Les antitussifs font partie du traitement du vieux chien - La Semaine Vétérinaire n° 1437 du 11/02/2011
La Semaine Vétérinaire n° 1437 du 11/02/2011

Toux chronique de l’animal âgé

Formation continue

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Alexandre Balzer

Fonctions : praticien à Bellerive-sur-Allier

Ils sont indiqués lors de toux sèche, qui épuise un animal déjà fatigué par l’âge, entretient l’inflammation et peut favoriser la dissémination d’un processus infectieux.

La toux est un motif fréquent de consultation, en particulier chez le chien senior. Elle peut être de deux origines, cardiaque ou respiratoire. Classer la toux dans l’une de ces catégories est nécessaire,à la fois pour l’établissement du pronostic et du traitement. Malheureusement, cette distinction n’est pas toujours aisée à réaliser, en raison de l’imbrication possible de signes respiratoires et cardiaques.

Il est d’usage de considérer une toux comme chronique lorsqu’elle persiste depuis plus de deux mois. Ce critère arbitraire est généralement admis pour la chronicité de la bronchite. Mais en pratique, une toux régulière de plus d’une semaine s’installe déjà dans la chronicité.

L’intensité de la toux est un élément discriminant (voir tableau 1). Une toux forte indique une capacité intacte à mobiliser un volume important d’air. Ainsi, elle accompagne des affections hautes, avec une capacité respiratoire conservée : affections inflammatoires de la trachée et/ou des bronches ou conséquences d’une affection cardiovasculaire. Une toux faible, peu audible, indique plutôt un processus pathologique qui atteint le parenchyme pulmonaire, comme une bronchopneumonie ou un œdème alvéolaire.

Collapsus trachéal et bronchite sont des causes majeures de toux chronique

Les toux non cardiogéniques sont ainsi d’origine respiratoire. Les atteintes dominantes concernent le larynx, la trachée et les bronches, mais les affections respiratoires profondes peuvent aussi engendrer une toux.

• Les laryngites et la paralysie laryngée peuvent se traduire par une toux qui apparaît lors de la déglutition. Cette dernière n’est pourtant pas l’élément dominant du tableau clinique. Ainsi, pour la paralysie laryngée, la respiration est bruyante, la dyspnée inspiratoire et la dysphonie prédominent. La toux est généralement forte, non quinteuse, et déclenchée par la prise de boisson.

• Le collapsus trachéal est la cause majeure, chez les chiens âgés de petite taille, d’une toux chronique. Elle peut débuter dès l’âge de quatre ans et s’aggrave progressivement. Cela reste une affection du chien âgé. Il s’agit d’une toux sonore, quinteuse, sèche, rauque, facilement déclenchée par l’excitation de l’animal ou toute cause d’hyperventilation. A cette toux s’ajoutent d’autres signes cliniques, assez aisés à mettre en évidence : la trachée est facilement dépressible à la palpation, la manipulation de cette dernière déclenche la toux, la respiration est sifflante, à un stade avancé, la dyspnée est inspiratoire si le collapsus est extrathoracique, et expiratoire dans le cas contraire.

• Des symptômes voisins sont notés lors de trachéite : une toux forte, quinteuse, sèche, mais la trachée n’est pas dépressible. L’origine parasitaire reste possible, mais rare, avec la présence de nodules d’Oslerus osleri.

• La bronchite chronique représente l’autre grande cause de toux chronique chez le chien adulte. Elle est forte, quinteuse, le plus souvent sèche, sauf dans les rares cas de surinfection bactérienne où elle peut être humide. Les signes associés sont discrets, la dyspnée expiratoire – si elle survient – est tardive et les modifications auscultatoires peuvent faire défaut.

• Le parenchyme pulmonaire est plus rarement concerné, avec des bronchopneumonies interstitielles et les tumeurs pulmonaires. Lors de bronchopneumonie, la toux est faible, voire inaudible, fréquente et grasse. La dyspnée est constante, un jetage mucopurulent bilatéral n’est pas rare. Dans les bronchopneumonies interstitielles, la toux est inconstante, mais lors de fibrose interstitielle importante, elle est fréquente, récidivante, courte et sèche. A un stade avancé, l’auscultation révèle des crépitements légers, en fin d’auscultation.

• Les tumeurs primitives ou secondaires du poumon peuvent être à l’origine d’une toux, bien qu’il ne s’agisse pas de l’expression clinique la plus fréquente, la dyspnée de type restrictif étant la plus habituelle.

Les antitussifs sont indiqués lors de toux sèche

Dans cette présentation, les traitements des affections cardiorespiratoires ne sont pas détaillés. Evidemment, le traitement causal doit, s’il est possible, être rapidement mis en place : diurétique et inhibiteur de l’enzyme de conversion de l’angiotensine lors d’œdème pulmonaire, antibiotique ou antiparasitaire, etc. Il peut s’accompagner d’un traitement symptomatique par les antitussifs. De façon générale, ils sont indiqués lors de toux sèche, qui épuise un animal déjà fatigué par l’âge, entretient l’inflammation des voies respiratoires et peut favoriser la dissémination d’un processus infectieux. Les mesures hygiéniques sont également à instaurer. Elles permettent une vraie gestion du réflexe tussigène, quelle que soit l’origine de la toux, respiratoire ou cardiaque. Elles ont pour objectif de limiter les facteurs déclenchants de la toux : proscrire le port du collier au profit du harnais, lutter contre l’obésité, limiter les déplacements ou les efforts, soustraire l’animal à une atmosphère irritante, froide ou humide.

Il convient de distinguer les médicaments antitussifs au sens strict (voir encadré) de ceux qui, sans agir directement sur le réflexe tussigène, constituent parfois une aide significative au traitement de la toux (expectorants, mucolytiques, bronchodilatateurs et anti-inflammatoires).

Les alcaloïdes de l’opium sont intéressants lors de toux nocturne

Les alcaloïdes de l’opium (voir tableau 2) sont les antitussifs les plus efficaces. Ils ont une action centrale prédominante (excepté la noscapine). Les effets secondaires sont essentiellement la constipation et la somnolence. Ces produits ont un intérêt réel lors de toux nocturnes. Le chef de file est la codéine. La dose recommandée chez le chien est de 0,5 à 1 mg/kg/j en deux ou trois prises. Dans Netux®(1), elle est associée à un autre antitussif antihistaminique. Dans Neo-codion®(1), elle est combinée à deux expectorants. La noscapine se distingue parce qu’elle possède, outre une action centrale, un effet périphérique (propriétés antispasmodiques et bronchodilatatrices) : c’est un antitussif mixte. Elle ne présente pas d’effets secondaires.

La belladone est un antitussif d’action périphérique. Son effet parasympatholytique réalise une bronchodilatation et un assèchement des sécrétions. Le sirop humain Codotussyl® en contient, en association avec d’autres antitussifs. Mais à forte dose, il y a un risque de tachycardie.

Le clobutinol a une action centrale, dépressive du centre de la toux au niveau du bulbe rachidien. L’intérêt de Silomat®(1) est de ne pas provoquer de dépression respiratoire, contrairement aux alcaloïdes de l’opium.

Les antispasmodiques ont un effet mixte, avec la levée du spasme bronchique et une action sur le centre tussigène (action centrale). Ces produits n’agissent pas sur les sécrétions bronchiques. Le principal effet secondaire est une sédation plus ou moins marquée. Sepvapulmyl® associe un antispasmodique à un antitussif et à un fluidifiant des sécrétions. Les antispasmodiques sont essentiellement indiqués lors de spasmes respiratoires.

Les expectorants et mucolytiques sont utiles lors de bronchite

Dans la plupart des infections bronchopulmonaires, les sécrétions muqueuses constituent une gêne pour la circulation de l’air dans l’arbre bronchique. En augmentant la dilution des sécrétions bronchiques et en diminuant leur viscosité, les expectorants et mucolytiques contribuent à limiter les efforts de toux, notamment lors de bronchite (aiguë ou chronique). Ces médicaments sont cependant contre-indiqués dans les insuffisances ventilatoires, quelle qu’en soit l’origine, en raison des risques d’inondation bronchique.

Les expectorants agissent sur la production de mucus : en augmentant celle-ci, ils génèrent alors un effet de dilution. Le Gomenol®(1) est assez efficace à la dose d’une demie à une ampoule par séance d’aérosolthérapie. Les mucolytiques n’agissent pas sur la quantité de mucus, mais sur sa composition, en diminuant sa viscosité. Les composés réducteurs fluidifient le mucus en produisant une rupture des ponts disulfures. Ces dérivés de la cystéine possèdent d’autres effets bénéfiques, comme la modulation du système immunitaire systémique et spécifique du poumon, la réduction de l’adhésivité bactérienne aux cellules épithéliales des muqueuses. Des préparations vétérinaires existent et sont intéressantes : la N-acetylcystéine (Fluidixine® chien ou chat Fluicat®) ou la carbocystéine. En préparation humaine, le Mucomyst®(1) est le plus connu (un demi à un sachet, deux à trois fois par jour).

Les corticoïdes constituent l’ultime recours lors de toux réfractaires

Les anti-inflammatoires non stéroïdiens ne sont utiles que pour combattre l’hyperthermie. Ils ne présentent ainsi un intérêt que dans le cas de toux incoercibles qui entraînent un épuisement de l’animal (bronchite aiguë par exemple) et en l’absence de surinfection bactérienne. Le fenspiride (Pneumorel®(1), 4 à 8 mg/kg/j, deux fois par jour, per os) est intéressant dans les toux incoercibles.

Les corticoïdes (prednisolone à la dose de 0,1 à 0,5 mg/kg/j) constituent l’ultime alternative lors de toux réfractaires, en l’absence de surinfection bactérienne. Bien qu’ils soient souvent efficaces, ils favorisent la prise de poids, prédisposent aux infections (notamment respiratoires) et peuvent induire un syndrome de Cushing iatrogène. Pour cette raison, lors de toux chronique chez un chien âgé, l’utilisation prolongée d’associations de principes actifs (comme la théophylline, la prednisolone et le phénobarbital) n’est pas souhaitable. La monothérapie autorise en effet une médication plus légère de la toux, garante d’une certaine innocuité, respectueuse des variations individuelles et permettant une gradation logique dans les propositions thérapeutiques.

L’adaptation des posologies est peu étudiée chez l’animal senior

Dans un contexte gériatrique, au-delà de l’efficacité du traitement entrepris, il est nécessaire de considérer son innocuité, en tenant compte des dysfonctionnements organiques préexistants et des particularités métaboliques liées à l’âge. Indépendamment de maladies préexistantes, le chien âgé présente des particularités métaboliques (modification de la composition corporelle, diminution de la vascularisation des organes filtres, de la masse hépatique, de la fonction tubulaire rénale, etc.). Ces spécificités sont à l’origine de modifications pharmacocinétiques et pharmacodynamiques qui justifient, en théorie, de diminuer les doses et d’allonger les intervalles entre les prises chez le chien senior. Les modalités pratiques de ces ajustements thérapeutiques sont toutefois peu étudiées.

  • (1) Pharmacopée humaine.

CONFÉRENCIER

Alexandre Balzer, praticien à Bellerive-sur-Allier.

Article rédigé d’après la conférence « Mon vieux chien tousse », présentée lors du congrès “(Re) découvrir la gériatrie” de l’Afvac Auvergne-Limousin, à Vichy, en mai 2010.

Les antitussifs stricto sensu

Ces médicaments sont partagés en trois grands groupes, selon leur mode d’action :

– les antitussifs à action centrale dominante, qui dépriment le centre de la toux ;

– les antitussifs à action périphérique dominante, qui diminuent la sensibilité des récepteurs, inhibent les terminaisons réflexogènes ou encore agissent sur les muscles lisses bronchiques ;

– les antitussifs mixtes, qui possèdent les deux effets ci-dessus.

A. B.
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