L’administration livre un vade-mecum “explicatif” - La Semaine Vétérinaire n° 1397 du 19/03/2010
La Semaine Vétérinaire n° 1397 du 19/03/2010

Chiens dangereux. Décryptage de la circulaire du 17 février 2010

Actualité

Auteur(s) : Christian Diaz

Evaluation, permis de détention, etc. : une circulaire détaille les principales modalités d’application des lois sur les chiens dangereux.

« Guide de méthodologie » pour l’application des lois sur les chiens dits “dangereux”. Cette qualification est utilisée dans une circulaire du 17 février, qui détaille les modalités de leur mise en œuvre. Une qualification abusive, car aucune circulaire administrative ne peut légitimement prétendre régir l’évaluation comportementale, procédure de droit strictement privée confiée, par la loi, aux seuls vétérinaires. Même s’ils en ont connaissance et la mettent en application, les praticiens doivent être conscients que cette circulaire est dénuée de pouvoir contraignant ou protecteur dans le cadre de leur exercice(1).

Le mythe des chiens dangereux est une nouvelle fois rabâché

« La multiplication des chiens dangereux » est à l’origine de la loi du 6 janvier 1999 et des suivantes, jusqu’à celle du 20 juin 2008, précise le texte en introduction. Or cette multiplication relève du mythe entretenu par les médias et les politiques, comme le montre l’étude des statistiques(1). Ainsi, depuis 1984, quarante décès dus à des chiens sont recensés sur le territoire. Dix-sept sont le fait de chiens de race berger allemand ou apparentés, un seul d’un chien de première catégorie, de type pitbull. Les chiens sont ainsi responsables de quinze fois moins de décès que les accidents de chasse et deux cent cinquante fois moins que les noyades.

En outre, citer la loi de 1999 comme un frein à la multiplication des chiens dangereux revient à faire une interprétation erronée des statistiques de la cynophilie. Par exemple, le nombre de naissances de chiens de race american stafforshire terrier, confidentielle en 1997, a été multiplié par sept par la “grâce” de la loi du 6 janvier 1999.

Des incohérences concernant l’évaluation comportementale

En matière d’évaluation comportementale, « les frais d’évaluation sont à la charge du propriétaire du chien », stipule le Code rural (article L 211-14-1) et non du propriétaire ou du détenteur, comme le dit la circulaire.

La loi du 20 juin 2008 (article 17) prévoyait des dispositions spécifiques pour les propriétaires de chiens concernés à la date de la publication de la loi, c’est-à-dire le 21 juin. Ils devaient être évalués dans les six mois pour ceux de première catégorie et dans les dix-huit mois pour ceux de deuxième catégorie, le permis de détention devant être obtenu avant le 31 décembre 2009. Mais la circulaire considère que ces mesures s’appliquent aux chiens âgés de plus de douze mois à la date du décret qui précise certains points de l’évaluation. Une telle interprétation reviendrait à appliquer l’obligation de l’évaluation à tous les chiens de moins de douze mois au 10 novembre 2008. Cette évaluation concernant tous les chiens de huit à douze mois, quelle que soit leur catégorie, il ne serait resté qu’un mois pour la mise en conformité de ceux de onze mois au 10 novembre, ce qui, bien entendu, n’est pas conforme à la loi du 20 juin 2008. Fort heureusement, cette circulaire, qui impose l’évaluation à bon nombre de chiens dès le mois de novembre 2008, n’a été diffusée que cette année.

Par ailleurs, la circulaire reprend les dispositions d’une précédente (du 22 octobre 2007) qui crée les sapiteurs en évaluation comportementale. Cette notion a entraîné une grande confusion. Inventé par une circulaire administrative qui n’en précisait pas la définition, le sapiteur (défini par le Code de procédure civile) est un technicien spécialisé dans une discipline différente de celle de l’expert désigné. Il en résulte deux conséquences :

– un sapiteur n’existe que dans une expertise (en octobre 2007, l’évaluation comportementale était considérée comme une expertise médico-légale, en particulier par les responsables syndicaux) ;

– un sapiteur ne peut pas réaliser la mission à la place de l’expert.

Aucune de ces conséquences n’a été saisie par les rédacteurs et les inspirateurs de la circulaire d’où, notamment, la création d’un certificat de sapiteur, délivré après une formation sans prérequis.

La circulaire précise également les conditions à remplir pour détenir un chien dit dangereux.

Les juges devront probablement se prononcer sur les notions de formateurs habilités à délivrer la formation et de formateurs agréés en éducation canine, aptes à délivrer l’équivalence de cette attestation aux détenteurs ayant pris l’engagement d’un suivi éducatif avant le 2 mai 2009. La circulaire semble les confondre. Dans ce cas, pourquoi le législateur a-t-il fait la distinction ?

En matière de permis de détention, elle précise enfin qu’il se substitue à la déclaration en mairie. Certains maires persistent à exiger cette déclaration (qui n’existe plus légalement depuis le 21 juin 2008), voire refusent d’enregistrer les chiens de première catégorie nés après la loi du 6 janvier 1999.

Le texte se penche aussi sur le cas particulier du détenteur temporaire, un point qui a suscité de nombreuses protestations des professionnels du chien. En effet, selon une interprétation antérieure, le conjoint au contact de l’animal n’était pas considéré comme un détenteur temporaire exonéré des obligations liées au permis de détention. Il devait donc également être titulaire d’un permis. Or la loi précise bien que ce dernier est exigible du propriétaire ou du détenteur, et pas de tous les détenteurs. Devant l’illégalité manifeste de cette disposition, et pour éviter qu’elle ne soit désavouée par les juges, le rédacteur de la circulaire a revu sa copie dans l’urgence et corrigé cette erreur d’interprétation.

Les préfets doivent assurer leur rôle de relais de l’information

Avec cette circulaire du 17 février, les maires sont maintenant censés disposer d’un vade-mecum qui détaille les principales modalités d’application des lois sur les chiens dangereux. Encore faut-il que les préfets, seuls destinataires officiels de ce texte, jouent leur rôle de relais d’information vers les principaux responsables de l’application de ces mesures.

A l’avenir, les magistrats administratifs auront à se prononcer sur la légalité des décisions par rapport à l’interprétation administrative des dispositions législatives et réglementaires. Cela alors même que des mesures similaires adoptées auparavant dans des pays voisins sont officiellement considérées comme inefficaces pour lutter contre le danger que représente la gent canine.

  • (1) Des précisions sur les circulaires dans le droit et des statistiques plus détaillées sur les chiens mordeurs et les inscriptions au LOF sont disponibles sur WK-Vet.fr (rubrique “Semaine Vétérinaire” puis “Compléments d’articles”).

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