Des symptômes bénins chez le chien et le chat signent parfois une grave affection chez les NAC - La Semaine Vétérinaire n° 1440 du 04/03/2011
La Semaine Vétérinaire n° 1440 du 04/03/2011

Pathologie comparée

Formation continue

NAC

Auteur(s) : Yael Farhi

Une rhinite chez les rongeurs, une diarrhée ou un épiphora chez le lapin, un vomissement ou une toux chez le furet sont autant de symptômes qui méritent une exploration approfondie.

A l’occasion d’une conférence, notre confrère Jean-François Quinton est revenu sur des affections qui ne font pas toujours l’objet d’une méfiance particulière lorsqu’elles touchent les petits mammifères, car elles se traitent aisément chez les carnivores domestiques.

Les pellicules nécessitent parfois un traitement antiparasitaire

Si le squamosis (“pellicules”) chez le lapin passe fréquemment inaperçu et évoque une séborrhée sèche, il est surtout à considérer comme le signe d’appel d’une atteinte – chronique le plus souvent – à Cheylettiela parasitovorax. Le traitement antiparasitaire indiqué est la sélamectine. Attention, sa demi-vie est de huit jours chez le lapin (et non de trois semaines comme chez le chien). Il convient donc d’en tenir compte dans les fréquences d’administration afin d’éviter les échecs de traitement.

Les écoulements oculaires s’accompagnent fréquemment de complications chez le lapin

L’épiphora évoque une conjonctivite, mais souvent, il correspond chez le lapin à une obstruction du canal lacrymal, d’origine infectieuse (Pasteurella ou autres) ou mécanique (en relation avec les racines des prémolaires P1 et P2 ou des incisives). Les complications sont fréquentes : l’apparition de rhinolithes, des petites sécrétions plus ou moins solides, entraîne une chronicité, avec des surinfections (blépharite, pyodermite), qui aboutissent à des ulcérations importantes du derme. Celles-ci sont douloureuses.

L’exploration du canal lacrymal, dont le tracé est sinueux, nécessite une radiographie de la tête, de face et de profil, avec un produit de contraste (Omnipaque®). Les modifications susceptibles d’être décelées sont, d’une part, la dilatation du canal, avec l’éventuelle présence de rhinolithes, et d’autre part, un arrêt du flux au niveau des racines dentaires.

Pour le traitement, un collyre anti-inflammatoire utilisé seul est insuffisant. Il faut y adjoindre une antibiothérapie générale et cathétériser, à plusieurs reprises, le canal lacrymal (voir encadré).

Selon le stade et la cause de l’affection, une extraction dentaire (incisive ou prémolaire), peut être envisageable au niveau où le canal est bouché. Attention, cet acte peut être choquant pour le lapin. Il est donc nécessaire de bien en mesurer le rapport risques-bénéfices.

Les affections digestives chez le furet et le lapin exigent une attention particulière

Face à un lapin qui présente une diarrhée, il importe, en premier lieu, d’opérer une distinction entre une véritable diarrhée et une accumulation de cæcotrophes, qui apparaît si le lapin ne mange pas de foin. Ce dernier cas de figure se traite grâce à un régime exclusif de foin et d’eau pendant dix à douze jours.

La diarrhée mérite une attention particulière, puisque le pronostic vital du lapin peut être engagé, à la différence du chien et du chat. C’est une urgence chez cet animal, car elle entraîne un risque de déshydratation. Les lapereaux, sujets aux diarrhées postnatales, peuvent mourir rapidement, car beaucoup de germes produisent des toxines. Dans le cas où il y a production de mucus, le pronostic se trouve aggravé, car il signe la présence d’une entérocolite, une forme souvent rebelle aux traitements.

Le diagnostic passe par un examen microscopique des selles (voir encadré), afin de vérifier la présence de parasites (coccidies et œufs de Passalurus ambiguus). En cas de diarrhée chronique, une culture permet la recherche des germes responsables : clostridies, sérotypes pathogènes d’E.coli, klebsiellas, etc.

Le traitement nécessite d’hospitaliser l’animal, fréquemment en état de choc, dès que possible. Il est primordial de le réhydrater et de le réchauffer. S’il cesse de s’alimenter, il est indispensable de le gaver afin d’éviter une lipidose hépatique. L’administration de cholestyramine (Questran®(1)) permet de lutter contre les toxines. Du charbon sera administré (per os), ainsi qu’une antibiothérapie. Jean-François Quinton recommande, entre autres, l’utilisation de la néomycine. Ensuite, il faut revoir l’alimentation. Le pronostic est réservé pendant les premières vingt-quatre à quarante-huit heures : les décès sont fréquents lors d’entérite de sevrage. Après ce cap, la guérison s’effectue généralement sans séquelle. Chez les adultes, les diarrhées peuvent prendre des formes récidivantes.

S’il est bénin chez le chien et le chat, le vomissement signe fréquemment une atteinte digestive sévère chez le furet. Les causes sont variées : mégaœsophage, corps étranger, inflammation œsophagienne, ulcère gastrique à Helicobacter mustelae. La palpation abdominale permet souvent de déceler un corps étranger chez le furet (une brève anesthésie à l’isoflurane facilite cet examen). Le transit baryté est l’examen de choix lorsqu’un mégaœsophage est soupçonné. En cas de suspicion de corps étranger, l’échographie est indiquée.

Lors de suspicion d’ulcération digestive, la fibroscopie permet de mettre en évidence les œsophagites et les gastrites. Un traitement d’au moins trois semaines est entrepris. Celui-ci comporte du sucralfate, de l’oméprazole et une antibiothérapie (pour lutter contre Helicobacter mustelae).

La paralysie du nerf facial implique une antibiothérapie, voire une chirurgie

La paralysie spastique du nerf facial chez le lapin est souvent non diagnostiquée et négligée. Pourtant, il est important de la traiter précocement, même si aucun symptôme autre que le soulèvement de la joue n’est observé. En effet, il s’agit souvent d’une otite moyenne interne, qui peut être également associée à un syndrome de Claude-Bernard Horner.

D’importants dégâts sont parfois insoupçonnés : Jean-François Quinton recommande donc d’explorer la bulle tympanique.

Le traitement peut être médicamenteux, bien que l’antibiothérapie seule soit la plupart du temps insuffisante. Il faut bien souvent y associer un curetage de la bulle tympanique (syringotomie) afin d’extraire le matériel purulent. En cas de lyse osseuse importante, l’ablation chirurgicale du conduit auditif et de la bulle tympanique est indiquée.

Les affections respiratoires touchent les rongeurs, le furet et le rat

Les petits rongeurs souffrent parfois de rhinites. Chez le chien et le chat, ces affections se résolvent en général spontanément en quelques jours. Chez les rongeurs, l’absence d’évolution favorable spontanée entraîne souvent une affection respiratoire générale ou chronique. La conformation de l’oropharynx ne permet pas aux rongeurs de respirer correctement par la bouche. Lors de rhinite obstructive, les efforts de l’animal pour respirer par la bouche sont épuisants et peu efficaces, car une grande partie de l’air inhalé est absorbée par le tube digestif, ce qui entraîne des complications d’aérophagie douloureuses, qui empêchent l’animal de se nourrir. Malheureusement, les traitements ne sont pas toujours efficaces.

Même si les chiens de prairie sont rarement rencontrés de nos jours, il est utile de savoir que l’existence d’un odontome lors de rhinite est possible chez cette espèce. Cette affection correspond à la prolifération de la racine des incisives, qui viennent obstruer la cavité respiratoire supérieure. Dans ce cas, le traitement est chirurgical : la rhinotomie permet de libérer les voies respiratoires.

Chez l’octodon, le pronostic est toujours grave. Des complications d’aérophagie douloureuses et choquantes sont observées. Jean-François Quinton conseille la mise en place d’emblée d’un traitement antibiotique de longue durée, ainsi que des aérosols.

Le syndrome respiratoire du rat peut résulter de plusieurs entités infectieuses bactériennes (Mycoplasma pulmonis dans l’appareil respiratoire profond, Streptococcus pneumoniae) ou virales (virus de la sialo-dacryo-adénite, SAD). Il peut se compliquer avec le phénomène d’irritation que provoquent les porphyrines. Il est utile d’effectuer un calque des sécrétions nasales afin de vérifier la présence de bactéries, puis d’instaurer une antibiothérapie de longue durée si l’étiologie est bactérienne. Des aérosols (gentamycine, Goménol®(1)) peuvent y être associés. Cette affection est souvent chronique. Attention, l’abcès pulmonaire est une complication courante. La radiographie permet donc d’établir un pronostic.

En cas de toux chez le furet, il est utile de se rappeler que cet animal est sujet à la transmission de la grippe ou des rhinites par l’homme. Par conséquent, il ne faut pas omettre de se renseigner sur l’état de santé des propriétaires lors des commémoratifs. Si les symptômes persistent au-delà de quinze jours, il y a un risque de passage à la chronicité. Les infections de l’appareil respiratoire profond sont en effet fréquentes et peuvent souvent passer inaperçues, car elles n’ont pas forcément un retentissement important sur l’état général.

La radiographie permet de déceler une opacification alvéolaire amenant à suspecter une bronchopneumonie. Avant d’établir le traitement antibiotique, il convient de réaliser un lavage broncho-alvéolaire (afin de faire une culture), et de rechercher les mycobactéries, fréquentes dans cette espèce, par polymerase chain reaction. Attention, la toux a parfois une origine digestive : les gastrites chroniques accompagnées de reflux œsophagien sont fréquentes chez le furet.

  • (1) Pharmacopée humaine.

CONFÉRENCIER

Jean-François Quinton, praticien à la clinique Advetia, à Paris.

Article rédigé d’après la conférence : « Ces symptômes bénins chez les chiens et les chats mais potentiellement graves chez les petits mammifères », présentée lors d’une formation organisée par l’Afvac Ile-de-France, en janvier 2011.

Examen microscopique des selles du lapin

Que rechercher ?

• Des strongles : Passalurus ambiguus (œufs et larves).

• Des champignons saprophytes : présents à l’état physiologique, ils prolifèrent lors d’épisodes diarrhéiques.

• Des coccidies : elles sont fréquentes chez le jeune.

• Des sérotypes pathogènes d’Escherichia coli.

• Des clostridies piliformes (maladie de Tyzzer) ou spiriformes : toujours présentes dans le cæcum, leur prolifération, due à une alimentation déséquilibrée, est pathologique.

Y. F.

La cathétérisation du canal lacrymal

• Comment ?

Jean-François Quinton préconise l’emploi d’une sonde coudée pour chien ou chat. Il est préférable d’administrer un sédatif au lapin pour effectuer cet acte. Une incision est parfois nécessaire pour rouvrir le canal lorsque l’orifice est bouché.

• Dans quel but ?

– Diagnostic (isolements et cultures). Le prélèvement de pasteurelles, notamment, peut orienter le pronostic.

– Curatif, afin d’attester la perméabilité du canal et de le nettoyer (flush). Il est envisageable d’administrer des antibiotiques in situ.

Y. F.

POUR EN SAVOIR PLUS

Les photos sont extraites de l’Atlas des nouveaux animaux de compagnie, petits mammifères, Jean-François Quinton, Elsevier 2009.

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