L’évaluation comportementale des chiens dangereux et mordeurs est décortiquée - La Semaine Vétérinaire n° 1406 du 21/05/2010
La Semaine Vétérinaire n° 1406 du 21/05/2010

Législation. Enseignement postuniversitaire à Alfort

Actualité

Auteur(s) : Marine Neveux

Le vétérinaire évaluateur ne doit affirmer que des faits dont il a, par lui-même, vérifié la véracité.

Evaluations comportementales, diagnoses, responsabilités du vétérinaire, notion de risque, etc., sont autant de notions souvent délicates à manier. Une complexité renforcée par les multiples incohérences des textes législatifs qui ont été bâtis en capilotade depuis plus de dix ans sur les chiens dits “dangereux”. « Dans tous les cas, le dernier mot revient au juge », a prévenu Christian Diaz, le 17 mai dernier, lors d’un enseignement postuniversitaire sur l’évaluation comportementale organisé à l’école d’Alfort.

Notre confrère, président de l’Association francophone des vétérinaires praticiens de l’expertise (AFVE), et Christine Debove, du conseil régional de l’Ordre d’Ile-de-France, ont effectué un tour d’horizon particulièrement pratique et interactif avec les confrères présents, tant les questions diffèrent selon les situations auxquelles chacun a pu être confronté. L’auditoire se composait d’ailleurs aussi bien de vétérinaires ayant déjà suivi une première formation et désireux d’approfondir leur approche, que de ceux qui voulaient se lancer dans l’évaluation comportementale.

Beaucoup d’exemples concrets, de diagnoses, d’analyses de cas

« Dans le doute, mieux vaux ne pas s’abstenir ! », a souligné Christian Diaz. En effet, en consultation, il est prudent d’informer le client quand son chien présente un danger et de proposer, par écrit, que l’animal passe une consultation comportementale, par exemple. Il convient de prendre des précautions, dans un contexte sociétal où la notion de risque est en perpétuelle évolution : « Nous sommes tenus à un secret professionnel qui est moins absolu que le secret médical. Mais si ce secret est à l’origine d’un événement grave, le praticien peut être impliqué, sur le motif d’une perte de chance. Ce n’est pas encore arrivé, mais méfions-nous du principe de précaution. »

La déclaration des morsures concerne n’importe quel professionnel

Selon l’article L.211-14-2 du Code rural, « tout fait de morsure d’une personne par un chien est déclaré par son propriétaire ou son détenteur ou par tout professionnel en ayant connaissance dans l’exercice de ses fonctions à la mairie de la commune de résidence du propriétaire ou du détenteur de l’animal ». « Tout professionnel » est impliqué, ce qui veut dire qu’un médecin, par exemple, qui a connaissance d’une morsure, doit également la déclarer. Une obligation trop souvent ignorée…

« Dans la majorité des cas, les propriétaires ne sont pas d’accord pour déclarer une morsure due à leur chien, constate Christine Debove. Il faut effectuer les choses dans les règles et leur expliquer aussi que, si le chien vient à mordre de nouveau, ils s’exposent à des risques. L’objectif est de les convaincre que c’est pour le bien de tous. » Notre consœur met en outre à disposition des clients, dans sa salle de consultation, une information sur les morsures.

Quelle serait la sanction vis-à-vis d’un professionnel qui omettrait de déclarer une morsure ? « Il pourra lui être reproché la perte de chance d’éviter un sinistre par manquement d’une obligation de déclaration légale », a répondu Christian Diaz. En outre, en cas de mise sous surveillance du chien mordeur, il faut toujours faire la déclaration.

Le risque de dangerosité est évalué sur une échelle de quatre niveaux

L’évaluation comportementale, définie dans le décret du 10 novembre 2008, est réalisée dans le cadre d’une consultation vétérinaire et a pour objet d’apprécier le danger potentiel que peut représenter un chien. Quatre niveaux de risque de dangerosité sont définis. L’évaluation ne relève pas du mandat sanitaire, mais de la sécurité publique. Ainsi, les avis de l’administration, dans un cadre de contrat de droit privé, sont dénués d’effet contraignant ou protecteur. Le vétérinaire sanitaire effectue donc la mise sous surveillance de l’animal mordeur, déclare la morsure et informe le détenteur de ses obligations. Le vétérinaire évaluateur, lui, s’inscrit sur une liste départementale, évalue les chiens, hors du mandat sanitaire. Ses deux qualités essentielles sont l’indépendance et la compétence.

Le vétérinaire donne un avis à partir de critères objectifs

« S’il y a un domaine où l’incertitude et l’incohérence font loi, c’est celui des diagnoses », constate Christian Diaz. En effet, les chiens de première catégorie ne sont pas inscrits à un livre généalogique reconnu par le ministère de l’Agriculture. Ils sont définis par des critères morphologiques qui ne concernent que les adultes (définis dans une annexe). « La diagnose de catégorie doit consister à donner des faits, le vétérinaire ne prend pas la décision à la place du client », a souligné Christian Diaz. Par exemple, certains propriétaires préfèrent déclarer leur animal dans telle catégorie, même s’ils peuvent l’en sortir, pour éviter toute tracasserie au quotidien avec les pouvoirs publics. Le vétérinaire précisera alors que le chien ne présente pas les caractéristiques de cette catégorie puis, si le propriétaire persiste et veut le déclarer, ce choix lui revient.

Dans un autre cas de figure, mieux vaut éviter, par exemple, de classer trop hâtivement un chien dans une catégorie : « Si vous faites perdre une chance à un chien de ne pas subir toute la cascade d’un animal catégorisé, le propriétaire peut vous attaquer pour perte de chance. »

Il convient aussi de ne pas “catégoriser” un chiot d’emblée : même s’il s’agit d’un croisé american staffordshire terrier, il est recommandé d’opter pour l’inscription « race indéterminée ». C’est seulement la diagnose ultérieure qui permettra de trancher s’il est à classer dans une catégorie ou pas. Les affirmations du propriétaire, qui certifie par exemple que son chien est un croisé de tel type, sont également à prendre avec prudence : le vétérinaire ne doit affirmer que des choses dont il a vérifié la véracité.

  • Pour en savoir plus, voir le hors série « L’évaluation comportementale, guide pratique et juridique », paru avec le n° 1374 de La Semaine Vétérinaire du 2/10/2009.

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