Indications du myélogramme et de la biopsie médullaire - La Semaine Vétérinaire n° 1474 du 09/12/2011
La Semaine Vétérinaire n° 1474 du 09/12/2011

Formation

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : CATHERINE LE FOLL

Fonctions : DESV d’anatomie pathologique Laboratoire CCpath (Tournefeuille, Haute-Garonne)

Points forts

– 2 examens complémentaires permettent d’explorer la fonctionnalité de la moelle osseuse hématopoïétique : le myélogramme (examen cytologique) et la biopsie ostéomédullaire (examen histologique).

– Ces 2 analyses apportent des informations différentes. Leur choix est dicté par les données cliniques et les résultats de la numération-formule sanguine.

– Si le myélogramme n’effraie plus le praticien, la biopsie médullaire reste peu pratiquée. Pourtant, elle fournit des informations importantes (diagnostic, pronostic, etc.), lorsque le prélèvement est techniquement interprétable et réalisé à bon escient.

QUAND EXPLORER LA MOELLE OSSEUSE ?

4 situations cliniques incitent à explorer la moelle osseuse hématopoïétique.

→ Une anomalie quantitative de la numération-formule suggérant une altération centrale de l’hématopoïèse :

– une anomalie quantitative isolée (ne touchant qu’une seule lignée sanguine) qui persiste depuis plusieurs semaines (neutropénie, leucocytose, etc.) ;

– une anomalie quantitative plurielle (qui atteint plusieurs lignées sanguines : bicytopénie, pancytopénie) ;

– une anémie microcytaire et/ou hypochrome qui suggère une perturbation de l’hémoglobinogenèse après l’exclusion des causes périphériques (inflammation et carence martiale en fer) ;

– une anémie normochrome arégénérative après l’exclusion des causes périphériques (inflammation, insuffisance rénale, dysendocrinies, etc.). L’exploration de la moelle osseuse dans les autres cas (anémie régénérative, maladie intercurrente à effet systémique, etc.) n’est pas nécessaire en 1re intention. Il importe donc de vérifier si l’anémie est réellement arégénérative en confirmant l’absence d’élévation du taux de réticulocytes et la persistance de l’anémie une semaine après le diagnostic initial d’anémie. Une fois le caractère arégénératif de l’anémie attesté, les affections systémiques susceptibles d’induire ce type d’anomalie de la formule sanguine (bilan biochimique) sont à exclure.

→ Des anomalies qualitatives des cellules sanguines circulantes à la lecture du frottis sanguin (circulation de cellules atypiques, de cellules souches, etc.).

→ Un bilan d’extension des tumeurs hématopoïétiques (lymphome, leucémie, mastocytome malin, histiocytose maligne, etc.) et des tumeurs non hématopoïétiques suspectes de dissémination métastatique par voie sanguine (recherche de métastases médullaires osseuses).

→ Des fièvres d’origine indéterminée (recherche des témoins d’un processus inflammatoire ou d’une infiltration tumorale).

INDICATIONS DU MYÉLOGRAMME

L’examen cytologique de la moelle osseuse hématopoïétique (myélogramme) repose sur la morphologie des cellules, la proportion respective des différentes lignées cellulaires, la présence de cellules inflammatoires et la découverte de cellules métastatiques. Un prélèvement interprétable nécessite des frottis qui permettent d’évaluer la cellularité globale de la moelle. Un frottis de bonne qualité renferme plusieurs grains de moelle (amas cellulaires mêlant des adipocytes et des cellules hématopoïétiques).

Le myélogramme permet d’accéder aux détails cellulaires et d’identifier plus précisément les anomalies de maturation des différentes lignées cellulaires (dysplasie, atypies cytonucléaires, etc.) qu’un examen histologique. Par conséquent, le myélogramme permet d’exclure en 1re intention une aplasie médullaire (si le frottis apparaît riche en cellules) et d’accéder aux détails cytologiques des différentes lignées cellulaires.

INDICATIONS DE LA BIOPSIE OSTÉOMÉDULLAIRE

L’examen histopathologique de la moelle osseuse (biopsie ostéomédullaire) repose sur l’aspect architectural de la moelle osseuse hématopoïétique (évaluation de la répartition des différentes lignées cellulaires au sein des espaces médullaires et de la nature et de l’abondance du stroma conjonctivo-vasculaire de soutien), sur la proportion des différentes lignées cellulaires, sur la morphologie des cellules et sur la découverte de foyers inflammatoires ou de cellules métastatiques. La biopsie ostéomédullaire permet, d’une part, d’établir le diagnostic final d’aplasie médullaire (un myélogramme pauvre en cellules est suivi d’une biopsie médullaire afin d’exclure l’artéfact technique et de confirmer l’hypocellularité pathologique de la moelle), d’autre part, de statuer sur le stade évolutif de l’aplasie et de fournir des données pronostiques (fibrose médullaire irréversible, etc.). Par ailleurs, la biopsie médullaire met plus facilement en évidence les lésions focales. Cet examen présente donc une sensibilité plus élevée que le myélogramme dans les suspicions d’inflammation granulomateuse (tuberculose) et de tumeurs multinodulaires (myélome, métastases, etc.). La biopsie médullaire est contre-indiquée en cas de troubles sévères de la coagulation ou de thrombopénie.

CHOIX DE L’EXAMEN

Sauf exception, le myélogramme précède toujours la biopsie ostéomédullaire.

→ La biopsie ostéomédullaire est susceptible de compléter l’examen cytologique de la moelle osseuse hématopoïétique et de fournir des données pronostiques quand le myélogramme aboutit au diagnostic de syndrome myélodysplasique et/ou myéloprolifératif chronique, d’infiltration leucémique ou lymphomateuse (évaluations histologiques des lésions irréversibles, telles que la fibrose, pourcentage de surface médullaire infiltrée, etc.). La biopsie médullaire peut également faire l’objet de colorations complémentaires et d’immunomarquages si nécessaire.

→ La biopsie médullaire est systématiquement réalisée lorsque la qualité du myélogramme apparaît médiocre.

→ La biopsie ostéomédullaire est à privilégier d’emblée pour les suspicions d’aplasie médullaire, la recherche d’une fibrose médullaire ou l’identification des lésions focales (granulomes, envahissement tumoral métastatique, myélome, etc.).

Si l’animal se révèle difficile à manipuler et une anesthésie générale nécessaire pour effectuer une ponction, une prise de sang, etc., il est conseillé de réaliser concomitamment le myélogramme (analysé dans un 1er temps) et la biopsie médullaire (conservée dans son fixateur sans subir d’altération puis étudiée dans un 2nd temps).

Bibliographie

  • 1. Lévy, Varet, Clauvel et coll. : « hématologie et transfusion », éditions Masson, 2001
  • 2. Audouin J. et coll. : « Biopsie médullaire osseuse en pratique quotidienne », collection “Le pathologiste”, éditions Elsevier, 2004
  • 3. Bain BJ. et coll. : « Bone marrow pathology  », Blackwell Science, 3e édition, 2001.
  • 4. Jubb, Kennedy and Palmer : « Pathology of Domestic Animals  », M. Grant Maxie, vol. 3, 2007.
  • 5. Trumel C. : « EPU Cytologie », juillet 2008, ENVT.

LA BIOPSIE OSTÉOMÉDULLAIRE EN PRATIQUE

→ Prélèvement

La biopsie mesure entre 1 et 2 cm de long et comporte 5 à 6 espaces médullaires au minimum. Le prélèvement s’effectue perpendiculairement à la surface osseuse avec un trocart de type “Yamshidi”. Le cylindre osseux obtenu comprend le tissu cortical et le tissu osseux spongieux sous-jacent. En effet, les espaces médullaires sous-corticaux sont souvent physiologiquement pauvres en cellules. Ils sont donc exclus de la lecture lors de l’évaluation de la cellularité globale de la moelle osseuse hématopoïétique. En revanche, quel que soit le site choisi pour la biopsie, la cellularité et la répartition des différentes lignées cellulaires demeurent identiques. Le choix du site est donc propre au clinicien (pelvis, extrémité proximale des os longs des membres). Si le myélogramme s’effectue aisément chez un animal vigile (en particulier chez le chien) au sternum ou à la jonction chondrocostale, la biopsie ostéomédullaire requiert une anesthésie générale.

→ Interprétation

La carotte osseuse obtenue doit être préparée afin de préserver l’architecture du fût osseux (lamelles osseuses calcifiées et espaces médullaires mous) et les détails cytologiques des cellules. Seule la maîtrise de la fixation tissulaire et de la décalcification procure une lecture de qualité. Il est donc conseillé de transmettre les biopsies ostéomédullaires à un laboratoire habitué à traiter ce type de prélèvement.

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