L’analgésie doit être soignée chez les Nac - La Semaine Vétérinaire n° 1393 du 19/02/2010
La Semaine Vétérinaire n° 1393 du 19/02/2010

Anesthésiologie des rongeurs et des lagomorphes

Formation continue

FAUNE SAUVAGE ET NAC

Auteur(s) : Julie Brackman

Ces animaux de compagnie ont une sensibilité accrue à la douleur.

L’anesthésie des rongeurs et des lagomorphes est délicate, en raison de leur sensibilité au stress et à la douleur. Herbivores, leur fonction digestive peut être altérée par l’anesthésie. De petite taille, ils sont sujets à l’hypothermie, mais aussi à l’hyperthermie. Leur volume thoracique étant réduit par rapport à la masse corporelle, leur ventilation doit être facilitée. Ils ont des besoins accrus en fluides (le besoin d’entretien s’élève à 100 ml/kg/j). A travers quatre cas cliniques, notre confrère Minh Huynh propose quatre protocoles selon le type d’intervention.

Cas 1 : procédure peu invasive

Un lapin mâle de trois ans, suspect de problèmes dentaires, doit être tranquillisé pour réaliser une radiographie. Le protocole proposé est l’association de butorphanol (0,5 mg/kg) et de midazolam (0,5 mg/kg). Le premier permet une bonne sédation (mais une faible valence analgésique) et le second une bonne relaxation musculaire. La radiographie confirme la nécessité d’un parage dentaire, donc d’une anesthésie associée à une analgésie plus poussée. La buprénorphine est contre-indiquée en association avec le butorphanol. En revanche, le méloxicam peut êtreadministré, associéàune anesthésie locale, à raison de 1 ml de lidocaïne diluée au dixième au niveau du foramen infra-orbitaire. Après une préoxygénation, l’induction est effectuée au masque, avec de l’isoflurane (2 à 3 %).

A l’arrêt de l’isoflurane, il convient de fournir à l’animal de l’oxygène à volonté, car il est sensible à l’hypoxémie. Il est réhydraté par voie sous-cutanée (besoins d’entretien)? et hospitalisé jusqu’à un réveil complet.

• Complication possible : si l’animal se réveille, plutôt que d’augmenter l’isoflurane ou de renforcer l’analgésie, notre confrère conseille d’accroître d’abord le débit d’oxygène, afin de forcer le passage de l’isoflurane. Ce protocole est adapté aux procédures peu invasives : sondage du canal lacrymal, pose de cathéter, radiographie, examen dentaire, petite plaie, etc.

Cas 2 : chirurgie de convenance

Une lapine d’un an et demi, en bonne santé, est anesthésiée en vue d’une stérilisation. Le protocole proposé est une association de médétomidine (0,2 mg/kg) et de kétamine (5 mg/kg). Pour compléter l’analgésie, le méloxicam est employé, éventuellement associé à de la buprénorphine (0,03 mg/kg).

Minh Huynh recommande une diète préopératoire de quelques heures et un lavage de la bouche pour éviter les fausses déglutitions. Il conseille de mettre l’animal au calme, dans le noir, avant l’induction, et d’injecter le méloxicam et la buprénorphine également au préalable. Si le lapin est docile, il est aussi possible de le tondre, afin de réduire la durée de l’anesthésie (« Attention, une tonte trop large favorise l’hypothermie ! »).

Un cathéter peut être posé à l’oreille sur la veine marginale. Il est aussi possible de choisir la veine céphalique ou de positionner un cathéter intra-osseux dans le tibia. Pour un bilan préanesthésique, quelques millilitres de sang peuvent être prélevés par cette voie. Une fois induit, de l’oxygène est fourni par un masque.

A la fin de l’intervention, de l’atipamézole est injecté, pour réverser l’anesthésie. Il convient de toujours donner de l’oxygène à volonté, des fluides, et de gérer la douleur. De la nourriture est laissée à disposition. Si aucune prise alimentaire spontanée n’a lieu dans les trois heures qui suivent l’intervention, un gavage est requis.

• Complications possibles : en cas d’apnée lors de l’induction, le débit d’oxygène est diminué pour favoriser l’accumulation de dioxyde de carbone dans les alvéoles et stimuler les récepteurs de la respiration. En cas d’échec, une petite dose d’atipamézole sera injectée (Antisedan®, la moitié du volume de Domitor® administré) en ajoutant de l’isoflurane au protocole. Cette injection réverse en partie les effets anesthésiques de la médétomidine, mais également la valence analgésique. Un bolus de buprénorphine (0,02 mg/kg) par voie intraveineuse permet de compenser pendant les temps chirurgicaux les plus douloureux.

Ce protocole est adapté aux interventions de convenance, mais il peut aussi être utilisé, par exemple, en orthopédie chez un animal sain. En raison de son caractère hypotenseur, il est nécessaire de prêter une attention particulière aux fluides.

Cas 3 : anesthésie chirurgicale fixe

Une rate de deux ans, pesant 600 g, doit être opérée d’une tumeur mammaire. Aucun appareil d’anesthésie gazeuse n’est disponible. Le protocole proposé consiste en de la médétomidine (0,2 mg/kg) et de la kétamine (50 mg/kg). L’analgésie est complétée par du méloxicam, éventuellement de la buprénorphine. Chez le rat, une diète préopératoire de quelques heures est aussi recommandée, ainsi qu’un rinçage de la bouche. Chez toutes les espèces de petite taille, il faut veiller à ne pas provoquer d’hyperthermie en voulant réchauffer l’animal. Une fois l’intervention terminée, de l’atipamézole est administrée.

• Complications possibles : en cas de réveil lent, il convient de corriger l’hypothermie en réchauffant l’animal avec un sèche-cheveux, ainsi que l’hypoglycémie et l’hypovolémie par une injection de fluides glucosés (10 à 15 ml par voie sous-cutanée).

Cas 4 : anesthésie chirurgicale d’un animal dont l’état général est mauvais

Une lapine de sept ans présente une masse utérine. Une voie veineuse est posée et un bilan préanesthésique est préconisé (urée, créatinine, protéines totales, hématocrite ; les paramètres hépatiques sont peu utiles). Le protocole proposé est l’association de midazolam et de kétamine par voie intraveineuse. L’animal est intubé. L’intubation permet d’installer un capnographe pour la surveillance anesthésique et d’assurer une ventilation adéquate. D’autres moyens sont évoqués (auscultation, sonde Doppler). L’accès à une voie veineuse et respiratoire est primordial dans les anesthésies dites à risque.

CONFÉRENCIER

Minh Huynh, membre du Royal College of Veterinary Surgeon (RCVS), résident de l’European College of Zoological Medicine à Swindon (Grande-Bretagne).

Article rédigé d’après la conférence « Anesthésie et réanimation des Nac », présentée lors d’une formation organisée par l’Afvac Ile-de-France, en janvier 2010.

Formations e-Learning

Nouveau : Découvrez le premier module
e-Learning du PointVétérinaire.fr sur le thème « L’Épanchement thoracique dans tous ses états »

En savoir plus

Boutique

L’ouvrage ECG du chien et du chat - Diagnostic des arythmies s’engage à fournir à l’étudiant débutant ou au spécialiste en cardiologie une approche pratique du diagnostic électrocardiographique, ainsi que des connaissances approfondies, afin de leur permettre un réel apprentissage dans ce domaine qui a intrigué les praticiens pendant plus d’un siècle. L’association des différentes expériences des auteurs donne de la consistance à l’abord de l’interprétation des tracés ECG effectués chez le chien et le chat.

En savoir plus sur cette nouveauté
Découvrir la boutique du Point Vétérinaire

Agenda des formations

Calendrier des formations pour les vétérinaires et auxiliaires vétérinaires

Retrouvez les différentes formations, évènements, congrès qui seront organisés dans les mois à venir. Vous pouvez cibler votre recherche par date, domaine d'activité, ou situation géographique.

En savoir plus


Inscrivez-vous gratuitement à nos Newsletters

Recevez tous les jours nos actualités, comme plus de 170 000 acteurs du monde vétérinaire.

Vidéo : Comment s'inscrire aux lettres d'informations du Point Vétérinaire

Retrouvez-nous sur
Abonné à La Semaine Vétérinaire, retrouvez
votre revue dans l'application Le Point Vétérinaire.fr