La mycose des poches gutturales est une affection difficile à traiter - La Semaine Vétérinaire n° 1433 du 14/01/2011
La Semaine Vétérinaire n° 1433 du 14/01/2011

Hémorragie et dysphagie

Formation continue

ÉQUIDÉS

Auteur(s) : Anne Couroucé-Malblanc

Lorsque l’embolisation artérielle n’est pas réalisable, le traitement médical des mycoses des poches gutturales peut être associé ou non à une ligature de la carotide commune.

Les complications de la mycose des poches gutturales chez le cheval sont fréquentes et sévères. Cette affection se traduit par des hémorragies souvent fatales (voir photo ci-contre) et des signes nerveux tels que la dysphagie ou l’hémiplégie laryngée.

Le traitement de choix est aujourd’hui l’embolisation artérielle, mais cette technique nécessite un chirurgien expérimenté, des infrastructures équipées et les coûts sont élevés. En raison de la situation d’urgence que représente une hémorragie provenant de la lésion d’une carotide dans une poche gutturale, et du fait également du moindre coût de ce geste,la ligature de la carotide commune est souvent utilisée sur le terrain. Toutefois, dans un certain nombre de cas, elle n’évite pas les récidives d’hémorragie liées à une possibilité de saignement rétrograde.

Du point de vue médical, l’application de traitements antifongiques dans la poche gutturale sur les lésions, bien que décrite comme peu efficace, est courante. L’amphotéricine B (réservé désormais à l’usage hospitalier) et l’enilconazole (Imavéral® sont les antifongiques les plus fréquemment employés.

Onze chevaux atteints sont inclus dans une étude

Une étude menée à l’école de Nantes a cherché à décrire l’évolution clinique, à moyen et long termes, de onze chevaux atteints d’une mycose des poches gutturales et traités par instillation antifongique des lésions sous endoscopie, avec ou sans ligature de la carotide commune.

Pour cela, les dossiers médicaux des chevaux diagnostiqués avec cette affection au sein de la clinique équine d’Oniris, entre janvier 2008 et mars 2010, sont sélectionnés. L’anamnèse, les commémoratifs, les résultats des investigations sont alors rapportés, ainsi que les traitements mis en œuvre, les complications et l’évolution clinique.

Onze chevaux (cinq hongres, cinq femelles et un entier), âgés de deux à vingt-deux ans, atteints d’une mycose unilatérale, sont inclus dans cette étude. Ils seront suivis de trois mois et demi à vingt-cinq mois après la première visite.

Les motifs de consultation sont une épistaxis (cinq cas), des signes neurologiques (quatre cas) incluant un déplacement dorsal du voile du palais permanent, une hémiplégie laryngée de grade 4 sur 4, une hémiplégie faciale et une dysphagie ou d’autres signes tels qu’un jetage mucopurulent (deux cas, voir graphique 1). Au total, un cheval n’est pas traité en raison du refus de son propriétaire, trois sont uniquement pris en charge médicalement et sept autres sont traités par une ligature de la carotide commune associée à un traitement médical.

Chez les cinq chevaux qui présentent une épistaxis, une ligature de la carotide est réalisée, associée à un traitement médical antifongique local dans la poche. Un cheval meurt après un nouvel épisode d’hémorragie. Les quatre autres guérissent et reprennent le travail à leur niveau initial.

Pour les quatre chevaux qui montrent des signes neurologiques, trois meurent ou sont euthanasiés : l’un d’eux n’a pas été traité (refus de son propriétaire), un autre a reçu un traitement médical seul et le dernier a subi une ligature de la carotide associée à un traitement médical. Le quatrième cheval est traité par la ligature de la carotide et un traitement médical : il récupère de sa dysphagie, mais pas de l’hémiplégie laryngée. Il retournera néanmoins à son activité sportive initiale (saut d’obstacles).

Les deux chevaux sans problème neurologique ni hémorragie sont uniquement traités médicalement. L’un d’eux récupère complètement et le second est euthanasié pour une autre cause médicale (syndrome de Cushing).

Le nombre de traitements antifongiques varie de deux à douze. La disparition complète de la plaque mycosique est obtenue chez six chevaux en un à six mois.

Au total, six chevaux sur les onze guérissent (54,5 %) et retrouvent leur activité sportive initiale. Si ceux qui présentent une dysphagie sont distingués de ceux qui n’en souffrent pas, le taux de guérison est de 25 % pour les premiers et de 71,4 % pour les seconds. La dysphagie semble donc être un mauvais facteur pronostique pour cette affection.

La présence d’une dysphagie est un facteur pronostique négatif

Malgré le faible nombre de cas, cette étude montre que la combinaison d’un traitement médical avec une ligature de la carotide, ou un traitement médical seul, peuvent être efficaces pour le traitement d’une mycose des poches gutturales, quand l’embolisation artérielle n’est pas possible. Toutefois, la disparition de la plaque mycosique sur des chevaux traités médicalement, avec ou sans ligature de la carotide, peut être longue.Certaines lésions nerveuses, comme l’hémiplégie laryngée, ne rétrocèdent pas au traitement, même après la disparition de la plaque mycosique.

En outre, la présence d’une dysphagie est un facteur pronostique négatif, mais une guérison est néanmoins possible, même si elle peut être longue. L’accès à de l’herbe, un élément nutritif plus facile à déglutir pour ces chevaux, peut constituer un point positif dans leur gestion.

CONFÉRENCIÈRE

Marjolaine Hummel, interne à l’école Oniris (Nantes).

Article rédigé d’après la conférence « Symptômes, traitements et évolution clinique chez onze chevaux atteints de mycoses des poches gutturales «, présentée lors des journées Avef 2010 à Bordeaux.

Etude rétrospective

Le traitement des mycoses des poches gutturales était également au cœur des discussions de la commission “chirurgie” de l’Avef, lors de la table ronde du 8 novembre dernier organisée par notre consœur Céline Mespoulhes à Bordeaux. A cette occasion, il a été décidé de mener à bien une large étude rétrospective sur le sujet. Ainsi, les confrères ayant été confrontés à des cas de mycose des poches gutturales traités médicalement et/ou chirurgicalement, qui souhaiteraient collaborer à cette étude et accepteraient de transmettre les dossiers de leurs chevaux, peuvent contacter Olivier Geffroy (olivier.geffroy@oniris-nantes.fr).

A.C.-M.

VOIR AUSSI

• « La mycose des poches gutturales exige parfois de ligaturer en urgence l’artère carotide », Semaine Vétérinaire, n° 1418 du 24/9/2010

• « Le jetage est associé à plusieurs affections respiratoires », Semaine Vétérinaire, n° 1205 du 10/12/2005.

• « Comment réaliser une ligature de l’artère carotide commune ? », Pratique Vétérinaire Equine, juillet 2009, n° 163.

• « Etude descriptive de 21 cas de mycoses des poches gutturales », Pratique Vétérinaire Equine, avril 2003, n° 138.

• « Un cas d’épistaxis de la poche gutturale traité par embolisation de l’artère carotide interne », Pratique Vétérinaire Equine, avril 2003, n° 138.

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