Influenza aviaire
Formation continue
FILIÈRES
Auteur(s) : Mathieu Hautemulle
Aucune corrélation n’est mise en évidence entre le risque d’infection et les activités liées aux coqs.
Lors de l’épizootie d’influenza aviaire due au virus H5N1 hautement pathogène en Thaïlande en 2004-2005, « les coqs de combat ont été rapidement suspectés de propager la maladie, en raison de leurs fréquents déplacements dans tout le pays », rapporte notre consœur Mathilde Paul, doctorante en géographie de la santé(1). Mais deux études auxquelles elle a participé, au niveau national et dans la province de Phitsanulok(2), montrent que ces animaux ne constituent pas un important facteur de risque. Aucune corrélation significative ne se dessine en effet entre le risque d’infection et la densité de coqs de combat par sous-district ou les activités qui leur sont liées.
Pour l’expliquer, une troisième étude, plus qualitative, qui repose sur des interviews, a été menée dans des élevages et des arènes de combat. Première constatation : pendant une à trois heures par jour, les éleveurs nettoient et bichonnent les coqs, élevés à part des autres volailles. S’ils entendent parler d’une “menace virale”, ils se téléphonent pour protéger les coqs et les confiner, éventuellement dans leur maison.
Les coqs bénéficient par ailleurs « d’une pharmacopée assez étendue », note Mathilde Paul : médecine traditionnelle locale « très empirique » (plantes, inhalations, pâtes végétales, bâtons de citronnelle, etc.), vaccinations, antibiotiques et autres produits au contenu inconnu, avec pour seule indication : « Peut améliorer les performances de l’animal. » « Les éleveurs n’en parlent pas trop, le sujet est sensible », souligne Mathilde Paul. Car en Thaïlande, les combats de coqs sont une tradition bien ancrée. Les éleveurs sélectionnent et croisent ces athlètes selon leur endurance, leur agressivité, leur morphologie, leurs performances, etc.
Les autorités elles-mêmes portent une grande attention aux coqs de combat, pour lesquels est institué un passeport obligatoire de vingt-quatre pages comportant photos et résultats de tests réguliers de recherche de virus influenza aviaire. « Ce système d’identification est officiellement toujours en cours et pour tous, mais difficile à appliquer, vu la structure des élevages », nuance notre consœur. Cette dernière évoque d’autres mesures de prévention en place : la restriction des mouvements ou l’interdiction de combats à certains moments, et la certification d’arènes par des critères de biosécurité, comme l’utilisation de désinfectants sur le sol, ou de pédiluves.
(2) « Anthropogenic factors and the risk of highly pathogenic avian influenza H5N1 : prospects from a spatial-based model », Vet. Res., 2010, vol. 41, n° 28. Publié en ligne le 16 décembre 2009 (téléchargeable sur www.vetres.org) ; « Farming practices and the risk of highly pathogenic avian influenza H5N1 in backyard poultry : a case-control study in Thailand », 2010, présenté fin mars 2010 lors d’une conférence de la Society for Veterinary Epidemiology and Preventive Medicine, à Nantes. (voir aussi La Semaine Vétérinaire n° 1412-1413, page 29).
La Thaïlande compte 65 millions d’habitants et 5 à 6 millions de coqs de combat, présents dans un million de maisons. Nombre d’amateurs possèdent un ou deux volatiles pour leurs loisirs, tandis que des élevages comptent une centaine de coqs. Objets de paris, ceux-ci s’entraînent et combattent dans des arènes de plus en plus grandes et réputées. Les duels, plutôt assimilés à des courses d’endurance, se terminent rarement par la mort. Certains champions valent plusieurs milliers d’euros.
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