La prescription-délivrance attaquée sur l’antibiorésistance - La Semaine Vétérinaire n° 1457 du 01/07/2011
La Semaine Vétérinaire n° 1457 du 01/07/2011

Assemblée nationale. Menaces pour les vétérinaires

Actualité

Auteur(s) : Eric Vandaële

A l’assemblée nationale, le 24 juin, députés, médecins, pharmaciens, etc., ont proposé à Bruxelles de séparer la prescription et la délivrance des antibiotiques en Europe.

Ne rien faire contre la surconsommation d’antibiotiques serait « un crime contre l’humanité ». C’est par cette formule choc que le professeur Jean Carlet, médecin consultant pour l’Organisation mondiale de la santé (OMS), a ouvert le colloque intitulé « Surconsommation d’antibiotiques : comment réguler ? ». Le titre était plutôt mal choisi. Le bon titre aurait été « Haro sur la prescription-délivrance des antibiotiques par les vétérinaires ». L’animateur, le consultant Pascal Perez, n’est pas neutre. Il milite de longue date pour la séparation de la prescription et de la délivrance auprès de députés comme le socialiste Gérard Bapt, organisateur du colloque. « Il faut appliquer le principe de la médecine humaine à la médecine animale », écrit-il en mai 2010. Car il n’est pas normal que « les vétérinaires aient besoin de vendre des antibiotiques, qui représentent un chiffre d’affaires de 200 millions d’euros. Les laboratoires vendent des antibiotiques comme ils vendent des shampoings avec, en fin d’année, les meilleures ventes récompensées par un chèque ».

Une caricature de débat démocratique

Un pseudo-débat a donc été organisé par Pascal Perez, le 24 juin dernier, pour convaincre de la nécessité absolue de cette dissociation chez les vétérinaires, dans la lutte commune avec les médecins contre l’antibiorésistance. Cette réunion aurait pu être sans importance, si elle ne s’était déroulée à l’Assemblée nationale, sur l’invitation de deux députés médecins, Gérard Bapt et Guy Lefrand (UMP), devant deux cents personnes : médecins, pharmaciens, chercheurs et microbiologistes de renom, représentants des agences sanitaires (Anses et Afssaps), administrations comme la Direction générale de l’alimentation, et surtout… le commissaire européen à la santé et à la consommation, John Dalli. Ainsi, ce dernier a écouté, à quatre reprises, les demandes répétées en faveur de cette dissociation, celles de Gérard Bapt, de pharmaciens, d’une association de victimes des infections nosocomiales, de médecins… Et la voix des vétérinaires, celle des éleveurs ? Il ne les aura pas entendues, car il a dû quitter la réunion avant la fin.

En outre, l’animateur n’a laissé que peu de temps aux vétérinaires et aux éleveurs pour exprimer un point de vue différent du sien, en fin de colloque. Le président du Conseil supérieur de l’Ordre, qui tentait de répondre à la question du conflit d’intérêt, a même été hué par une partie de la salle. Avec Jacqueline Bastien, vice-présidente de la Société nationale des groupements techniques vétérinaires (SNGTV), ils étaient d’ailleurs bien seuls pour représenter la profession. Le Syndicat national des vétérinaires d’exercice libéral (SNVEL) n’est pas venu défendre les confrères à l’Assemblée nationale. Heureusement, les deux seuls éleveurs présents ont pris le parti des vétérinaires. Ils ont confirmé leur attachement à leur praticien, en qui ils ont confiance. Et ils n’ont pas du tout exprimé le besoin d’introduire un nouvel acteur, comme le pharmacien, davantage « intéressé » par la vente de médicaments que les vétérinaires, mais surtout « incompétent sur la médecine vétérinaire ».

« Il n’y a pas de remède miracle ni de solution simpliste »

Heureusement, les autorités françaises ne sont pas dupes de l’opération de lobbying qui se cache derrière le débat grave sur l’antibiorésistance. « Il n’y a pas de remède miracle ni de solution simpliste », a conclu Pascale Briand, directrice générale de l’alimentation (DGAL). Elle a signalé la publication en septembre du “Plan national de lutte contre l’antibiorésistance chez l’animal” que son ministre avait initialement annoncé pour mai. « Un plan qui rassemble les acteurs » au lieu de les diviser. Il comprendra des « actions concrètes et ciblées par filière, avec des indicateurs d’impact, pour accompagner les utilisateurs vers une réduction de l’usage des antibiotiques ».

  • (1) N° 2011-731, paru au Journal officiel n° 147 du 26/6/2011.

Plan européen contre l’antibiorésistance chez l’animal

Dans le cadre de la révision, prévue pour 2012, de la réglementation européenne sur le médicament vétérinaire, Bruxelles prépare un plan de lutte contre l’antibiorésistance. Les Etats membres devraient ainsi :

– surveiller et collecter les données sur les consommations d’antibiotiques et l’émergence des résistances ;

– interdire les incitations à prescrire des antibiotiques ;

– interdire l’usage vétérinaire des antibiotiques critiques pour la médecine humaine ;

– contrôler les élevages ;

– élaborer et promouvoir des bonnes pratiques.

Selon le commissaire européen John Dalli, « il existe un petit groupe d’acteurs irresponsables ». Les Etats membres qui se sont engagés dans la lutte contre ces “moutons noirs” obtiennent de bons résultats, souligne-t-il. A trois reprises, il a promis d’étudier attentivement, dans le cadre de ce plan, la séparation ou non de la prescription et de la délivrance, mais sans prendre d’engagement dans un sens ou dans l’autre.

Le plan européen devrait également inciter à la recherche de nouveaux antibiotiques, d’outils de diagnostic, etc.

E. V.

Hygiène alimentaire

• Formation obligatoire. Un décret(1) relatif à l’obligation de formation en hygiène alimentaire de certains établissements de restauration commerciale, daté du 24 juin, vient de paraître au Journal officiel. Les établissements qui relèvent des secteurs de la restauration traditionnelle, des cafétérias et autres libres-services, ainsi que la restauration de type rapide, sont ainsi tenus de compter dans leur personnel au moins une personne pouvant justifier d’une formation en matière d’hygiène alimentaire adaptée à leur activité. Cette formation peut être délivrée par tout organisme déclaré auprès du préfet de région, conformément à l’article L.6351-1 du Code du travail.

Réunion de promo

• A 81 : trente ans ! La promotion Alfort 1981 se réunira le jeudi 10 novembre 2011 pour célébrer ses trente ans de sortie lors d’une soirée à Paris. Une date à noter d’ores et déjà dans vos agendas. Pour ceux qui ont l’intention d’y participer, envoyez un mail à christian.iehl@alfort81.com. Le comité d’organisation, composé de Richard Corde, Dominique Héripret, Christian Iehl, Thierry Poignon, Françoise Rivière-Mési et Jean-Pierre Samaille, vous attend nombreux pour cet événement.

CRO de Normandie

• Elections. Le premier tour des élections du conseil régional de l’Ordre de Normandie s’est déroulé le 16 juin dernier, à la suite de l’annulation du scrutin d’avril 2011. Aucun candidat n’a été élu et les six postes restent à pourvoir. En effet, le seuil du quart des électeurs inscrits (soit 257 voix) n’a été atteint par aucun candidat, en raison de la trop faible participation (313 bulletins valides pour 1 026 électeurs inscrits). Le second tour de ces élections ordinales aura lieu le 28 juillet prochain. L’Ordre invite les vétérinaires électeurs à voter.

Sélection de petites phrases entendues lors des débats

• Gérard Bapt, médecin, député socialiste à l’initiative du colloque : « Les vétérinaires sont dans une situation permanente de conflit d’intérêt entre la prescription et la vente. Ce cumul devrait être interdit. Cela serait plus simple. »

• Antoine Andremont, professeur à l’hôpital Bichat : « L’hygiène ne suffit plus à combattre l’antibiorésistance à l’hôpital. Car une partie des gènes de résistance ont pour origine des germes de la chaîne alimentaire [avec des sélections de résistances chez l’animal]. »

• Jacky Maillet, représentant des pharmaciens à ce colloque : « Face à l’antibiorésistance chez l’animal, le pharmacien fait partie de la solution. » Il détourne ainsi le leitmotiv des représentants syndicaux vétérinaires : « Le vétérinaire ne fait pas partie du problème. Il fait partie de la solution. » Mais les praticiens n’étaient pas défendus par leur syndicat, absent de ce colloque.

• Un pharmacien : « Le prescripteur tire ses revenus à 98 % de la vente des médicaments. Il ne peut y avoir de baisse des consommations d’antibiotiques sans supprimer ce conflit d’intérêt. »

• Claude Rambaud, présidente du Lien, une association de victimes d’infections nosocomiales : « Oui, il faut réguler. Il ne faut plus réfléchir. Il faut agir en urgence, [en particulier] contre l’antibioprévention dans les élevages et l’usage des antibiotiques comme facteurs de croissance. La France consomme trop d’antibiotiques, aussi bien en médecine humaine (trois fois plus que les Scandinaves) que chez les animaux (1 000 tonnes utilisées, dix fois plus que les pays scandinaves). »

• John Dalli, commissaire européen : « L’antibiorésistance est à l’origine de 25 000 décès par an en Europe. »

• Benoît Schlemmer, médecin, responsable du plan humain “Les antibiotiques, c’est pas automatique” : « Depuis 2005, les consommations d’antibiotiques en médecine humaine sont sur la mauvaise pente. Elles remontent après avoir baissé de 16 % en dix ans. »

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