Conseil en alimentation : bases et premières observations

Vendre du conseil en alimentation est difficile pour le praticien. Les marchands d’aliments, de mélangeuses, de robots de traite, mais aussi les contrôleurs laitiers et les nutritionnistes indépendants proposent ce service et représentent des concurrents directs. De plus, vendre du conseil “intellectuel” peut ne pas être considéré comme du travail par l’éleveur, et la rémunération d’un tel service n’est pas attractive pour le praticien.

Pourtant, la médecine préventive fait partie de “ l’offre santé” du vétérinaire, qui peut inclure l’alimentation aux côtés de mesures de prévention sanitaires ou thérapeutiques, lors de bilans sanitaires d’élevage, par exemple. Les conseils figurent alors dans le protocole de soins.

Olivier Fortineau propose des bases pour bien débuter le conseil en alimentation.

D’ABORD OBSERVER

Pour notre confrère, « conseiller en alimentation, c’est d’abord observer et écouter, avant de commencer à calculer. Une connaissance de base de l’alimentation des ruminants et un peu de bon sens suffisent. » Pour lui, nourrir une vache consiste en premier lieu à « faire fonctionner son rumen ». Dans cet objectif, plusieurs points sont essentiels : assurer les fermentations ruminales, permettre une bonne absorption des nutriments et veiller aux transitions.

Les fermentations ne sont possibles qu’avec un apport d’eau suffisant. Le praticien doit ainsi vérifier l’accès à l’eau et la possibilité d’un abreuvement correct.

La ration doit apporter une couverture énergétique et azotée suffisante. « Il faut environ 1 kg de tourteau de soja pour équilibrer 5 kg de matière sèche d’ensilage de maïs : ce rapport permet d’estimer rapidement si les apports en azote sont corrects ou déficitaires », explique notre confrère.

Les vaches laitières sont nourries à volonté et les génisses rationnées.

Le mode de distribution de l’aliment, en rations complètes ou en mélanges, permet d’obtenir une simultanéité de dégradation au niveau de l’énergie et de l’azote, et réduit les variations de pH ruminal. Une granulométrie suffisante limite également les risques d’acidose.

L’ajout de fibres est indispensable et tous les animaux doivent accéder facilement aux fourrages, de bonne qualité et distribués à volonté.

Enfin, les transitions seront progressives pour que l’alimentation apporte les nutriments nécessaires au développement des papilles ruminales, indispensables à l’absorption des acides gras volatils. Cela se révèle particulièrement important au moment du tarissement : « Plus la durée de pâturage est longue, plus la préparation à la ration doit être allongée : pour un tarissement de 6 semaines, le régime tarissement ne doit pas dépasser 2 à 3 semaines, et être suivi d’un régime de préparation au vêlage. »

EN PRATIQUE

L’accès à l’aliment distribué, aux fourrages et à l’eau est un point crucial à vérifier, pour les veaux comme pour les adultes. Le praticien peut, par exemple, conseiller d’ajouter un seau d’eau aux veaux dès que des concentrés sont distribués, observer le bon fonctionnement des abreuvoirs, et demander leur nettoyage s’ils sont sales. Il doit regarder si le fourrage est disponible à volonté, si les animaux y ont accès facilement, même en cas de compétition, si le râtelier est adapté, s’il ne retient pas le fourrage, etc. « Ces conseils semblent basiques, voire évidents, et pourtant ils sont importants pour l’éleveur », précise notre confrère.

ALLER PLUS LOIN

« Une fois que le praticien a observé et conseillé sur ces points de base, il peut alors approfondir son étude, en calculant les rations. » Il peut aussi référer. « Référer auprès d’un confrère n’est pas courant en médecine bovine, et pourtant, cela permet à la fois de valoriser son conseil auprès de l’éleveur et d’augmenter ses connaissances. » Notre confrère a lui-même commencé à s’intéresser à l’alimentation en référant. Il propose d’ailleurs sa propre version de la méthode des 4R¹ : « Regarder avant tout, répertorier les points à améliorer, puis soit résoudre le problème, soit référer. »

• 1 Voir Ferré D. La visite en alimentation. La méthode des 4R. Ration calculée, ration distribuée, ration ingérée, ration valorisée. Proceedings des JN GTV. Nantes. 2011:95-108.