Les nuages s’éloignent de la délivrance du médicament - La Semaine Vétérinaire n° 1432 du 07/01/2011
La Semaine Vétérinaire n° 1432 du 07/01/2011

Journée des éditions du Point Vétérinaire. Débat sur “le médicament dans tous ses états”

Actualité

Auteur(s) : Marine Neveux*, Nicolas Fontenelle**

La table ronde organisée le 16 décembre dernier fait la part des choses : la délivrance partagée entre plusieurs ayants droit ne devrait pas échapper aux praticiens.

La rumeur court, insistante. Dans les congrès, les symposiums, sur les blogs… Les praticiens s’interrogent : « La question n’est plus de savoir si nous allons perdre la délivrance du médicament vétérinaire, mais quand. » Les plus pessimistes parlent de mois. Ce cataclysme ferait passer de vie à trépas des milliers de cabinets et de cliniques trop dépendants du médicament. Qui veut la peau des vétérinaires ? Notre confrère Eric Vandaële, journaliste à La Semaine Vétérinaire et animateur de ce débat, ouvre la table ronde par une question : « Quelles sont les attaques, les prétendues menaces ? » L’antibiorésistance, les pharmaciens en mal de chiffre d’affaires, les pouvoirs publics inquiets de marges arrière insuffisamment éthiques à leur goût, les groupements d’élevages et leurs groupements d’intérêt économique… tout y passe. Voilà comment une bonne partie de la profession perd confiance. Alors, la fin de la délivrance est-elle un mythe ou une réalité ?

« En Europe, chaque Etat membre conserve la liberté de légiférer pour réglementer son propre marché du médicament vétérinaire. Personne, dans notre pays ou dans le cadre communautaire, Commission européenne ou Etats membres, ne remet en cause le dispositif actuel français qui repose sur les trois ayants droit : vétérinaires, pharmaciens, groupements, affirme Jean-Luc Angot, directeur général adjoint de l’alimentation au ministère de l’Agriculture. Nous sommes attachés à la délivrance par le vétérinaire, parce qu’il est proche de l’éleveur, qu’il a une bonne connaissance de l’action du médicament, qu’il est le mieux placé pour exercer une pharmacovigilance et qu’il peut délivrer des conseils avec sa prescription. »

Et Jean-Luc Angot d’appuyer ses propos rassurants : « Nous n’avons aucun signal de remise en cause du dispositif. » Ou encore : « Le vétérinaire se fait un peu peur, mais c’est bien qu’il se pose des questions sur l’avenir. A la suite des Etats généraux du sanitaire, il y a eu des discussions sur la délégation des actes, etc. Il est légitime que le vétérinaire s’interroge sur son positionnement. »

Le système actuel satisfait les différents acteurs

« Le vétérinaire, c’est un contrat de soins et de confiance avec son client, renchérit Michel Baussier, président du Conseil supérieur de l’Ordre. C’est une relation bilatérale entre un éleveur, qui connaît l’économie de son élevage, et le vétérinaire, qui connaît aussi bien l’exploitation. »

Christophe Brard, président de la Société nationale des groupements techniques vétérinaires (SNGTV), incite ses confrères à se référer aux guides de bonnes pratiques des antibiotiques ou de bonne gestion du médicament vétérinaire. « Du fabricant à l’éleveur, le système actuel est efficace et fonctionne bien, estime-t-il. Chaque étape est codifiée. Il y a une réglementation. Nous devons agir en profession responsable, respectueuse des bonnes pratiques, et lutter fermement contre les comportements déviants. »

« Le médicament est aussi une problématique d’économie d’élevage, ajoute René Planel, président du réseau Cristal. Le fait que le vétérinaire soit également impliqué dans le médicament le responsabilise concernant le coût de celui-ci. »

Catherine Choma, pharmacien inspecteur à la Direction générale de la santé, reconnaît toutefois quelques points faibles : le mauvais usage du médicament, le manque de formation des ayants droit, le débat sur les additifs en alimentation animale. « Le point fort du vétérinaire est sa connaissance de généraliste dans tous ses domaines d’activités, y compris en pharmacie, pharmacologie ou thérapeutique », rétorque Thierry Poitte, praticien canin à l’île de Ré.

Même Jacky Maillet, représentant de l’Association nationale de la pharmacie vétérinaire d’officine (ANPVO), n’y voit pas matière à révolution : « Je n’ai pas de proposition alternative par rapport au schéma qui existe aujourd’hui. » Il déplore néanmoins « l’amalgame entre le mot prescription et délivrance. Il y a une propension à mélanger ces deux actes qui, selon moi, ne sont pas liés de façon systématique ». « Je ne comprends pas votre remarque, réplique Catherine Choma. En pratique vétérinaire, il n’y a quasiment pas de médecines susceptibles d’être recommandées sans ordonnance. Le pharmacien ne conseille rien ou pas grand-chose.  »

« Il n’y a pas de confusion entre la prescription et la délivrance, poursuit Christophe Brard. Quand j’effectue une prescription, je le fais en fonction du choix thérapeutique. La délivrance est le prolongement naturel. Je vais délivrer la spécialité dans un rapport coût-bénéfice le plus adapté. Nous avons suivi une formation, des études qui nous permettent de connaître toute la médecine et la pharmacie de l’animal. » « Il ne faut pas saucissonner la prescription-délivrance, cela forme un tout sur l’élevage », ajoute Marc-Henri Cassagnes, directeur de la Fédération nationale des groupements de défense sanitaire (FNGDS).

« Quelle est la valeur ajoutée du pharmacien ? »

A la question « quelle est votre valeur ajoutée quand vous ne voulez vous occuper que de la délivrance du médicament ? », adressée par Catherine Choma aux officinaux, Jacky Maillet répond que « le pharmacien a le même rôle en médecine vétérinaire que celui qu’il remplit aujourd’hui en médecine humaine ». Selon lui, « cela consiste à vérifier que les posologies correspondent aux résumés des caractéristiques du produit, etc. Ce n’est pas à lui d’apprécier si le médicament va être efficient sur l’animal. Notre rôle est celui de filtre ». « La deuxième cause d’intoxication du chat est le paracétamol, un médicament humain d’automédication par les pharmacies », déplore de son côté Xavier Guilbert, directeur de la centrale Coveto.

Beaucoup de points faibles ont été évoqués. « Il y a une prise de conscience générale autour de l’antibiorésistance », observe Michel Baussier. Le moratoire décidé par la filière porcine sur les antibiotiques de dernière génération, avec des objectifs de réduction de l’ordre de 20 à 25 %, n’est pas nécessairement pertinent. Selon Jean-Luc Angot, « sur ce sujet, il faut réagir à froid et raisonner sur des données objectives. Dans le cadre du comité sur l’antibiorésistance, nous réunirons tous les acteurs en janvier avec des objectifs quantitatifs, mais surtout qualitatifs. Il faudra raisonner par molécule et par filière ».

D’autres points d’amélioration ont été cités : ainsi, « précipiter le principe d’harmonisation des autorisations de mise sur le marché au niveau européen permettrait aussi d’aller vers une plus grande sécurisation », estime Christophe Brard.

Enfin, si les intervenants s’accordent sur un système actuel globalement satisfaisant, la communication de la profession est un enjeu toujours difficile à gérer. « Nous n’avons pas à rougir, il faut communiquer en temps de paix, et non attendre de communiquer en réaction », souligne Christophe Brard. Concernant les contrôles, ils sont surtout importants pour les grandes infractions. « Elles sont lourdes pour l’image de la filière : les prescripteurs autoroutiers, etc., qui n’ont aucune réalité dans le quotidien de l’élevage, ce sont eux les grands délinquants ».

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