Les zébus sont la pierre angulaire du travail des vétérinaires malgaches - La Semaine Vétérinaire n° 1439 du 25/02/2011
La Semaine Vétérinaire n° 1439 du 25/02/2011

Madagascar

Éclairage

INTERNATIONAL

Auteur(s) : Margot Camoin

Les campagnes de vaccination contre les charbons bactérien et symptomatique et les inspections en abattoir sont les principales missions des praticiens dans le sud-est de Madagascar.

Les zébus sont incontournables dans le sud de Madagascar. Les Malgaches sont friands de leur bosse, riche en lipides, qu’ils mangent en brochettes. Les zébus sont également utilisés pour le travail dans les rizières, raison pour laquelle ils sont presque tous castrés jeunes. Mais ces animaux ont aussi une dimension culturelle et servent de “dot”. Ainsi, l’homme offre plusieurs zébus à la famille de sa future femme et, chez les Antandroy (ethnie de Fort-Dauphin), lors du décès d’une personne, son troupeau est exterminé.

Elphine Zehova est vétérinaire sanitaire à Fort-Dauphin, dans le sud-est de Madagascar. Elle a étudié en Russie car, à son époque, il n’y avait pas encore d’école vétérinaire sur l’île. Il est aujourd’hui possible de suivre un enseignement en médecine vétérinaire aux facultés d’Antananarivo et de Mahajanga. L’activité de notre consœur concerne principalement les zébus pour les raisons susmentionnées, mais également parce que les Malgaches ne possèdent que rarement un animal de compagnie. Certains ont des chats pour chasser les souris, mais n’ont pas les moyens de les faire soigner. Pour ce qui est des chiens, les Malgaches ne s’en occupent pas, car ils sont “fady”, c’est-à-dire tabous. Elphine Zehova gère également la vaccination des coqs de combat, un loisir répandu.

La vaccination contre les deux charbons est obligatoire

A Fort-Dauphin, le travail du vétérinaire sanitaire comprend les campagnes vaccinales des zébus, notamment contre les charbons bactérien et symptomatique, pour lesquels la vaccination est obligatoire chez les bovins et conseillée chez les caprins, les ovins et les chevaux. Le jour J, un couloir de contention est mis en place sur le lieu de la campagne. L’acte vaccinal est réalisé par deux agents, dont l’un pratique l’injection et l’autre s’occupe de l’aspect administratif (nombre de bovins concernés, vaccin utilisé, numéro de lot, etc.). Notre consœur supervise ce personnel et transmet les documents relatifs à la vaccination aux services vétérinaires. Les campagnes vaccinales impliquent de nombreux déplacements pour la vétérinaire sanitaire, qui se rend dans les villages des alentours, généralement avec son propre véhicule. Mais les routes étant quasi inexistantes dans le sud de Madagascar, les voitures tombent régulièrement en panne et c’est alors en taxi brousse qu’Elphine Zehova se déplace.

Les marchés aux bestiaux constituent un autre pan de l’activité du vétérinaire sanitaire. Elphine Zehova se rend chaque semaine dans trois localités pour remplir les documents nécessaires à la vente des animaux.

Les entailles dans l’oreille font office d’identification

A ces campagnes de vaccination s’ajoute le travail en abattoir. A Fort-Dauphin, une quinzaine de zébus sont abattus chaque jour. Ces animaux cheminent depuis les régions voisines, sur des distances relativement longues, ce qui a des conséquences délétères sur leur état de santé. Trois documents sont requis pour l’abattage : le certificat d’origine délivré par le chef de la commune, et le certificat de vaccination et le certificat sanitaire remplis par le vétérinaire. L’inspection ante-mortem comprend l’enregistrement des animaux identifiés par leur robe ou le nombre et la forme des entailles qu’ils ont à l’oreille, correspondant à leur éleveur d’origine. Les entailles dissuadent, en théorie, les voleurs de zébus, qui sont nombreux. En effet, chez les Antandroy, durant un rite de passage à l’âge adulte, les jeunes doivent montrer leur bravoure en volant un zébu (mais ce n’est pas la seule raison des chapardages !). Le port d’une bague à l’oreille est obligatoire pour l’identification, mais cette pratique n’est pas acceptée par les éleveurs.

Avant l’abattage, les zébus sont soumis à une diète hydrique d’au moins vingt-quatre heures. Le vétérinaire vérifie ensuite les papiers de l’animal et prend sa température. Si celle-ci est supérieure à 40 °C, une fièvre charbonneuse est suspectée et l’abattage est reporté. Une inspection visuelle des grands systèmes est également effectuée ante-mortem. En cas de boiterie ou de fracture, les nœuds lymphatiques sont examinés. Lors d’adénopathie, le vétérinaire saisit le quartier drainé. Les anomalies sont inscrites sur le certificat qui suit l’animal pendant l’abattage. Si une lésion est décelée, elle est signalée à l’éleveur et au vétérinaire traitant pour qu’ils prennent des mesures. Celles-ci ne sont toutefois pas obligatoires et sont rarement mises en œuvre pour une question de coût.

Un non-respect des règles élémentaires d’hygiène

L’abattage a lieu tôt, généralement à 2 h du matin, pour que la viande soit mise en vente sur le marché avant l’arrivée du poisson, ce qui évite la concurrence. Il est réalisé sans étourdissement de l’animal et la saignée se fait à même le sol. Les deux demi-carcasses sont attachées par la bosse. Les aides-bouchers sont pieds et mains nus, et ils fument et boivent du café tout au long de la chaîne d’abattage.

Durant l’inspection post-mortem, le vétérinaire procède à une vérification des viscères, en effectuant les incisions réglementaires sur la langue, les ganglions mandibulaires, la rate, le foie et le cœur. Les poumons sont incisés seulement s’ils sont congestionnés. Si des douves sont présentes dans le foie, les parties touchées sont parées ou l’organe est saisi en cas d’atteinte globale. Les incisions sur le cœur permettent de vérifier la présence d’une dirofilariose. La carcasse est aussi examinée. Les déchets saisis sont enfouis et notés sur le certificat de l’animal. Les noms des éleveurs concernés sont indiqués dans le registre des saisies et ceux-ci sont informés. Les bouchers vérifient ce cahier, car ils se méfient des aides-bouchers qui inventent des pièces saisies à seule fin de les récupérer. Ces aides sont payés en morceaux de viande qu’ils revendent sur le marché. L’estampille est valable seulement pour Fort-Dauphin. Les peaux et les cornes sont récupérées et envoyées à Antananarivo à des fins d’artisanat. Les abats sont commercialisés.

Les bouchers payent le service de l’abattoir à la commune, qui se charge de son entretien… en théorie. Le sol est, en effet, tapissé de bouses et de sang et les plafonds sont couverts de toiles d’araignées.

A la clinique d’Elphine Zehova, l’activité est finalement presque nulle car, même si les affections sont nombreuses sur l’île (West Nile, fièvre de la vallée du Rift, etc.), notre consœur n’est pas contactée par les éleveurs lorsque leurs animaux sont malades. De plus, les troubles obstétriques sont quasi absents et les vêlages se déroulent bien. Enfin, aucun suivi des chaleurs n’est instauré en raison de l’illettrisme des éleveurs. Concernant la reproduction, le défi principal est celui de la consanguinité due à la présence d’un seul taureau par troupeau.

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