralysie de l’œsophage distal.

→ La hernie hiatale est associée à un reflux gastro-œsophagien qui entraîne une œsophagite. La réalisation de clichés radiographiques séquentiels permet rarement la visualisation correcte de ce reflux ; la fluoroscopie est l’examen de choix.

  • 1 Bexfield NH et coll., J. Vet. Int. Med., 2006,20:1314-1318.

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