Innovation dans l’approche des écosystèmes et de la santé

Inspirée du modèle de la Journée scientifique apicole, cette manifestation² a réuni divers acteurs régionaux (scientifiques, professionnels, gestionnaires et politiques) autour de questions d’actualité croisant santé et gestion des écosystèmes. Nombre de travaux présentés ont reçu le soutien financier de la région Pays-de-la-Loire, qui souhaite, à l’avenir, renforcer sa présence sur ces enjeux.

Maladies infectieuses véhiculées par la faune sauvage et écotoxicologie

Dans ce domaine, les préoccupations des vétérinaires concernent les questions sanitaires au sens strict, les maladies infectieuses véhiculées par la faune sauvage et l’écotoxicologie. Un travail, fruit d’un partenariat ONCFS³-Oniris-Inserm⁴, explore la diversité génétique des calicivirus du lapin sauvage, à la fois comme modèle de coévolution pathogène-hôte et pour l’étude des impacts sur la dynamique des populations d’espèces chassables. Les gestionnaires sont concernés pour la mise en place éventuelle de restrictions sur les prélèvements ou par l’aménagement des écosystèmes d’accueil. L’intérêt de l’Inserm pour cette thématique a pour origine la valeur de modèle de cet agent dans l’étude des caliciviroses humaines, en particulier à l’échelle des interactions virus-cellule hôte.

L’ONCFS (par l’intermédiaire d’une étudiante en doctorat de sciences à Oniris) a présenté les résultats d’une étude de suivi des populations de canards fuligules milouins par capture-marquage-recapture sur le lac de Grandlieu, en vue d’évaluer leur potentiel de dissémination d’agents pathogènes en période hivernale. L’étude met en évidence d’importants mouvements de canards entre des sites d’hivernage distants de plus de 10 km, soit un potentiel de diffusion important de l’influenza aviaire par cette espèce. Les travaux menés par le CVFSE sur l’abeille “sentinelle de la santé de l’environnement” montrent que l’exposition aux hydrocarbures aromatiques polycycliques⁵ est ubiquitaire, mais semble liée à la proximité de zones urbanisées et de voies à forte circulation.

Prendre en compte les chaînes trophiques et l’agencement des biotopes

À l’échelle des écosystèmes, ces questions de santé aboutissent invariablement à prendre en compte les chaînes trophiques et l’agencement des biotopes, à étudier l’écologie fonctionnelle, le comportement, l’utilisation de l’espace et l’influence du paysage. Ainsi, les questions de stabilité des écosystèmes forestiers au regard des changements climatiques ont été abordées, tout comme leur impact à long terme sur la productivité de ces écosystèmes et la conservation des espèces d’amphibiens ou de reptiles. Le rôle crucial des vasières de l’estuaire de la Loire est attesté pour la conservation des populations de soles du golfe de Gascogne (“bio”-littoral), avec des conséquences sur l’identification des zones de nourriceries à préserver ou à restaurer en bordure de Loire. De nouvelles données (fruit d’une collaboration entre l’université de Nantes-Angers-Maine, la Ligue de protection des oiseaux et Oniris) relatives au comportement d’alimentation d’espèces d’oiseaux limicoles révèlent également l’importance des délimitations fonctionnelles sur les vasières du littoral, où la productivité du microphytobenthos concerne la production ostréicole et les ressources trophiques pour les haltes migratoires des bécasseaux variables.

Des conséquences sur l’aménagement

En ce qui concerne les agro-écosystèmes des Pays-de-la-Loire, l’étude des cycles de l’azote montre l’intérêt de planter des légumineuses en rotation ou en coculture avec des céréales pour l’économie d’intrants et la limitation des pollutions agricoles, avec des bénéfices supplémentaires pour la gestion phytosanitaire et pour la résistance aux aléas climatiques (ESA-Agrocampus Ouest). Ces connaissances fondamentales ont des conséquences à court terme sur l’aménagement, les politiques agricoles locales, les régimes de protection des espaces naturels, ainsi qu’en prévision de crises sanitaires et environnementales. Associant les services de l’État, l’enseignement supérieur, la recherche, les collectivités territoriales, les associations de protection de l’environnement, le monde de la chasse et les filières de production agricoles, cette journée a vocation à être reconduite sur un rythme bisannuel, afin de conforter et de développer les interactions régionales sur ces enjeux sociétaux majeurs.

• 1 Centre vétérinaire faune sauvage et écosystèmes–plate-forme environnementale d’Oniris (http://www.oniris-nantes.fr/services/ plateforme-environnementale-veterinaire/).

• 2 Qui s’est déroulée le 22 juin dernier.

• 3 Office national de la chasse et de la faune sauvage.

• 4 Institut national de la santé et de la recherche médicale.

• 5 Composés chimiques résultant souvent d’une combustion incomplète, dont certains présentent une toxicité élevée pour l’homme et la faune (dioxines, par exemple).