Le CSO tend aussi vers une liberté accrue de communication - La Semaine Vétérinaire n° 1449 du 06/05/2011
La Semaine Vétérinaire n° 1449 du 06/05/2011

Interview. Questions à Michel Baussier, président du Conseil supérieur de l’Ordre

Actualité

Auteur(s) : Marine Neveux

Le président de l’Ordre répond à nos questions d’actualité afin d’éclairer les confrères sur la position de l’instance ordinale et les enjeux à venir.

La Semaine Vétérinaire : A la suite de la parution de l’ordonnance sur l’acte vétérinaire, en janvier dernier, plusieurs professionnels(1) attaquent la profession vétérinaire, arguant d’une situation de monopole. La dentisterie équine, la reproduction et l’ostéopathie font actuellement l’objet d’aspirations de la part de non-vétérinaires qui souhaitent être reconnus pour exercer ces activités. Quelle est votre analyse ?

Michel Baussier : D’abord, il ne s’agit pas de professionnels puisqu’il ne s’agit pas de professions, mais d’activités exercées jusqu’à maintenant en toute illégalité, par des personnes aux compétences et aux statuts divers et variés. Ces dernières recherchent depuis plusieurs années une reconnaissance, sans pour autant l’avoir officiellement demandée, incapables qu’elles étaient d’offrir une représentation commune. En déposant un recours contre l’ordonnance législative du 20 janvier 2011, elles ont fait le choix de prendre en otage les organisations professionnelles agricoles et vétérinaires qui avaient réalisé un accord, lequel a abouti à ladite ordonnance, pour faire entendre leur voix auprès de la représentation nationale et du gouvernement. A la demande de ce dernier, nous avons accepté, dans un délai bref, en coordination avec les organisations professionnelles vétérinaires concernées, notamment le Syndicat national des vétérinaires d’exercice libéral (SNVEL), de considérer le cas de ceux qui, dépourvus de tout titre de vétérinaire, se dénomment eux-mêmes dentistes équins, ainsi que de ceux qui pratiquent l’ostéopathie sur les animaux. Cela en contrepartie du retrait, sans autre condition, de leur recours contre l’ordonnance.

Il s’agit d’examiner dans quelles conditions de formation sérieuse et de diplôme reconnu par l’Etat certaines de ces innombrables personnes pourraient, demain, exercer légalement leur activité à côté des vétérinaires, voire sous leur autorité, dans le cadre d’un référentiel d’actes bien codifié. C’est le début d’un processus qui demandera forcément du temps. Il ne s’agit pas de créer de novo une population d’acteurs exerçant au détriment des confrères. Au contraire, cela aura plutôt pour effet de réduire la population existante, pour le bénéfice des meilleurs d’entre eux, des vétérinaires et, surtout, des propriétaires d’animaux.

S. V. : Une pétition de confrères, adressée à l’Ordre, s’oppose notamment à la déclassification des actes d’ostéopathie, qui cesseraient d’être considérés comme médicaux, ouvrant la porte à des “manipulateurs”. Les signataires estiment aussi que ces actes ne peuvent pas non plus être effectués par un tiers placé sous la responsabilité ou l’autorité d’un vétérinaire, en raison de la nature du risque encouru. Selon eux, cela pourrait en outre ouvrir la voie pour d’autres disciplines comme la phytothérapie, l’acupuncture, la dentisterie, la nutrition thérapeutique, le comportement, la physiothérapie, etc. Quelle est votre position ?

M. B. : Cette pétition issue d’une association ou d’un collectif de vétérinaires est une initiative malheureuse, qui émane de confrères insuffisamment informés. Elle contribue évidemment à la désinformation et à l’inquiétude générale, en même temps qu’elle traduit un manque de confiance dans les élus, signe universel des temps… La profession ne fera pas l’économie du débat sur certaines disciplines dites médicales. Pour autant, l’Ordre a adopté depuis longtemps l’attitude – qu’il ne remet pas en cause aujourd’hui – de considérer comme des actes de médecine et de chirurgie des animaux ceux qui correspondent précisément à la définition du nouvel article L.243-1 du Code rural et de la pêche maritime. Il ne s’agit donc pas de “démédicaliser” l’ostéopathie animale, comme certains ont pu l’écrire de façon inconséquente. Il s’agit bien d’actes vétérinaires.

S. V. : Le Conseil national vétérinaire pour la formation complémentaire et continue (CNVFCC) fait l’objet de controverses : certains confrères y voient un organisme en position de monopole. Ils s’inquiètent aussi des contraintes imposées par les accréditations, alors qu’en parallèle des organismes privés étrangers lancent de vastes projets qui changent la donne nationale de la formation vétérinaire. Y voyez-vous une concurrence pertinente ou le risque d’une surenchère économique dans le domaine de la formation continue ?

M. B. : La controverse appartient plus au passé qu’au présent ! Les monopoles de formation ne sont guère compatibles avec l’esprit de la directive “services”. Les organisations professionnelles vétérinaires techniques avaient un monopole de fait quand elles étaient les premières et les seules, en pionnières, à organiser la formation vétérinaire continue et complémentaire, souvent dans le cadre d’un large bénévolat !

Aujourd’hui, les exigences de qualité ont renchéri le coût de ces enseignements pour les praticiens. Les organisations vétérinaires y ont trouvé une source de financement de leur activité à côté des cotisations. Certains fournisseurs de la profession (industriels du médicament et du pet food) apportent leur contribution, évidemment non désintéressée.

Dans le même temps, des sociétés commerciales s’invitent sur le marché. Cela incite le CNVFCC à se poser la question des conflits d’intérêt susceptibles d’exister en son sein. Cela m’amène également, en qualité de président du CNVFCC mais aussi et d’abord de l’Ordre, à dire publiquement à ces sociétés commerciales que nous ne tolérerons pas longtemps qu’elles continuent à user de procédés déloyaux (allégations mensongères, titres et certificats aussi fantaisistes que pompeux qui ne donneront jamais lieu à la moindre reconnaissance ordinale) pour attirer le chaland dans leur échoppe. Cela me conduit surtout à dire aux confrères qu’ils doivent “faire leur marché” en consommateurs intelligents et responsables, en toute conscience d’appartenir à un corps professionnel, en sachant considérer que leur intérêt particulier passe toujours avantageusement par l’intérêt général de la profession.

La formation continue vétérinaire française est obligatoire : la loi l’impose par l’intermédiaire du décret en Conseil d’Etat qu’est le Code de déontologie. Je supporte mal que l’on persiste à dire ou écrire des choses différentes !

Dans le cas du mandat sanitaire exercé dans les filières de production (au sens en vigueur du terme) et qui concerne un quart des vétérinaires inscrits au tableau de l’Ordre, l’acquisition de points de formation est même une condition de maintien de ce mandat. Pour autant, la détermination des crédits de formation que supervise le CNVFCC n’est qu’un outil d’auto-contrôle pour chaque vétérinaire, qu’il pourra avantageusement utiliser pour prouver, dans des conditions objectives, qu’il continue à se former, si sa formation continue était mise en cause.

S. V. : La Société centrale canine (SCC) se désengage actuellement du protocole de qualité mis en place par l’Ordre sur les maladies héréditaires oculaires canines. Envisagez-vous aussi de revoir le protocole ou au contraire d’étendre ce système à d’autres maladies héréditaires (locomotion, etc.) ? N’est-ce pas un désaveu sur la politique de sélection des chiens de race en France ?

M. B. : L’Ordre a facilité, à un moment donné, la mise en place d’un tel dispositif pour les maladies oculaires, dont tout le monde s’accordait à dire qu’il était une réussite. Pour autant, il n’a pas vocation à se mêler de l’amélioration des races canines. S’il a favorisé, en son temps, la relation entre les uns et les autres et a pu contribuer, y compris au plan matériel, à la mise sur pied d’un système de dépistage, il laissera aux intéressés la responsabilité de poursuivre le travail initié, voire de l’étendre à d’autres maladies héréditaires canines invalidantes. Par ailleurs, rien ne pourra se faire dans ce domaine à l’écart du contexte international.

La SCC a pris, en matière de certification vétérinaire, des initiatives incomprises des confrères, que je trouve personnellement déplacées parce qu’unilatérales et, de ce fait, inadaptées au climat de confiance et de collaboration qui s’était établi avec la profession. Je l’ai écrit au président Arthus. Je n’imagine pas qu’il puisse persévérer dans une voie qui lui apparaîtra rapidement comme régressive et dangereuse. Les pratiques de certification vétérinaire ne peuvent se concevoir ou se modifier en dehors des premiers acteurs que sont les confrères. En tout état de cause, les vétérinaires doivent avoir conscience que, dans un tel domaine de certification spécifique, ils sont tenus, après avoir pris connaissance du cahier des charges de la certification demandée, d’appliquer les règles de bonne pratique professionnelle, ce qui suppose d’avoir acquis l’information scientifique nécessaire et d’entretenir ses connaissances par la formation continue, voire par un enseignement complémentaire.

S. V. : La formation initiale des vétérinaires est de nouveau en discussion. Quand prendrons-nous le temps d’une réforme juste et pertinente Combien coûte la refonte à chaque fois ?

M. B. : Je vous propose de poser cette question au ministre. Nous pouvons aussi y réfléchir, tout en se donnant le temps de décider d’une refonte, à l’écart des initiatives personnelles et brouillonnes d’électrons libres de la profession. Le comité du cursus dit “à haut niveau” rendra ses conclusions au début de l’été. Le sénateur Beaumont vient, par ailleurs, de rendre son rapport au président du Sénat. Attendons tranquillement…

S. V. : La radioprotection est encore sous le coup de projets de renforcement pour la profession vétérinaire, notamment pour les praticiens équins. Ils seraient reconnus à un niveau de risque supérieur à celui de dentistes, malgré des résultats d’exposition faible démontrés par des études sur le terrain. La situation vous paraît-elle critique Et pourquoi une telle remise en cause, alors que le travail de la commission avait largement convaincu l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), par exemple ?

M. B. : Cette attention étonnamment et subitement redirigée vers la profession nous a amenés à réunir de nouveau la commission de radioprotection vétérinaire. Nous travaillons ensemble sur ce dossier, toutes organisations professionnelles vétérinaires concernées, comme presque toujours. Pour notre part, nous disons clairement : cela suffit ! Les générateurs des vétérinaires ne doivent pas devenir, pour des fonctionnaires zélés et en mal d’objectifs, l’ombre qui cache la forêt de Fukushima.

S. V. : L’Ordre met en place l’observatoire vétérinaire : quelle est sa forme juridique, son objet, son mode de fonctionnement ? Quels sont les travaux urgents et pourquoi maintenant ?

M. B. : L’Ordre n’a que trop tardé à mettre en place cet observatoire démographique. La tenue de statistiques professionnelles, leur analyse, leur exploitation sont des missions qui incombent fondamentalement aux Ordres professionnels. Les Etats généraux du sanitaire ont pointé la nécessité d’un tel observatoire. Nous souscrivons à cette vue et répondons présents, en accord avec la Direction générale de l’enseignement et de la recherche (DGER) et la Direction générale de l’alimentation (DGAL).

L’observatoire de la démographie professionnelle dépendra de l’Ordre, dont il sera un outil au service de toute la profession, bien au-delà du périmètre ordinal. Je m’y suis engagé. Sa mise en place est en cours. Il produira ses premiers résultats dès 2012.

S. V. : Le nouveau Code de déontologie est prévu pour le mois de juin. Les conseils ordinaux d’Ile-de-France et de Normandie tendent déjà vers une plus grande liberté de communication (annonce dans la presse, réseaux sociaux, diffusion des tarifs, etc.). Le Conseil supérieur de l’Ordre appuie-t-il ces orientations ?

M. B. : Ce qui est prévu en juin prochain, c’est que le Conseil supérieur de l’Ordre transmette ses propositions au ministère ! Le reste ne dépend pas de nous. Les conseils ordinaux de Normandie et d’Ile-de-France tendent vers la même liberté accrue de communication que tous les autres, sans omettre le Conseil supérieur ! Pour autant, le Code de déontologie est applicable de la même manière partout en France.

La règle que nous avons choisie est simple : nous appliquons le code en vigueur, la France ayant officiellement considéré que la directive “services” était d’ores et déjà transposée. Il va de soi que nous avons le souci de proposer des modifications pleinement compatibles avec la fameuse directive. Que chacun soit rassuré !

Force ouvrière contre la RGPP

• Services publics. « Les abattoirs ne sont plus obligés de passer par les services vétérinaires, ce qui entraîne une absence d’inspection sanitaire », a dénoncé Jean-Claude Mailly, secrétaire général du syndicat Force ouvrière, lors d’une conférence de presse le 3 mai dernier. C’est l’un des exemples que le leader syndical met en avant pour demander l’arrêt de la révision générale des politiques publiques (RGPP). « Je veux mettre l’accent sur les conséquences de la RGPP sur les citoyens et sur les atteintes au service public. J’accuse les pouvoirs publics de brader les services publics au mépris des droits, voire de la vie des citoyens », a lancé Jean-Claude Mailly. Il affirme que les suicides de fonctionnaires ont augmenté de 5 à 6 %, avec de plus en plus de passages à l’acte commis sur les lieux de travail. La RGPP « se traduit aussi par des morts ».

Clenbutérol

• Condamnation. Deux pharmaciens du Nord ont été condamnés par le tribunal correctionnel de Lille pour avoir délivré sans ordonnance, entre 2007 et 2009, du Ventipulmin® à un adepte d’haltérophilie. Le titulaire de l’officine a écopé de 3 500 € d’amende. Fait plutôt rare, la salariée a été plus sévèrement condamnée que son employeur : six mois de prison avec sursis et 4 000 € d’amende. Le sportif s’en tire avec trois mois de sursis.

Influenza aviaire

• Persistance du virus H5N1 HP. Selon un récent rapport de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO)(2), l’élimination chez les volailles du virus de l’influenza aviaire de sous type H5N1 hautement pathogène dans les six pays où il demeure endémique (Bangladesh, Chine, Egypte, Inde, Indonésie, Vietnam) prendra au moins dix ans. La persistance du virus dans ces pays résulte de trois facteurs, expliquent les rapporteurs : « Des chaînes de production et de commercialisation complexes, un manque de capacité des services vétérinaires et de production animale publics et privés qui ne sont pas toujours capables de déceler les infections et d’y répondre, et la faiblesse de l’engagement de ces pays à contrer fermement le virus. » Le rapport formule des recommandations spécifiques pour chaque Etat pour les cinq prochaines années.

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