La plupart des diplômés slovènes n’exercent pas le métier de vétérinaire - La Semaine Vétérinaire n° 1429 du 10/12/2010
La Semaine Vétérinaire n° 1429 du 10/12/2010

La profession en Slovénie

Éclairage

INTERNATIONAL

D’une rurale déclinante à des technologies de pointe, ce pays, trop petit pour faire vivre les trop nombreux diplômés, présente une diversité de structures entre conservatisme et modernité.

Dans la minuscule clinique Sanivet à Jesenice, Nina Korent s’inquiète : « Si le gouvernement ne renouvelle pas notre contrat, nous aurons du mal à survivre. » Elle ne cache pas sa colère : ce contrat concerne les visites officielles effectuées par les vétérinaires dans les fermes pour vérifier les registres, les boucles, donner des conseils ou mettre des amendes. La rurale représente les deux tiers de l’activité de la clinique, qui compte trois vétérinaires. Tous les dix ans, le gouvernement renouvelle l’agrément… ou pas. Nina Korent estime que son équipe a fait du bon travail, mais la concurrence est vive. Ce tout petit pays (quelque deux millions d’habitants) compte plus de vétérinaires qu’il n’en faudrait, ce qui pose un sérieux problème. Au temps de la Yougoslavie, il y avait une seule grosse clinique gouvernementale à Kranj, près de Ljubljana. Après la guerre et l’indépendance de la Slovénie, en 1991, le temps des privatisations est venu. Les vétérinaires ont dû construire leurs cliniques pour pouvoir exercer… « Trop », selon Nina Korent, qui a perdu de nombreux clients après l’ouverture d’une clinique à 20 km de la sienne, il y a deux ans. Certains cassent même les prix.

Beaucoup trop d’élus… et de forêts

Ainsi, l’école vétérinaire a suivi cet engouement. Soixante-dix étudiants y entrent chaque année et quarante en sortent diplômés sept ans plus tard. Mais beaucoup se retrouvent au chômage ou n’exercent jamais leur profession. « Aujourd’hui, 80à 90 % des jeunes vétérinaires sont des femmes qui ne commencent jamais à travailler, car elles font des enfants. » La plupart des diplômés se reconvertissent, et certains affichent clairement leur projet. Ainsi, Lukas Gams, étudiant en dernière année, est formel : « Dans un mois, je finis mes études, mais je vais plutôt travailler dans une pharmacie, je gagnerai mieux ma vie. »

Peter Ramùs, trente-quatre ans, est vétérinaire depuis huit ans. Dans sa promotion, ils ne sont que cinq à exercer aujourd’hui. Peter travaille en rurale, mais dans sa province de Jesenice, les fermes tendent à disparaître. Sur 50 km2, deux mille vaches et trois mille brebis se disputent les quelques prés disponibles. Car la forêt recouvre 57 % de la surface du pays et est omniprésente dans le Nord-Ouest. Les éleveurs possèdent en moyenne une dizaine de bêtes, qu’ils gardent souvent par tradition. Ces animaux “familiers” sont précieux et le vétérinaire est toujours appelé en cas de problème, ce qui n’est pas le cas des plus grosses exploitations qui comptent une quarantaine de vaches. « Si les fermes disparaissent, la forêt aura le dernier mot », déplore Peter Ramùs. Mais paradoxalement, « sans forêt, il n’y aurait plus de fermiers ». Le bois slovène, de bonne qualité, leur assure en effet d’importants revenus.

Il a fallu se mettre aux normes européennes

La situation épidémiologique est bonne. Depuis l’entrée de la Slovénie dans l’Europe en 2004, toutes les bêtes sont identifiées et les autorités sont drastiques quant à la gestion de la prophylaxie. Le pays est exempt de tuberculose et 30 % des bêtes sont testées pour la brucellose et la fièvre catarrhale. Ainsi, Peter Ramùs est le garant des fermes qu’il visite à travers les registres qu’il remplit, et qui doivent être parfaitement tenus pour pouvoir exploiter la viande et le lait. Il soigne surtout des problèmes de pieds, des diarrhées chez les veaux, des mammites, et s’occupe des vêlages… même s’il ne pratique que trois ou quatre césariennes par an.

Un manque de médicaments vétérinaires

A l’inverse de Jesenice, Ljubljana profite d’un niveau de vie élevé. Ainsi, la Klinika est toujours pleine, avec cinquante à cent consultations par jour pour les petits animaux et les NAC. Sept vétérinaires se partagent le travail avec des spécialisations en orthopédie, en neurologie, etc. Les propriétaires dépensent en moyenne 80 € par visite. Une consultation coûte 36 € pour un chien et 30 € pour un chat. Cette clinique existe depuis quinze ans, mais est encore en développement, avec l’achat prévu d’un caisson de balnéothérapie. Le principal problème des praticiens est le manque de médicaments. Le pays est trop petit pour intéresser les laboratoires. Alors, pour pallier les lacunes, ils les font venir des pays limitrophes (Autriche, Italie, Hongrie).

Un hôpital de pointe tourné vers la cancérologie

Ainsi, notre confrère Janos Butinar reçoit le plus souvent ses médicaments des Etats-Unis. Cet oncologue passionné se veut à la pointe de sa spécialité et a fait construire, il y a trois ans, le Veterinary Animal Hospital à Postojna (30 km au sud de Ljubljana). Il a vu les choses en grand : 1 300 m2 de locaux dotés d’un scanner et d’un accélérateur linéaire.

Tout est étudié pour les animaux, mais aussi pour leurs maîtres : « Les propriétaires sont anxieux par rapport au cancer. C’est pourquoi l’attitude du praticien doit être rassurante, en dépit des graves décisions à prendre. Je règle mon fauteuil à la même hauteur qu’eux, je ne porte pas de blouse, j’examine le plus souvent l’animal à même le sol. »

La décoration vise aussi le bien-être : table sans pied pour que l’animal puisse circuler librement, peintures soigneusement choisies pour leurs couleurs relaxantes et sécurisantes, etc. « J’ai puisé mes idées lors de mes voyages en Europe et aux Etats-Unis. D’ailleurs, je suis en relation directe avec mes confrères américains par l’Internet lorsque j’ai besoin d’un avis sur un cas », ajoute Janos Butinar. Ici, 70 % des cas relèvent de l’oncologie, mais aussi de l’orthopédie et de la dentisterie. 30 à 40 % des clients sont italiens, 10 % croates ou slovènes, bien entendu, puis polonais, ukrainiens.

Quatre vétérinaires travaillent à l’hôpital, mais il faudra encore des années pour qu’il fonctionne à plein régime. Résolument tourné vers l’avenir et au-delà des frontières, Janos Butinar voit son métier comme une vocation : « Un vétérinaire doit tout donner pour son métier. Ici, il n’y a pas d’horaires, certains n’ont pas tenu le coup. Mais je suis toujours à la recherche de confrères passionnés et enthousiastes qui voudraient venir travailler avec nous. » La possibilité d’un charmant exil, entre mer Adriatique et Alpes juliennes…

LA PROFESSION EN CHIFFRES

Il y a 1 050 vétérinaires en activité en Slovénie, dont 480 dans le privé (120 exclusivement en canine et 120 en rurale, les autres en mixte) et 250 qui travaillent dans le service public.

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