En quoi consiste une décision d’astreinte ? - La Semaine Vétérinaire n° 1378 du 30/10/2009
La Semaine Vétérinaire n° 1378 du 30/10/2009

Décision judiciaire

Gestion

QUESTIONS/RÉPONSES

Auteur(s) : Céline Pécavy

Fonctions : Avocate au barreau de Toulouse

L’astreinte est le moyen de contraindre un débiteur à se conformer à une décision de justice qui s’accompagne d’une obligation.

Le pouvoir de dire le droit appartenant aux juges, une décision de justice peut s’accompagner d’obligations pour le perdant. Un acheteur doit ainsi solder le prix de vente auprès de l’éleveur chez lequel il a acquis un animal, un client doit régler les honoraires dus à son vétérinaire, etc. Le jugement oblige, mais l’expérience montre que la décision rendue par un magistrat risquerait de rester lettre morte s’il n’existait pas un procédé permettant de contraindre le débiteur à s’y conformer : l’astreinte. Il s’agit sommairement d’une condamnation au paiement d’une somme d’argent, à raison d’un montant fixé par jour, par semaine ou par mois de retard, prononcée contre un débiteur récalcitrant afin de l’amener à exécuter en nature son obligation.

1 QUELLES OBLIGATIONS PEUVENT DONNER LIEU À UNE ASTREINTE ?

Une astreinte peut être ordonnée pour une obligation de donner ou de verser une somme d’argent, de faire ou de ne pas faire, que sa source soit contractuelle ou non contractuelle. C’est en matière d’obligations de faire que les astreintes se rencontrent le plus souvent. Il s’agit de remédier ainsi aux inconvénients de l’article 1 142 du Code civil, qui prévoit que l’inexécution des obligations de faire se résout en dommages et intérêts. Dans le domaine des animaux de compagnie, le cas le plus souvent rencontré est l’obligation de restituer, comme le démontre la jurisprudence :

– arrêt de la cour d’appel de Rennes du 22 mai 2009 : « Condamne Madame B à restituer le chien dogue de Bordeaux à Madame C, dans le délai d’un mois suivant la signification du présent arrêt et, passé ce délai, sous astreinte provisoire de 100 € par jour de retard pendant un mois » ;

– décision du tribunal de grande instance de Toulouse du 17 janvier 2005 : « Ordonne à Monsieur M de restituer le chien scottish terrier (…) à son véritable propriétaire, Monsieur J, dans un délai d’un mois à compter de la signification de la présente décision, faute de quoi il sera tenu à une astreinte de 50 €par jour de retard » ;

– ordonnance de référé du tribunal d’instance de Toulouse du 14 janvier 2005 : « Le juge des référés, tous droits et moyens au fond demeurant réservés, par ordonnance contradictoire et en premier ressort, constate que le titre de propriété de Monsieur F sur la chienne n’est pas sérieusement discuté, condamne M et Mme D à restituer cette chienne sous astreinte de 30 € par jour de retard passé un délai de dix jours à compter de la signification de la présente ordonnance. »

2 L’ASTREINTE CONCERNE-T-ELLE TOUTES LES OBLIGATIONS ?

L’astreinte ne peut pas s’appliquer pour l’exécution d’une obligation illicite. C’est le cas en matière de communication de pièces couvertes par le secret professionnel. Ainsi, une cour d’appel ne peut enjoindre à un médecin de remettre un dossier médical, alors que la personne concernée s’y est opposée. Le même raisonnement est applicable au secret bancaire (arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation du 25 janvier 2005).

3 QUI SONT LES BÉNÉFICIAIRES ET LES DÉBITEURS ?

L’astreinte peut profiter à n’importe quelle personne privée, physique ou morale, française ou étrangère. Quant au débiteur, il peut s’agir de toute personne physique ou morale, qu’elle soit française ou étrangère.

4 CHAQUE DÉCISION DE JUSTICE PEUT-ELLE S’ASSORTIR D’UNE ASTREINTE ?

Selon l’article 33 de la loi du 9 juillet 1991, l’astreinte ne peut assortir qu’une décision de justice dont elle constitue l’accessoire. Cette décision doit en outre être exécutoire. Il est ainsi inenvisageable de forcer la main d’un débiteur condamné par une décision non exécutable immédiatement. La Cour de cassation rappelle, dans un arrêt du 4 juillet 2007, que « le juge de l’exécution ne peut assortir d’une astreinte que l’exécution d’une obligation devenue exécutoire, fût-ce provisoirement ». Le juge, avant d’assortir une décision d’une astreinte, doit donc constater que le jugement qui lui est soumis est passé en force de chose jugée ou bénéficie d’une exécution provisoire qui n’a pas été arrêtée par le premier président.

5 TOUTES LES JURIDICTIONS SONT-ELLES HABILITÉES À LA PRONONCER ?

La loi du 9 juillet 1991 dispose que « tout juge peut, même d’office, ordonner une astreinte pour assurer l’exécution de sa décision » (article 33 alinéa 1er). Une astreinte peut donc être prononcée par une juridiction de droit commun (tribunal de grande instance), par une juridiction d’exception (tribunal d’instance), par le juge des référés et par une cour d’appel.

Mais une astreinte peut également être prononcée par le juge de l’exécution. Cela concerne l’hypothèse dans laquelle une juridiction s’est abstenue de prononcer une astreinte, les événements ultérieurs en faisant apparaître l’utilité.

6 QUELS SONT LES TYPES D’ASTREINTE ?

L’astreinte est soit provisoire, soit définitive. La première est liquidée en tenant compte du comportement de celui à qui s’adresse l’injonction et des difficultés qu’il a rencontrées pour l’exécuter. A l’inverse, le taux de l’astreinte définitive ne peut jamais être modifié lors de sa liquidation.

7 QU’EST-CE QUE LA LIQUIDATION DE L’ASTREINTE ?

Il s’agit de déterminer la somme que le débiteur devra payer pour ne pas s’être exécuté. Le calcul du montant de l’astreinte n’est pas une simple opération mathématique. Lors d’astreinte provisoire, l’article 36 de la loi de 1991 dispose « que le montant est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l’injonction a été adressée et des difficultés qu’il a rencontrées pour s’exécuter ». Il ne s’agit donc pas d’une multiplication, mais d’une détermination souveraine par les juges de la proportion dans laquelle l’astreinte peut être modérée.

En présence d’une astreinte définitive, une réduction est aussi possible si l’exécution a été perturbée par une cause étrangère, comme la force majeure, le cas fortuit, le fait d’un tiers et la faute de la victime.

Questions fréquentes

• Une astreinte peut-elle être prononcée pour l’exécution d’une transaction ?

Non. L’astreinte ne peut assortir qu’une décision de justice dont elle constitue l’accessoire. Elle ne peut donc pas renforcer l’exécution d’une transaction.

• Le juge de l’exécution peut-il modifier le montant de l’astreinte ordonnée par une autre juridiction ?

Non. Si une autre juridiction a déjà statué sur le montant de l’astreinte, le juge de l’exécution ne peut plus le modifier.

• Le juge peut-il directement prononcer une astreinte définitive ?

Non. L’astreinte définitive ne peut être ordonnée qu’après le prononcé d’une astreinte provisoire et pour une durée que le juge détermine.

C. P.

Conseils pratiques

• Délais. Les délais fixés pour une astreinte sont calculés et prorogés selon les dispositions du Code civil. Aussi, dans le cas où la décision est notifiée un samedi ou un dimanche, l’astreinte ne commence à courir que le lundi suivant. La même règle vaut si cette notification est intervenue un jour férié ou chômé.

• Vérifier la décision avant la liquidation. Le moment venu de liquider l’astreinte, le créancier doit se pencher sur la décision qui l’a ordonnée. La règle veut que l’astreinte soit liquidée par le juge de l’exécution, sauf si le juge qui l’a ordonnée reste saisi de l’affaire ou s’en est réservé le pouvoir. Avant de saisir le juge de l’exécution, mieux vaut donc vérifier que tel n’est pas le cas.

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