Les bonnes pratiques de transport des prélèvements - La Semaine Vétérinaire n° 1464 du 30/09/2011
La Semaine Vétérinaire n° 1464 du 30/09/2011

Dossier

Auteur(s) : STÉPHANIE PADIOLLEAU*, PHILIPPE NICOLLET**

Le recours aux examens dans les laboratoires départementaux est courant pour tout ce qui concerne les maladies réglementées, infectieuses, parasitaires ou métaboliques, voire pour une autopsie. Afin d’obtenir des résultats fiables et pertinents, certaines contraintes sont à respecter : identification du prélèvement, conservation ou délai d’acheminement.

Objectif diagnostic : tel est le but des analyses d’échantillons biologiques effectuées par les laboratoires départementaux, à moins qu’elles ne se déroulent dans un cadre réglementaire (prophylaxie, qualification, avortements).

Le bénéficiaire final des résultats des examens est le propriétaire de l’animal. Cependant, c’est le praticien qui sert d’intermédiaire entre ce dernier et la structure réalisant les analyses. Pour en garantir la qualité, certains points doivent être respectés : volume à prélever, température de conservation, délais et conditions d’acheminement. Avant l’envoi, il convient de s’assurer de l’identification correcte des acteurs impliqués et du colis. Outre les exigences particulières liées à la biologie des échantillons, la démarche est structurée, et suit les processus de qualité et d’accréditation des laboratoires départementaux, critères qui garantissent la qualité du résultat au prescripteur et à l’éleveur.

BIEN CHOISIR L’ANALYSE POUR UN RÉSULTAT PERTINENT

Il revient au vétérinaire d’informer son client, pour qu’il sache exactement ce qui est demandé en son nom, dans quel but et à quel prix. Les laboratoires éditent la liste et les tarifs de leurs prestations, qui sont fournis aux praticiens et aux organisations sanitaires agricoles et disponibles sur demande ou sur leurs sites Internet. Dans certains départements ou régions, des examens sont pris en charge, tout ou partie, selon la politique sanitaire locale. Le vétérinaire peut en tenir compte dans le choix des analyses complémentaires proposées à son client. La nature du test demandé peut être cruciale dans le diagnostic de certaines affections, et de cela dépendront le choix du prélèvement et les conditions de conservation et d’acheminement.

Par exemple, l’agent infectieux responsable de l’ehrlichiose bovine peut être mis en évidence dans le sang jusqu’au dixième jour après infection, alors que l’examen sérologique est recommandé idéalement entre 21 et 120 jours postinfection en raison du délai de séroconversion. En cas de suspicion de paratuberculose, la recherche directe de la bactérie ne peut être pratiquée que sur fèces, par coloration, coproculture ou PCR1. Le sang total est utilisé dans le diagnostic direct (recherche de l’agent infectieux et non des anticorps induits par son passage dans l’organisme) de la besnoitiose, de la fièvre catarrhale ovine et de la diarrhée virale bovine chez les jeunes bovins. Dans le cas d’une bronchopneumonie infectieuse enzootique (BPIE), l’échantillon pour un diagnostic direct est prélevé idéalement au maximum 48 heures après l’apparition des premiers signes cliniques, pendant la phase d’hyperthermie, par écouvillonnage nasal profond, lavage trachéo-alvéolaire ou aspiration transtrachéale.

S’il subsiste un doute ou dans certains cas parti­culiers (demande spécifique, fin de semaine), il est préférable de contacter le laboratoire avant d’effectuer le prélèvement afin de connaître les meilleures conditions de conservation et d’acheminement. Pour les recherches courantes, des formulaires sont généralement disponibles, avec les recommandations d’usage.

L’IDENTIFICATION : UNE DÉMARCHE ADMINISTRATIVE QUI FACILITE LA GESTION DES ÉCHANTILLONS

Une fois le client décidé, le praticien gère la conservation du prélèvement et son envoi au laboratoire d’analyses.

Il convient de garder à l’esprit que le payeur, en général le propriétaire de l’animal, est différent du prescripteur de l’examen (vétérinaire). L’identification de l’échantillon est donc très importante pour le laboratoire. Si elle est insuffisante ou inexacte, cela retardera d’autant l’analyse ou la transmission des résultats. Certains renseignements sont obligatoires pour permettre un traitement rapide et efficace des demandes (voir encadré ci-contre).

Lorsque des données manquent ou qu’elles sont erronées, cela représente non seulement une perte de temps lors de la réception de l’échantillon, mais peut aussi compromettre les résultats. Des refus de colis au motif de non-conformité sont possibles, entraînant l’obligation de refaire l’analyse ou d’y renoncer quand le prélèvement est inadapté ou impossible à conserver. Sans compter que le vétérinaire doit alors expliquer la situation à son client…

Si un avorton ou un placenta arrive au laboratoire mal emballé (gant de fouille en vrac dans un carton, par exemple), le risque de transmission d’agents pathogènes zoonotiques n’est pas négligeable, et peut déclencher des enquêtes administratives (médecine du travail), en plus du risque pour la santé de celui ou de celle qui transporte et déballe le colis. Sont aussi refusés pour non-conformité les prélèvements dans lesquels sont restées aiguilles ou lames de bistouri, considérées comme des objets piquants ou tranchants, et qui présentent un danger pour les agents salariés du laboratoire.

ACHEMINEMENT DES PRÉLÈVEMENTS : VOLUMES, CONSERVATION, DÉLAIS D’ENVOI

La matière biologique est dégradable, d’où des impératifs en ce qui concerne la conservation et l’acheminement des prélèvements. Certains sont d’origine réglementaire (voir encadré ci-dessous), mais la plupart découlent de l’évolution des cadavres et des matériaux biologiques, ou de l’examen souhaité.

Des délais, une température et des volumes à respecter

Dans le cas d’une suspicion d’entérotoxémie à Clostridium, l’analyse bactériologique doit être effectuée au maximum 8 heures après la mort de l’animal pour prévenir la prolifération post-mortem normale des clostridies.

La conservation du sang total est de 3 à 4 jours (sous le régime du froid) sur EDTA, tandis que le sérum ou le plasma se gardent jusqu’à 10 jours, s’ils sont centrifugés et réfrigérés. Dans certains cas, il est possible d’utiliser des tubes spéciaux dans lesquels un gel se placera entre les phases cellulaire et liquidienne du sang après centrifugation, ce qui améliorera la conservation. La température ambiante, trop chaude ou trop froide (gel), peut provoquer une hémolyse et rendre le prélèvement totalement inutilisable. Les variations importantes de température jouent également.

En sérologie, le volume nécessaire dépend du nombre d’analyses à faire (de 10 à 50 µl de sérum sont nécessaires pour chacune). Il convient de prélever au minimum 1,5 ml de sang. Si l’animal est dangereux et qu’une prise de sang est jugée trop périlleuse, il est préférable de ne pas la tenter plutôt que d’obtenir un volume insuffisant ou un sang hémolysé. Dans certains laboratoires départementaux, il existe une sérothèque dans laquelle sont gardés les échantillons de sérums, qui permettent de réaliser des examens complémentaires sans avoir à systématiquement refaire un nouveau prélèvement.

Éviter la congélation, sauf cas particulier

La congélation d’un échantillon biologique est théoriquement impossible quand une mise en culture, pour laquelle l’agent infectieux doit être vivant (et donc le prélèvement frais), est nécessaire. En revanche, elle est tout à fait possible, voire recommandée, avant une PCR1 sur un organe (à température ambiante, l’évolution de l’échantillon peut altérer la conservation du matériel génétique). L’important est, d’une part, de signaler au laboratoire que l’échantillon sera acheminé congelé et, d’autre part, de ne pas enchaîner des cycles de congélation/décongélation qui risquent de dégrader l’ADN1 et l’ARN1.

Les prélèvements effectués sur écouvillons secs ne demandent pas de précaution particulière, si ce n’est un acheminement rapide. Pour certaines analyses sur écouvillon avec milieu de transport (recherche de l’agent de la métrite contagieuse équine, par exemple), le délai maximal d’acheminement au laboratoire est de 24 heures.

En parasitologie, un minimum de 50 g de fèces est à prévoir (une grosse cuillerée à soupe) à récolter dans le rectum. Pour une recherche de larves dans l’herbe, il est important de laisser dans le colis un volume d’air équivalent à celui de l’herbe (voir encadré ci-dessous).

  • 1 Polymerase chain reaction, acide désoxyribonucléique et acide ribonucléique.

IDENTIFICATION
RENSEIGNEMENTS À FOURNIR LORS D’UN ENVOI

Informations administratives

– coordonnées du propriétaire/éleveur

– numéro du cheptel ou du site

– coordonnées du vétérinaire demandeur

– date du prélèvement et de l’envoi

Renseignements sur l’animal

– espèce

– identification (numéro à 10 chiffres des bovins, tatouage ou transpondeur pour les carnivores, numéro Sire et transpondeur pour les équidés, etc.)

Nature du prélèvement

– sang, avorton, fèces, organes, écouvillon, etc.

Commémoratifs

– contexte de l’analyse

– lors d’avortement : date et stade de la gestation

– âge, type d’élevage, pour un diagnostic de diarrhée

– symptômes, vaccinations et traitements éventuels

ÉCHANTILLONS BIOLOGIQUES

Les prélèvements, quels qu’ils soient, imposent de prendre certaines précautions, pour leur conservation comme pour leur acheminement. Ces mesures découlent tant de la réglementation que de l’évolution des matériaux en question.

RÉGLEMENTATION
CONTRAINTES DE PRÉLÈVEMENT LORS DE MALADIES INFECTIEUSES

Métrite contagieuse équine : prélèvement à acheminer en 24 heures au maximum pour l’identification bactérienne (écouvillon avec milieu de transport Amiès-charbon) et en moins de 72 heures pour l’immunofluorescence (écouvillon avec milieu de transport Amiès simple).

Tuberculose : moins de 8 heures doivent s’écouler entre le prélèvement et la réception au laboratoire pour le test de dosage de l’interféron γ.

Sérologie rage : volume minimal de 1 ml de sérum exigé.

ANALYSES COURANTES
DÉLAIS D’ACHEMINEMENT ET VOLUMES RECOMMANDÉS

Moins de 24 heures, réfrigération

> Prélèvements de sécrétions respiratoires non congelées, pour diagnostic direct des bronchopneumonies infectieuses enzootiques (BPIE).

> Fèces : coproculture, coproscopie (Baermann).

> Prélèvements sanguins sur tube sec pour Elisa, dosage du pepsinogène sérique.

> Échantillons sanguins, tube avec anticoagulant pour la recherche d’hémoparasites.

> Herbe : recherche de larves L3 de strongles.

> Diagnostic de métrite contagieuse équine par culture.

De 24 à 48 heures, réfrigération

> Cultures bactériennes ou virales : lait frais, sang ou autres.

> Fèces pour Elisa ou coproscopie.

> Prélèvements sanguins pour PCR.

Échantillons congelés

> À acheminer rapidement sans décongélation, et informer le laboratoire.

Sans contraintes particulières

> Raclages cutanés.

Volumes minimaux nécessaires

> Sang/sérum : 2 ml.

> Aspiration transtrachéale/contenu stomacal : 2 ml.

> Urines : 10 ml.

> Fèces : de 5 g (paratuberculose, E. coli) à 30/50 g pour la parasitologie.

Lait : 5 ml.

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