Alcyon, Centravet et Coveto hors de la centrale du SNVEL - La Semaine Vétérinaire n° 1448 du 29/04/2011
La Semaine Vétérinaire n° 1448 du 29/04/2011

Remises arrière. Face au risque juridique d’entente illicite

Actualité

Auteur(s) : Eric Vandaële

Avec sa mégacentrale de référencement, le syndicat des libéraux ambitionne de « fédérer 15 % du marché », soit environ 170 millions d’euros d’achats.

Les trois centrales d’achats à capitaux vétérinaires, Alcyon, Centravet et Coveto, ont décidé de ne pas s’associer au Syndicat national des vétérinaires d’exercice libéral (SNVEL) qui souhaite constituer une mégacentrale de référencement pour négocier les remises arrière de ses membres, soit au moins « 15 % du marché ». Réunies dans l’Association nationale des sociétés vétérinaires d’achats et de distribution de médicaments (Ansvadm), « aucune des centrales la constituant ne souhaite être structurellement et capitalistiquement associée au projet, notamment pour des raisons juridiques », indique le communiqué. En effet, en collaborant à une société commune de ce type, les centrales risquaient d’être accusées d’une entente illicite, alors qu’elles sont concurrentes sur le terrain.

Toutefois, l’Ansvadm se dit « prête à aider le projet, notamment par la fourniture de données statistiques, avec l’accord explicite des vétérinaires adhérents à la démarche du SNVEL ». Sur demande explicite des vétérinaires, ces centrales pourraient donc, à l’avenir, communiquer au syndicat ou à sa filiale les statistiques de vente des différents produits. Toutefois, « les modalités restent à définir et à construire ». Cette position commune à l’Ansvadm et aux trois centrales à capitaux vétérinaires a été adoptée après « l’étude du projet de centrale de référencement qu’entend mener le SNVEL et la consultation des conseils d’administration ou de surveillance » d’Alcyon, de Centravet et de Coveto (tous composés de vétérinaires praticiens).

« Une communication erronée » à l’assemblée des délégués du syndicat

Lors de l’assemblée des délégués syndicaux, qui a eu lieu le 17 mars dernier, le SNVEL avait pourtant annoncé l’accord de ces trois centrales pour participer au projet. Il précisait alors qu’il « piloterait » sa centrale de référencement « en étant légèrement majoritaire dans la nouvelle structure créée avec Alcyon, Centravet et Coveto ». L’initiative avait alors recueilli un « feu vert massif » des soixante-six délégués, avec soixante voix pour (91 %), trois votes contre (4,5 %) et trois abstentions (4,5 %).

Pour le président de l’Ansvadm, notre confrère Bertrand Pruvost (Alcyon), cette communication était à la fois « erronée » et « trop rapide ». Car Centravet et Coveto avaient déjà « clairement » indiqué au SNVEL qu’elles « réservaient leurs réponses » en fonction de la position de leurs conseils d’administration et de surveillance. « Il n’y avait aucune ambiguïté sur ce point », indique-t-il dans une interview publiée dans l’hebdomadaire du syndicat(1).

Bertrand Pruvost « craint » que cette initiative du SNVEL « n’apporte pas une réponse de long terme au problème du prix du médicament », même s’il la qualifie de « pertinente et ambitieuse ». « Quel est le vrai prix d’un médicament obtenu avec une remise de 70 %, voire 100 % ? Un fabricant peut-il avoir une vraie stratégie commerciale sans remises ou avantages divers ? », s’interroge-t-il.

Interpellé publiquement par Jean-Louis Hunault, président du Syndicat de l’industrie du médicament vétérinaire(2), Michel Baussier, président de l’Ordre, répond que la question de cette centrale de référencement sera examinée par le Conseil supérieur le 23 juin prochain (voir courrier ci-dessous). Son avis sera donné « en toute indépendance, après avoir entendu les parties concernées et pris le temps nécessaire à la sagesse de sa délibération, temps adapté à l’urgence, toute relative, de la situation ».

L’opposition des industriels au SNVEL est « pathétique et dérisoire »

De son côté, le SNVEL, qui jusqu’à présent se disait « résigné » à créer cette mégacentrale, est désormais « déterminé à mener ce projet à son terme »(1). Son nouveau président, Pierre Buisson, veut être « prêt pour novembre 2011 », afin de négocier les remises des contrats annuels 2012. Il « perçoit une forme de désintérêt des confrères pour le médicament en raison de l’agitation déraisonnée du marché », ce qui motive le SNVEL à les intéresser davantage.

Face à toutes les objections hostiles que suscite le projet, le syndicat des libéraux s’entête, en indiquant que « ces réactions d’opposition le confortent ». La contestation des laboratoires pharmaceutiques est qualifiée de « pathétique et dérisoire », et tous les articles non contrôlés par le syndicat de « dénigrement ».

Le syndicat est « juridiquement légitime » à faire du commerce

« Nous sommes certains de la légitimité juridique d’un syndicat à participer à des sociétés commerciales. La centrale de référencement aura pour support une société par actions simplifiée (SAS) dont l’actionnaire unique sera le SNVEL », précise Pierre Buisson, soit le même statut commercial que la Société d’identification électronique vétérinaire (Siev) ou la Société d’actions et de promotion vétérinaires (SAPV). Avec cette nouvelle centrale, « notre objectif est de fédérer 15 % du marché », soit le regroupement de 160 à 185 millions d’achats potentiels, selon les dernières statistiques publiées en 2010.

Le regroupement artificiel de chiffres d’affaires : un risque pour la délivrance…

Le président du SNVEL estime que « laisser prospérer les actuels regroupements artificiels de chiffres d’affaires (groupement d’intérêt économique, société civile de moyens) est prendre le risque d’une remise en cause de la place des vétérinaires dans la délivrance du médicament ». Mais laisser entendre que ce risque serait accentué par la mise en place d’une mégacentrale syndicale relève d’un « dénigrement obsessionnel du SNVEL » auquel se livrerait La Semaine Vétérinaire

  • (1) Voir La Dépêche Vétérinaire n° 1121-1122 du 22/4/2011.

  • (2) Voir La Semaine Vétérinaire n° 1446-1447 des 15 et 22/4/2011 en page 20.

  • (3) Voir La Semaine Vétérinaire n° 1446-1447 des 15 et 22/4/2011 en pages 18 et 20.

En réaction…

A la suite de la publication des articles(3) sur la mégacentrale de référencement du SNVEL, nous avons reçu plusieurs messages, qui, pour la plupart, partagent l’analyse et l’opinion développées dans nos colonnes, mais sans apporter d’éléments nouveaux au débat. A l’inverse, deux courriels de délégués syndicaux approuvent le projet et l’action du SNVEL et contestent donc la validité de nos analyses. Nous les publions volontiers. Enfin, un jeune praticien rural souligne le danger qu’il y aurait à prôner une division des “petits” contre les “gros” cabinets ou cliniques vétérinaires.

• La rédaction

« Le rôle du syndicat : réunir et protéger les plus petits »

Bien évidemment, les grands perdants [du projet syndical] seront les pharmaciens affairistes et les groupements d’intérêts économiques (GIE), qui verront leurs remises arrière fondre au profit des petits cabinets et cliniques.

Pas étonnant que certaines catégories de vétérinaires s’offusquent et argumentent contre cette initiative. Le syndicat est dans son rôle, ici, celui de réunir et de protéger les plus petits. C’est vital pour eux.

« Attention au risque de diviser les vétérinaires libéraux »

Je n’espère pas que ce projet vise à « protéger les plus petits contre les gros vétérinaires, éventuellement en groupement d’intérêt économique (GIE) ».

J’exerce dans une clinique rurale où nous sommes cinq (trois associés et deux collaborateurs). Dans quelle catégorie sommes-nous ? Petits, moyens, gros ?

J’estime avoir de bons rapports avec mes deux voisins qui sont vétérinaires en solo, et je ne pense pas les agresser. Je me doute que j’ai de meilleures conditions d’achat qu’eux, qui m’aident à lutter contre la concurrence des groupements ou des affairistes sur le médicament. Mais jamais à ce jour un client n’est venu nous voir pour demander à changer de vétérinaire à cause de cette question de tarif des médicaments. Attention donc au poids des mots, et au risque de voir ce projet diviser les vétérinaires libéraux. Nous sommes tous aujourd’hui exaspérés par ces contrats à tiroirs, qui rendent le marché illisible et laissent toujours, à la fin, l’impression qu’on aurait pu avoir plus… Le pavé dans la mare est utile, mais nous devons avant tout trouver une solution collective.

« Tous les vétérinaires devraient acheter les médicaments au même prix »

Eric Vandaële nous avait habitués à plus d’objectivité. Aurait-il subi la pression de ses annonceurs, que l’on sait farouchement opposés à la mise en place de cette centrale ? Quid de la valeur de représentativité du sondage des “vétonautes” joint à l’article ? Ce qui ne l’empêche pas d’être particulièrement critique sur celui proposé par le syndicat. Mais surtout, aucune présentation du projet et de ses objectifs. Alors, j’apporte ma vision des choses, en simple syndiqué soucieux de la survie de notre profession. Il ne s’agit pas de basse cupidité ou de mercantilisme. Le but est une régulation du marché d’approvisionnement afin que tous les vétérinaires aient accès aux médicaments sensiblement au même prix. Tout simplement pour “rester dans la course” par rapport aux autres ayants droit, dont ceux dont les volumes d’achat sont conséquents.

Les différences de remises arrière sont telles qu’elles impactent sensiblement le prix de vente final. Preuves à l’appui : nous sommes entrés depuis un an dans un groupement d’intérêt économique. Nous avons vu des remises arrière passer du simple au triple sur le même médicament. Certaines atteignent 60 %!

A part dans le monde des bisounours, nous ne pouvons pas “tenir” un marché sur notre seule technicité (pourtant incontestée), avec des écarts de prix sur le médicament supérieurs à quelques points.

Le jour où les laboratoires auront des politiques commerciales plus éthiques, il ne sera plus nécessaire de chercher des systèmes de compensation.

Philippe Archambaud (N 84), praticien mixte à Montaigu et délégué syndical de Vendée

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