Deux scénarios se présentent devant la profession - La Semaine Vétérinaire n° 1417 du 17/09/2010
La Semaine Vétérinaire n° 1417 du 17/09/2010

Tendances. Enquête de branche

Actualité

Auteur(s) : Marine Neveux

Le premier est celui d’une évolution en pente douce, dans un contexte fragilisé. Le second est celui de changements annoncés, non maîtrisés, source de transformations fortes.

Scénario 1 ou scénario 2 ? Chaque vétérinaire est libre de choisir son propre film. Mais en tout état de cause, une première esquisse est proposée par le cabinet Pollen Conseil, à l’issue d’une enquête de branche présentée le 9 septembre dernier à la presse. Son objectif ? Réaliser le portrait du vétérinaire sous l’angle de l’emploi et de la formation et engager une réflexion prospective. Mais attention, les scénarios avancés sont à visée « pédagogique » et « sans ambition prévisionnelle », modère le consultant Christophe Jeammot (Pollen Conseil). Les mises en scène possibles sont en effet multiples. De cette enquête, plusieurs tendances et quelques points précis ont été extraits. Pas de révélations, mais une occasion de poursuivre la réflexion sur l’avenir de la profession et l’ambition de dresser un bilan actualisé de la branche vétérinaire.

Le salariat continue sa progression, et pas que chez les vétérinaires

Il y avait 4 762 entreprises vétérinaires libérales avec des salariés en 2009, versus 4 334 en 2005, selon les données de l’Organisme paritaire collecteur agréé des professions libérales (Opca-PL). Cela représente une progression de 9,8 %. Mais la répartition montre une augmentation du nombre de cliniques avec seulement un ou deux salariés (voir graphique 1). Ce constat est « surprenant, car ce n’est pas la perception que l’on avait face à l’évolution des structures vers de plus en plus de collaborateurs », estime Christophe Jeammot. L’enquête ne distingue toutefois pas les salariés vétérinaires des non-vétérinaires.

Plusieurs divergences statistiques ont en outre été notées au cours de l’enquête : « Sur une longue période, on constate une croissance du nombre de collaborateurs et de salariés par structure », alors que « sur une courte période, on constate une hausse du nombre de vétérinaires exerçant dans les grosses structures (selon l’Annuaire Roy 2010) ». A court terme, il est également observé « une augmentation des structures, dont les petites, et de leur nombre relatif de salariés ». Christophe Jeammot s’est donc interrogé sur un éventuel biais statistique qui “cacherait” une évolution de statut du salariat vers le statut libéral, ou un début d’arbitrage entre les auxiliaires et les vétérinaires libéraux en faveur de ces derniers, ou encore sur une évolution socio-économique, etc. Si le consultant reconnaît un « développement assez rapide du salariat des vétérinaires » (4 021 praticiens salariés en 2009 selon l’Ordre), il constate aussi le « succès du statut de collaborateur libéral qui offre une alternative » (actuellement près d’une centaine de collaborateurs libéraux).

Cette tendance au développement du salariat n’est pas propre à la profession vétérinaire. « Nous voyons des pharmaciens qui restent adjoints toute leur vie et ne s’installent plus », témoigne Roger Hallegouët, vice-président de l’Opca-PL.

Une pléthorede vétérinaires et des auxiliaires en quête de reconnaissance

« Une donnée importante concernant la profession est l’impact de l’Europe. 40 % de nouveaux diplômés exercent en France et la plupart sont des Français qui ont fait leurs études à l’étranger. » Si la Belgique est en tête pour la formation des vétérinaires formés à l’étranger qui exercent en France, le contexte européen a également un impact sur d’autres professions. Et Roger Hallegouët de citer la tendance actuelle des pharmaciens roumains.

Par ailleurs, entre 2008 et 2009, le solde net positif de vétérinaires était de 663 praticiens, soit une hausse de 5 %. « C’est énorme, on se dit que le chiffre d’affaires de l’activité vétérinaire n’augmente pas autant annuellement », commente Christophe Jeammot. Cela peut donc avoir des conséquences négatives. Entre 1998 et 2009, ce solde net positif était de 2 790 vétérinaires (soit + 20 %). « La pléthore de vétérinaires ne favorise pas l’embauche des auxiliaires. En effet, la tendance est à la non-délégation afin de conserver une place pour les nombreux vétérinaires diplômés à venir. »

L’enquête soulève aussi des questions déjà abordées par la profession (les vétérinaires ne sont pas formés à être chefs d’entreprise, etc.). Le développement de réseaux de cliniques pourrait toutefois changer l’organisation des équipes et faire émerger de nouvelles fonctions pour les auxiliaires. Les salariés non vétérinaires représentent en effet un effectif important au sein des structures : ils sont 14 609 selon les chiffres de l’AG2R de 2008 (sans prise en compte du temps de travail).

Un certain nombre d’auxiliaires « quittent le métier après quelques années d’exercice en raison d’une usure ou d’aspirations auxquelles ne peut répondre leur emploi ». « Il faudrait envisager de leur apporter une réponse, notamment via une employabilité croisée intersectorielle », estime Christophe Jeammot. Est donc aussi soulevée la question de la formation des salariés, mais aussi de la reconnaissance, un point auquel est particulièrement attachée Barbara Binder, de la Confédération française démocratique du travail (CFDT). Elle estime en effet que la voix des salariés, entre autres des auxiliaires, est actuellement peu entendue, en raison notamment de l’absence de syndicat pour les représenter. « Nous venons de réaliser une enquête auprès des petites entreprises : il existe une forte attente des salariés, un besoin de reconnaissance de leurs compétences », ajoute un autre représentant de la CFDT. « Tout ce qui conduira à de nouveaux métiers mènera à de nouvelles reconnaissances, mais pour l’instant, nous n’en sommes qu’à la phase de réflexion », souligne notre confrère Bruno Pelletier (SNVEL et OMPL).

Réflexion autour des deux scénarios issus de l’enquête

Selon le scénario 1, c’est donc une évolution en pente douce qui attend la profession, dans un contexte fragilisé. Il n’y a pas de raison de penser qu’une embellie est à venir, il existe donc une nécessité de respecter des règles de bonnes pratiques économiques dans un contexte peu porteur. Plusieurs pistes peuvent alors être suivies, par exemple au niveau des auxiliaires avec le développement d’un savoir administratif, une dimension commerciale à affirmer, etc. Il faudrait aussi communiquer davantage sur les moyens de reconnaissance de leur formation, sur les outils de la mobilité, miser sur la formation continue, etc. Ce scénario nécessiterait en outre un renforcement des compétences vétérinaires à manager les organisations. « Nous ne sommes pas dans une logique de spécialisation, mais de polyvalence », souligne Christophe Jeammot. En outre, « le parcours de réorientation des praticiens sera peut-être, demain, l’un des grands enjeux de la profession ».

Selon le scénario 2, des évolutions sont annoncées, mais non maîtrisées, et elles sont une source potentielle de fortes transformations de la profession (directive “services”, délégation d’actes, perte de la délivrance du médicament, chaînes de cliniques, apparition de nouveaux intervenants, etc.). Pour autant, « nous estimons raisonnable de penser que l’exercice traditionnel va perdurer ». « Les vétérinaires innoveront et penseront à de nouvelles fonctions. Ce n’est pas parce qu’il existera des enseignes lowcost qu’elles bouleverseront les choses. Cela va certes avoir un impact, mais il va falloir passer du stade réactif à la phase proactive ! », conclut Christophe Jeammot.

Alors, il vous revient de décider quel acteur vous serez dans la suite du film à venir…

  • Voir aussi le dossier dans La Semaine Vétérinaire n° 1414 du 27/8/2010 en pages 18-21.

L’enquête en bref

Cette enquête de branche a été initiée par l’Observatoire des métiers des professions libérales (OMPL) et pilotée par le groupe technique de la Commission paritaire nationale de l’emploi et de la formation professionnelles (CPNEFP) des cabinets vétérinaires. Nos confrères Bruno Pelletier, administrateur de l’OMPL (secteur santé), et Claude Laugier, vice-président du SNVEL et représentant la CPNEFP, y ont participé. L’enquête recense les différentes sources statistiques déjà disponibles. Des entretiens ont également été menés.

M. N.

Quels employeurs ?

L’âge moyen des employeurs vétérinaires est de 48,3 ans. 76 % sont des hommes (voir graphique 2), mais la féminisation est en train de modifier la tendance. « Dans la catégorie des moins de 30 ans, pour la première fois, les femmes sont les employeurs majoritaires », constate Christophe Jeammot. Elles ne représentaient qu’un cinquième des employeurs en 2002, mais déjà un quart en 2007 : une évolution significative sur une population vétérinaire inscrite à l’Ordre composée de 60 % d’hommes et de 40 % de femmes.

M. N.
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