Que pensez-vous des contrats commerciaux avec les laboratoires ?

Assurer sa trésorerie en respectant la santé publique

Le système des contrats est vital pour nos structures. Avec les difficultés économiques préoccupantes que nous traversons actuellement, les marges arrière assurent une trésorerie importante. Pet-food compris, elles représentent par exemple près de 7 % du chiffre d’affaires de nos trois structures, où nous sommes cinq associés et un salarié vétérinaire.

Nous appliquons strictement le décret “prescription-délivrance” et nous respectons la loi sur la pharmacie. Par exemple, nous ne délivrons les vermifuges qu’après consultation, et nous n’avons jamais autant vendu d’antiparasitaires. Lorsque les laboratoires nous accordent des unités gratuites, notre politique est de les intégrer dans les chiffres, ce qui ne nous pénalise pas dans la réalisation de nos futurs contrats.

Depuis le 28 décembre 2009, les dispositions de la directive “services” produisent leurs effets et impliquent dorénavant l’ouverture plus grande du marché concurrentiel des services. L’obligation de rebasculer les remises arrière sur le prix de vente au bénéfice du consommateur serait une option pour faire diminuer les prix.

Nous sommes toutefois plus mesurés sur la délivrance des antibiotiques. Au niveau éthique, les conflits d’intérêt doivent respecter le domaine de la santé publique et la lutte contre les antibiorésistances. Nous serions d’ailleurs favorables à la mise en place d’une charte de bonnes pratiques en antibiothérapie.

Moduler son taux de marge pour optimiser le résultat

Généralement, les contrats me conviennent, spécialement ceux qui concernent tous les produits commercialisés par le laboratoire. Ils sont en effet plus simples à appréhender et permettent de comparer facilement les prix. Les contrats complexes, qui comprennent à la fois une remise globale, des remises par gamme, des remises avec association de gammes et des remises ponctuelles, sont quant à eux bien complexes à gérer.

Je suis toutefois toujours surpris de devoir signer un contrat sans cesse à la hausse, comme si nous devions constamment vendre plus !

Il me semble que si les prix étaient d’emblée les bons, sans contrat ni remise, ce serait plus simple. Bien évidemment, dans ce cas de figure, l’idée habituelle des vétérinaires de garder en permanence le même taux de marge devrait être révisée. D’ailleurs, pour ma part, je suis sorti des taux de marge “classiques” depuis quelque temps, pour les adapter selon les produits. Cela permet de répercuter les remises, d’augmenter une marge nette ou d’intégrer un acte (injectables facturés au millilitre avec un taux de marque de 80 à 98 % par exemple). J’optimise ainsi le résultat en fonction des contrats et des remises, au profit du client et de la clinique.

Quant aux marges arrière, elles rendent probablement le commerce assez artificiel. C’est évidemment un levier de captation de clientèle pour les laboratoires, mais les regroupements de vétérinaires qui sont en train d’avoir lieu vont sans doute changer la donne.

A quand un coefficient “équivalent véto temps plein” ?

Les contrats laboratoires ne me posent pas de problème, car j’utilise toujours en mon âme et conscience le médicament ou l’aliment qui me semble le plus adapté à l’animal et à son propriétaire. Ce qui me gêne, c’est qu’ils introduisent des distorsions de concurrence énormes entre les vétérinaires installés seuls, comme moi, et les associations plus ou moins massives, qui emploient des salariés vétérinaires. Dans ce cas, la consommation est évidemment plus importante et les avantages financiers obtenus quasi “monstrueux” face aux miens. Je demande depuis longtemps aux laboratoires de pondérer leurs contrats d’un coefficient “équivalent véto temps plein” (EVT). Sans succès…

De ce fait, j’apprécie les laboratoires qui tiennent compte de ma situation de vétérinaire seul et qui ont des conditions d’accès aux remises ou aux avantages simples et claires. J’apprécie le rôle des délégués qui sont dans une vraie communication technique, et qui m’aident à gérer les flux et les commandes. Enfin, je trouve désagréable de découvrir l’existence d’avantages réservés à certains, au détour des congrès en discutant avec les confrères.

Dans le passé, la profession a créé, avec les coopératives d’achat, un outil qui garantissait l’accès au médicament dans des conditions identiques pour tous les vétérinaires, vraie marque de la confraternité. Mais les laboratoires ont su entrer “par la petite porte” dans nos structures, et leurs contrats ont mis à mal cet élan. Nous devons donc tous veiller à ne pas tomber dans une dérive mercantile et, surtout, garder notre indépendance et notre liberté de choix et de prescription. Mais j’ai parfois la sensation qu’il existe un autre risque, plus insidieux, quand certains d’entre nous participent à la communication institutionnelle des laboratoires sur l’évolution de la profession.