Ce que vous avez toujours voulu savoir sur la vie sexuelle des abeilles sans oser le demander… - La Semaine Vétérinaire n° 1388 du 15/01/2010
La Semaine Vétérinaire n° 1388 du 15/01/2010

Filière apicole

Formation continue

FILIÈRES

Auteur(s) : Nicolas Vidal-Naquet

Après un vol nuptial ou deux, une reine vierge s’accouple avec dix à quinze faux bourdons, puis sa vie est consacrée à la ponte. Elle peut pondre jusqu’à deux mille œufs par jour, sa vie durant (un à cinq ans).

Une colonie d’abeilles est une unité à part entière. L’une des caractéristiques de sa biologie est la reproduction assurée par une seule femelle, la reine. Il n’y en a qu’une par colonie et les ouvrières qui composent cette dernière sont toutes sœurs ou demi-sœurs. Ces ouvrières sont des femelles qui accomplissent les fonctions nécessaires au développement et à la survie de la colonie. Leurs organes sexuels sont atrophiés. Les mâles, eux, n’ont qu’un rôle connu : féconder la reine.

Deux paires de chromosomes pour les femelles, une seule pour les mâles

Les individus du genre Apis sont caractérisés par une diploïdie des femelles et une haploïdie des mâles. Les femelles possèdent deux fois seize chromosomes et les mâles une seule paire de seize chromosomes. Chez l’abeille, il n’existe aucun hétérochromosome (chromosome sexuel), mais des allèles sexuels.

La fécondation de l’œuf donne naissance à des femelles, soit des ouvrières, soit des reines. Les mâles, eux, sont issus d’un processus de parthénogenèse, l’œuf pondu par la reine n’ayant pas été fécondé. Il peut exister des mâles diploïdes lorsque la fécondation entraîne la formation d’un œuf homozygote, mais ils seront reconnus et éliminés par les ouvrières nourrices.

La reine vierge peut s’accoupler du 6e au 30e jour après son émergence

La femelle reproductrice de la colonie est appelée la reine. A tort, car son unique fonction est d’être la mère des abeilles de la colonie. Si plusieurs cellules royales sont élevées en même temps, la première reine née tue ses “sœurs reines” ou produit un son, appelé “chant des reines”, pour les empêcher de sortir de leurs cellules royales.

La morphologie de la reine est adaptée à sa fonction reproductrice. Elle présente ainsi un abdomen particulièrement développé, notamment en période de reproduction, deux ovaires hypertrophiés qui occupent une grande partie du volume de l’abdomen, reliés à la chambre vaginale par un oviducte, ainsi qu’une spermathèque qui est une caractéristique fondamentale de la reine. Elle recueille le sperme des différents mâles qui s’accouplent avec elle lors du seul vol de fécondation, appelé vol nuptial.

Au moment de son émergence(1), la reine vierge se promène dans la ruche avec un abdomen gonflé. Après quelques jours, sa taille diminue. La reine devient plus nerveuse et se prépare à l’accouplement. Elle entre alors en rut.

La reine vierge peut s’accoupler du sixième au trentième jour après son émergence. Elle effectue des vols de repérage, généralement par temps clair et chaud, entre 12 h et 17 h. Elle se livre ensuite à des vols d’accouplement dans les aires de rassemblement des mâles. Elle s’accouple avec dix à quinze mâles. Le sperme de ces faux bourdons s’accumule alors dans la spermathèque. Si les vols d’accouplement ne sont pas jugés suffisants, la reine peut ressortir. “L’estimation” dépend probablement de la tension intra-abdominale consécutive à l’accumulation du sperme des mâles. A la suite des vols nuptiaux et des accouplements, la reine ne s’accouple plus.

La maturité sexuelle des mâles est atteinte de douze à quinze jours après l’émergence

Dans la colonie d’abeilles, la seule fonction connue des mâles, ou faux bourdons, est la reproduction. Les œufs de mâles sont généralement produits au printemps, parfois à l’automne dans certaines régions. Les alvéoles de mâles sont plus grosses que celles des ouvrières et généralement situées en bordure du couvain de ces dernières.

L’appareil génital des mâles est particulièrement développé dans l’abdomen. Les testicules, composés d’environ deux cents tubes séminifères, produisent les spermatozoïdes, fabriqués avant l’émergence de l’imago(2). Du mucus est sécrété pour les protéger. Ils sont stockés dans les vésicules séminales qui communiquent avec les testicules par le canal déférent.

Les faux bourdons possèdent un endophallus, organe reproducteur sur lequel débouche le canal éjaculateur. Cette partie se dévagine lors de l’accouplement, le sperme étant propulsé avec le mucus protecteur. L’accouplement induit la perte de l’endophallus et la mort du mâle. Le faux bourdon atteint sa maturité sexuelle entre douze et quinze jours après l’émergence, mais il ne peut s’accoupler qu’à partir de l’âge de trente à quarante jours. Sa durée de vie moyenne s’élève à cinquante jours.

L’accouplement, qui ne dure que quelques secondes, est fatal aux faux bourdons

Les mâles et la reine vierge d’une même colonie ne se rendent pas dans les mêmes aires de reproduction. Les mâles de divers ruchers se rassemblent généralement dans des zones déterminées pour former le “bal des faux bourdons”. Ces sites, souvent identiques d’une année à l’autre, peuvent rassembler des centaines ou des milliers de mâles issus de colonies distantes de 5 à 7 km. Les reines s’envolent vers l’une de ces aires de rassemblement des mâles, généralement assez éloignées de leurs colonies. Lorsque l’une d’elles arrive, les vols se modifient en véritable poursuite. Les mâles se rassemblent, volent en formation de “queue de comète” et suivent la reine pour essayer de copuler. Les plus vigoureux parviennent à se reproduire… et meurent.

Les reines attirent les mâles par une stimulation chimique, via la QMP (phéromone royale), et physique, la chambre de l’aiguillon ouverte provoquant l’éversion de l’endophallus.

L’accouplement ne dure que quelques secondes, puis les faux bourdons tombent à terre et meurent. La séparation avec la reine provoque l’éclatement des organes génitaux mâles et propulse la semence vers l’oviducte puis la spermathèque.

Un mâle produit 1,5 à 1,7 mm3 de sperme contenant entre cinq et dix millions de spermatozoïdes. Au moment de l’accouplement, 90 % de la semence est perdue par la reine, le mucus restant dans la chambre du dard. Une reine qui a retenu trois millions et demi de spermatozoïdes effectue un autre vol d’accouplement. Une fois dans la spermathèque, les spermes des différents mâles ne se mélangent pas complètement.

L’accouplement peut aussi avoir un destin mortel pour la reine lorsque la séparation d’avec le mâle n’a pas lieu. Reine et faux bourdons accouplés sont alors retrouvés gisant à terre.

La reine est capable de reconnaître les cellules d’ouvrières et de faux bourdons

La reine est la mère de toutes les abeilles de la colonie. En période d’extension rapide du couvain, à la sortie de l’hiver et au début du printemps par exemple, elle peut pondre jusqu’à deux mille œufs par jour. Elle est capable de pondre pendant plusieurs années (une à cinq). Le volume de ponte dépend de la saison, ainsi que des récoltes en pollen et en nectar de la colonie. Lors de récoltes importantes, le manque de place, par exemple dans les miellées de lavande, provoque un blocage de la ponte. Cette dernière est en outre interrompue par différents facteurs comme le froid, la sécheresse ou la disette.

La reine pond un œuf par cellule au centre du nid (ou d’un cadre), puis continue vers l’extérieur. Elle distingue les cellules d’ouvrières et de faux bourdons, plus grosses, à l’aide de sa première paire de pattes. Lorsqu’elle reconnaît une cellule d’ouvrière, le passage de l’œuf dans les voies génitales s’accompagne de la libération d’une quantité infime de spermatozoïdes par un mouvement réflexe qui contracte une valve située sur le canal de la spermathèque. L’œuf est alors fécondé et donnera une ouvrière. Quand elle reconnaît une cellule de mâle, aucune fécondation n’a lieu.

Dans les conditions naturelles, lorsque la reine vieillit, la provision de spermatozoïdes s’épuise et elle devient “bourdonneuse”, ce qui signifie qu’elle ne peut pondre que des œufs de mâles.

  • (1) L’émergence est la sortie de l’insecte adulte de sa cellule après les métamorphoses.

  • (2) Insecte adulte, arrivé à son complet développement.

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