Traitée précocement, l’hypertension artérielle pulmonaire peut être réversible - La Semaine Vétérinaire n° 1372 du 18/09/2009
La Semaine Vétérinaire n° 1372 du 18/09/2009

Cardiologie

Formation continue

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : François Jacquet

Chez le chien, l’origine de cette affection est connue dans 90 % des cas. Si le traitement étiologique est insuffisant ou si l’hypertension est primitive, le recours à des molécules vasodilatatrices est requis.

L’hypertension artérielle pulmonaire se définit comme l’augmentation de la pression artérielle pulmonaire systolique et/ou diastolique. Chez le chien éveillé, les valeurs normales sont de 15 à 25 mmHg en systole, de 5 à 10 mmHg en diastole et de 10 à 15 mmHg pour la pression moyenne.

Chez les carnivores domestiques, l’hypertension artérielle pulmonaire est rarement primaire. Le plus souvent, elle est secondaire avec des causes à la fois nombreuses et variées (voir encadré).

L’écho-Doppler permet d’évaluer la gravité de l’affection

L’examen écho-Doppler offre la possibilité de quantifier la pression artérielle pulmonaire. Cette méthode non invasive peut être réalisée chez l’animal éveillé. Les pressions artérielles pulmonaires systolique et diastolique sont calculées respectivement grâce à la mesure des vitesses des reflux tricuspidien et pulmonaire. Par exemple, une hypertension diastolique peut être confirmée par l’analyse du reflux pulmonaire, ce dernier étant fréquemment détecté chez le chien normal (90 % des animaux). Ainsi, un reflux télédiastolique pulmonaire de vitesse élevée (supérieure à 2 m/s) témoigne de la présence d’une hypertension artérielle pulmonaire diastolique (formule de Bernoulli : Ptronc pulmonaire ou Pventricule droit en diastole = 4 x Vmax2).

La limite de cette méthode de mesure directe tient au fait que les reflux tricuspidien et pulmonaire ne sont pas toujours correctement quantifiables, même quand ils sont présents et détectés en mode Doppler couleur. Ainsi, plus d’un tiers des chiens atteints d’hypertension artérielle pulmonaire secondaire à une maladie valvulaire dégénérative mitrale ne présentent pas de reflux tricuspidien (étude réalisée chez quatre-vingt-six chiens dans l’unité de cardiologie d’Alfort, voir bibliographie 1 en page 46). Des méthodes de mesure indirecte (Doppler tissulaire notamment) permettent de remédier en partie à cet inconvénient.

L’hypertension artérielle pulmonaire s’accompagne de modifications hémodynamiques et morphologiques (cœur droit, tronc pulmonaire), dont l’évaluation permet, indirectement, de la suspecter. Ainsi, le rapport entre le tronc pulmonaire et l’aorte augmente (intervalle de référence de 0,80 à 1,15 selon l’unité de cardiologie d’Alfort, voir bibliographie 2), en raison de la dilatation du tronc pulmonaire. De même, une hypertension artérielle pulmonaire importante peut entraîner une diminution du temps d’accélération du flux pulmonaire et une baisse du rapport entre le temps d’accélération et celui d’éjection.

Les inhibiteurs de la phosphodiestérase-5 sont une perspective intéressante

L’hypertension artérielle pulmonaire est potentiellement réversible si le traitement est mis en place précocement. Il doit avant tout être étiologique lorsque cela est possible. Chez le chien, la cause est connue dans 90 % des cas (cardiopathie, affection hypoxémiante, parasitose, etc.).

Si le traitement étiologique est insuffisant ou si l’hypertension est primitive, le recours à des molécules à action vasodilatatrice permet de diminuer la pression artérielle pulmonaire et, par conséquent, la pression ventriculaire et atriale droite.

Chez l’homme, l’emploi de furosémide associé à un régime hyposodé, certains inhibiteurs calciques, les inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (IECA) ou encore la spironolactone sont reconnus pour leur effet hypotenseur artériel pulmonaire. Cependant, peu de données sont disponibles en médecine vétérinaire. Chez le chien, deux études ont porté sur l’efficacité de l’énalapril et du ramipril (voir bibliographie 3). D’autres classes médicamenteuses (prostacycline et ses analogues, antagonistes des récepteurs de l’endothéline) peuvent en théorie être employées.

De nouvelles molécules sont déjà utilisées en médecine humaine, comme les inhibiteurs de la phosphodiestérase-5 (PDE-5). Ces derniers présentent un effet plus ciblé sur les artères pulmonaires que les molécules précédemment citées avec une action mixte, à la fois vasodilatatrice et antiremodelage (en limitant la prolifération des cellules musculaires lisses). Les modifications des artères pulmonaires sont en effet systématiques lors d’hypertension artérielle pulmonaire chronique. Le chef de file de cette classe de molécules est le sildénafil (Viagra®), à propos duquel deux études rétrospectives sont parues chez le chien (voir bibliographie 4). La posologie du sildénafil utilisée dans ces deux études est non standardisée et variable (de 0,5 à 5,5 mg/kg une à trois fois par jour). Comme chez l’homme, l’utilisation du sildénafil a induit une amélioration clinique chez les animaux traités. Plusieurs questions importantes restent néanmoins en suspens concernant cette molécule : doses recommandées, possibilité d’association avec d’autres agents thérapeutiques, action précise à la fois sur les pressions artérielles systémique et pulmonaire, ou encore effets secondaires (léthargie et somnolence sont rapportées dans les deux études). Le tadalafil, dont la durée d’action est plus longue, n’a fait l’objet que d’un seul cas clinique publié (voir bibliographie 5). Les inhibiteurs de la phosphodiestérase de classe 3 (pimobendan) ou 4 pourraient également être préconisés en tant qu’antihypertenseurs pulmonaires, mais leur effet exact reste cependant à évaluer.

BIBLIOGRAPHIE

  • 1 – F.J. Serres et coll. : « Doppler echocardiography-derived evidence of pulmonary arterial hypertension in dogs with degenerative mitral valve disease : 86 cases (2001-2005) », J. Am. Vet. Med. Assoc., 2006, vol. 229, n° 11, pp. 1 772-1 778.
  • 2 – F.J. Serres et coll. : « Diagnostic value of echo-Doppler and tissue Doppler imaging in dogs with pulmonary arterial hypertension », J. Vet. Intern. Med., 2007, vol. 21, n° 6, pp. 1 280-1 289.
  • 3 – I.M. Straeter-Knowlen et coll. : « ACE inhibitors in HF restore canine pulmonary endothelial function and ANG II vasoconstriction », Am. J. Physiol., 1999, vol. 277, pp. 1924-1930.
  • 4 – J.F. Bach et coll. : « Retrospective evaluation of sildenafil citrate as a therapy for pulmonary hypertension in dogs », J. Vet. Intern. Med., 2006, vol. 20, n° 5, pp. 1 132-1 135. H.B. Kellum et coll. : « Sildenafil citrate therapy in 22 dogs with pulmonary hypertension », J. Vet. Intern. Med., 2007, vol. 21, n° 6, pp. 1 258-1 264.
  • 5 – F.J. Serres et coll. : « Efficacy of oral tadalafil, a new long-acting phosphodiesterase-5 inhibitor, for the short-term treatment of pulmonary arterial hypertension in a dog », J. Vet. Med. A., 2006, vol. 53, n° 3, pp. 129-133.

CONFÉRENCIÈRE

Valérie Chetboul, professeur agrégé, diplomate de l’Ecvim (cardiology), unité de cardiologie de l’école d’Alfort.

Article tiré de la conférence « Hypertension artérielle pulmonaire : quantification et perspectives thérapeutiques », présentée lors du congrès de l’Afvac 2008.

Des causes nombreuses et variées

L’hypertension artérielle pulmonaire est le plus souvent secondaire à d’autres affections.

• Les causes dites “d’amont” sont à l’origine d’une augmentation du débit cardiaque droit. Elles incluent principalement les shunts gauche-droit de débit important, comme les communications interatriales ou interventriculaires ou encore la persistance du canal artériel.

• Les causes dites “d’aval” ont pour effet une augmentation de la pression hydrostatique dans les veines pulmonaires. Qualifiée alors de postcapillaire, l’hypertension artérielle pulmonaire a pour principales origines chez le chien la maladie valvulaire dégénérative mitrale, la myocardiopathie dilatée ou, plus rarement, les cardiopathies congénitales comme la dysplasie mitrale.

• Les causes “locales” sont liées à une augmentation de la résistance vasculaire pulmonaire, en raison d’une diminution du diamètre endoluminal des artères. L’hypertension est alors qualifiée de précapillaire, avec pour origine principale l’hypoxémie, observée le plus souvent lors d’affection respiratoire (par exemple collapsus trachéal, paralysie laryngée, bronchite chronique). La thrombo-embolie pulmonaire, l’angiostrongylose et la dirofilariose sont d’autres causes possibles de cette forme d’hypertension artérielle pulmonaire.

F. J.
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