L’acclimatation embryonnaire des volailles à la chaleur et au froid semble prometteuse

Les volailles sélectionnées selon leur vitesse de croissance sont sensibles à la chaleur, en particulier en période de finition. En effet, le développement de la masse musculaire est favorisé aux dépens des systèmes cardiovasculaires et respiratoires impliqués dans la thermorégulation.

Dans le cadre du projet Thermochick⁽¹⁾, mené avec le soutien de l’Agence nationale de la recherche, Anne Collin, de l’Institut national de la recherche agronomique, a présenté des résultats d’études réalisées en vue d’améliorer la thermotolérance du poulet, lors des 9^e Journées de la recherche avicole.

La réponse à l’acclimatation au chaud et au froid varie selon le type génétique

L’acclimatation s’effectue en alternant des conditions habituelles d’incubation (37,8 °C et 56 % d’humidité relative) et des hausses de température et d’hygrométrie (39,5 °C et 65 % d’humidité relative afin d’éviter la déshydratation des œufs). La période qui s’étend des jours 7 à 16 de l’embryogenèse, moment où se mettent en place les axes de régulation thyroïdien et corticotrope, semble optimale pour améliorer la tolérance à la chaleur (^{voir figure}). L’hormone triiodothyronine (T3) est en effet impliquée dans la thermorégulation et la corticostérone l’est dans la réponse des animaux au stress. Plusieurs durées d’exposition à la chaleur (12 et 24 heures par jour) ont été testées au cours de cette période de l’embryogenèse. Lorsque l’exposition est continue (24 heures), l’éclosabilité diminue de moitié et le poids des mâles à 35 jours d’âge est plus faible.

En revanche, l’éclosabilité est maintenue avec une exposition de 12 heures par jour à 39,5 °C. La température interne à la naissance des poussins acclimatés est inférieure à celle des témoins. En outre, à 35 jours d’âge, l’élévation de leur température interne est limitée en situation de coup de chaleur. En plus de l’acquisition de la thermotolérance, l’indice de consommation, la vitesse de croissance et le poids vif des poulets de chair standard sont maintenus. Le pourcentage de gras abdominal est diminué sans conséquence sur la qualité de la viande.

En revanche, chez les races de poulets lourds, l’éclosabilité est plus faible et la mortalité plus importante en élevage. Il importe donc d’adapter cette technique au type génétique.

Par ailleurs, comme la baisse de température provoque l’apparition d’ascites chez les poulets, des tentatives d’acclimatation des embryons au froid ont également été mises en œuvre. L’exposition continue des œufs à des températures basses a diminué l’éclosabilité et provoqué des malformations chez les poussins. Plus récemment, des embryons ont été acclimatés au froid, à 15 °C, par brèves expositions répétées aux jours 18 et 19 de l’embryogenèse. Il en résulte une amélioration du gain de poids en élevage sans affecter l’éclosabilité et une limitation du risque d’ascites de 70 % à 44 % lors d’exposition au froid de 14 à 35 jours d’âge.

Des facteurs épigénétiques feraient partie des mécanismes de thermotolérance

Les mécanismes en jeu seraient la modification du rythme cardiaque pendant et entre les périodes d’acclimatation, une augmentation de la thermolyse (pertes de chaleur) et une diminution de la thermogenèse (production de chaleur) lors d’une acclimatation à la chaleur (c’est l’inverse lors d’une acclimatation au froid). Des recherches sont en cours afin de déterminer les gènes et les enzymes impliqués dans ces réponses.

Par ailleurs, l’hypothèse de facteurs épigénétiques, c’est-à-dire des changements transmissibles de l’expression de gènes impliqués dans la thermorégulation (sans altération de la séquence nucléotidique de l’ADN), est à l’étude. Selon Anne Collin, l’acclimatation durant l’embryogenèse « induirait une modification des seuils de réponse aux changements de température ambiante pendant les phases durant lesquelles le système thermorégulateur neuro-endocrinien est plastique (il peut encore s’adapter) qui contribuerait à la modification, à long terme, des seuils de réponse de l’animal aux changements environnementaux ». La transmission aux descendants reste à étudier.

Ainsi, l’embryogenèse est considérée comme un bon modèle pour étudier les mécanismes qui interviennent dans la thermorégulation chez l’oiseau.

• (1) Projet ANR Thermochick : n° ANR-09-JCJC-0015-01.