Les différents rôles de l’aldostérone sont décryptés

L’aldostérone agit au niveau du tube collecteur du rein pour réguler la balance sodium/potassium, la volémie et la pression artérielle sous l’effet de la déplétion sodée (via la rénine et l’angiotensine II). Selon Frédéric Jaisser (Institut national de la santé et de la recherche médicale), le récepteur aux minéralocorticoïdes a cependant été identifié dans d’autres organes (cœur, vaisseaux, tissu adipeux, cerveau, peau).

Au début des années 90, un effet profibrotique cardiaque de l’aldostérone est découvert. Le récepteur aux minéralocorticoïdes est activé à la fois par les glucocorticoïdes et par l’aldostérone. Dans le rein, un mécanisme de sélectivité, l’enzyme 11HSD2, permet d’abaisser localement le taux intracellulaire de glucocorticoïdes efficaces. Elle n’est cependant pas exprimée dans le myocarde. Les effets délétères de l’aldostérone au niveau cardiaque seraient ainsi dus à l’activation du récepteur aux minéralocorticoïdes par le cortisol et l’aldostérone.

Le remodelage cardiaque aboutit à terme à une décompensation cardiaque

Claude Delcayre (Centre national de la recherche scientifique) s’est intéressé aux causes, aux mécanismes et aux conséquences du remodelage cardiovasculaire. Il s’agit d’un processus physiologique d’adaptation à l’environnement, mais souvent associé à des conditions pathologiques (hypertension artérielle, infarctus du myocarde, cardiomyopathies). Le remodelage est à la fois cellulaire (hypertrophie des cardiomyocytes, prolifération des fibroblastes) et extracellulaire (croissance de la matrice extracellulaire). Il conduit à une fibroseinterstitielle et vasculaire. Ses conséquences sont délétères, avec une diminution de la compliance myocardique et une augmentation des arythmies (car le collagène est électro-résistant), ainsi que de l’anoxie des cardiomyocytes (éloignement des capillaires). Le remodelage cardiaque aboutit, à terme, à une décompensation cardiaque.

Frédéric Jaisser a présenté le modèle de coincidence, selon lequel l’activation seule du récepteur aux minéralocorticoïdes ne suffit pas à expliquer son effet délétère. D’autres mécanismes interviendraient concomitamment, par l’intermédiaire de l’activation d’autres gènes. La recherche des éventuels gènes surexprimés est ainsi une perspective d’avenir, afin de pouvoir mettre en place une thérapie ciblée.

De nombreux marqueurs de souffrance cardiaque sont recensés

Faiez Zannad (Inserm) a proposé un aperçu des connaissances actuelles sur les biomarqueurs cardiaques. Le BNP (peptide natriurétique de type B) constituerait une aide au diagnostic de l’insuffisance cardiaque. Il apporterait des éléments pronostiques, car sa concentration sanguine augmente significativement avant la phase de décompensation. Les troponines cardiaques constituent des marqueurs de choix d’atteinte et de nécrose du myocarde et un prédicateur de mortalité due à l’insuffisance cardiaque. Les biomarqueurs de formation/dégradation du collagène, témoins du remodelage cardiaque par la modification de la matrice extracellulaire, peuvent être utilisés pour la détection précoce de l’insuffisance cardiaque chez l’homme. Leur développement en médecine vétérinaire offrirait d’intéressantes perspectives d’avenir.

La spironolactone présenterait des effets sur le remodelage cardiaque

La spironolactone est un antagoniste du récepteur aux minéralocorticoïdes. De nombreuses études cliniques, menées chez l’homme et sur des modèles animaux, ont montré son efficacité, avec une amélioration de la morbi-mortalité lors d’insuffisance cardiaque sévère (étude Rales, 1999).Les mécanismes sous-jacents, encore mal connus, incluent une diminution du remodelage cardiaque, des arythmies et de l’inflammation.

Notre consœur Emilie Guillot (responsable technique internationale en cardiologie, Ceva) a présenté les résultats d’une étude qui vise à évaluer l’effet de la spironolactone sur le risque de mortalité cardiaque lors de maladie valvulaire mitrale dégénérative, par rapport à un placebo. Cette étude multicentrique prospective, menée en double aveugle, inclut deux cent vingt et un chiens. Tous ont reçu un inhibiteur de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (IECA). Les vétérinaires pouvaient utiliser ou non le furosémide et la digoxine et/ou la L-carnitine. Les chiens ont reçu soit de la spironolactone (2 mg/kg une fois par jour pendant le repas), soit le placebo. Les animaux exclus de l’étude sont ceux qui recevaient des médicaments cardiaques autres que IECA, furosémide, digoxine et L-carnitine, ou qui présentaient un œdème pulmonaire aigu, une maladie congénitale cardiaque ou une arythmie mettant en jeu leur survie. Les résultats, après quinze mois de traitement, montrent une réduction de 69 % de la mortalité pour cause cardiaque par rapport au traitement standard seul, avec une bonne tolérance et sans effets secondaires particuliers.

De nombreux travaux de recherche sur les récepteurs aux minéralocorticoïdes restent à mener, car ces derniers pourraient également être impliqués dans d’autres affections (rénales, métaboliques, oculaires, etc.).