L’élevage est un milieu propice à la présence de tensions électriques parasites

Une tension électrique parasite est une tension de faible amplitude (inférieure à 10 V), mesurée entre deux points qu’un animal peut simultanément toucher. Le 17 juin dernier, François Deschamp, ingénieur du Réseau de transport d’électricité (RTE), a présenté la conformité réglementaire des installations électriques en élevage au cours d’une séance de l’Académie vétérinaire. Il existe deux types de tensions électriques parasites. Les tensions de contact apparaissent au contact d’un élément métallique isolé (un abreuvoir, par exemple), le courant traversant alors l’animal pour revenir au sol par les membres. Les tensions de pas surviennent, elles, lorsqu’un courant s’établit entre les membres antérieurs et postérieurs (^{voir schéma}). La faiblesse des impédances de contact des animaux de rente (résultant de l’humidité de leurs points de contact : museau, onglons) font qu’ils sont particulièrement sensibles aux courants vagabonds.

Les grandes structures métalliques présentes dans les bâtiments et les équipements agricoles (charpente, barrières, clôture, cornadis, logettes), et leur appareillage électrique (robot de traite, distributeur de concentrés, gestion électronique du troupeau, etc.) font que l’élevage est un milieu amplificateur de ces tensions parasites. Une des principales causes de leur présence est une mise à la terre défectueuse ou sous-dimensionnée des installations. Le courant de retour des clôtures électriques ou les courants de fuite des machines (pompe, machine à traire) peuvent alors circuler dans le sol ou les bâtiments et induire des différences de potentiel entre des structures métalliques non connectées entre elles. D’autres phénomènes sont observés. Un sol humide et acide (lisier, engrais) peut se comporter comme l’électrolyte d’une batterie et induire entre deux masses métalliques un couplage électrochimique. Il en résulte l’apparition de tensions électriques continues de faible niveau (jusqu’à 1 ou 2 V). De même, à la suite de frottements, des charges électrostatiques s’accumulent sur des matériaux isolants (courroies isolantes, tapis roulants, etc.).

La qualité de la mise à la terre est la clé de la conformité de l’installation électrique

Les champs électromagnétiques générés par les équipements ou les réseaux (RTE, SNCF, télécommunications) proches de l’élevage peuvent également interférer avec les structures métalliques d’une exploitation. Deux types de couplage peuvent survenir. Le couplage inductif a pour source un champ magnétique. Il induit des tensions et des courants dans les structures métalliques qui forment une boucle (clôture) et fonctionnent alors comme une antenne. Le couplage capacitif est généré par un champ électrique. Il provoque une migration des charges électriques à la surface de conducteurs isolés du sol. La migration des charges vers le sol est réalisée via le corps de l’animal, lorsque celui-ci entre en contact avec le conducteur.

La qualité de la mise à la terre de l’appareillage, ainsi que celle des protections différentielles et de l’isolement des câblages, sont les fondamentaux de la conformité réglementaire de toute installation électrique intérieure. Mais la mise à la terre des masses métalliques importantes (hangars, barrières, logettes, abreuvoirs), ainsi que l’équipotentialité, sont des exigences réglementaires⁽¹⁾ supplémentaires des locaux qui abritent des animaux. Ce que l’animal touche avec son museau doit être à la même tension que ce qu’il touche avec ses pattes. Pour cela, toutes les masses et tous les éléments conducteurs touchés par les animaux doivent être interconnectés. Une boucle équipotentielle en fond de fouille peut être réalisée en utilisant le ferraillage du béton du sol (et en le reliant aux équipements métalliques interconnectés entre eux).

Le diagnostic électrique, affaire des spécialistes, est complexe à réaliser en élevage en raison de la nature et de l’imprévisibilité du signal électrique. Il commence par la vérification du fonctionnement des protections différentielles, la conformité des circuits de terre, la qualité de la prise de terre et de l’équipotentialité des masses métalliques. Il peut alors être nécessaire de mesurer les tensions de pas et de contact dans les zones fréquentées par les animaux qui présentent des masses métalliques, ou selon les observations faites par l’éleveur. Ces mesures restent toutefois difficiles à interpréter dans la mesure où il n’existe pas encore de référentiel en France.

• (1) L’article 705-415-2 de la norme NF C 15-100, norme étalon en termes de sécurité électrique, impose une liaison équipotentielle supplémentaire pour les locaux où se trouvent des animaux. Le Code du travail contraint également, depuis le 4 août 1992, tout nouveau bâtiment destiné à abriter des lieux de travail (dont les installations agricoles) d’être équipé d’une boucle équipotentielle en fond de fouille.