La gale sarcoptique reste sous-diagnostiquée - La Semaine Vétérinaire n° 1372 du 18/09/2009
La Semaine Vétérinaire n° 1372 du 18/09/2009

Dermatologie

Formation continue

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Alexandre Balzer

Cela est lié à un manque de sensibilité des raclages, à un tableau clinique souvent trompeur ou à des examens complémentaires mal réalisés.

La gale sarcoptique est une dermatose prurigineuse bien connue des praticiens. Pour autant, il est encore fréquent de voir des animaux atteints de gale en pratique quotidienne. La raison est sans doute à imputer aux idées préconçues qui circulent sur cette affection (elle serait devenue rare), conduisant à la sous-diagnostiquer ou, au contraire, à surdiagnostiquer ces cas.

La gale sarcoptique est une maladie parasitaire souvent très prurigineuse, qui provoque une atteinte cutanée et éventuellement générale. Elle touche principalement le chien, mais également parfois le chat. Dans l’espèce féline, seuls quelques cas ont été récemment rapportés.

La gale sarcoptique est une affection contagieuse potentiellement zoonotique. Elle est due à la multiplication dans la couche externe de l’épiderme (stratum corneum) d’un parasite : Sarcoptes scabiei var canis. Cet acarien térébrant mesure de 200 à 250 µm pour le mâle et de 350 à 500 µm pour la femelle. Il est aisément identifiable au microscope. La contamination se fait de manière directe ou indirecte (cet acarien peut survivre plusieurs jours dans le milieu extérieur). Les réservoirs actuels sont les canidés, les renards et, dans une moindre mesure, certains animaux sauvages (lynx, blaireau, etc.).

L’intensité du prurit dépend de l’immunocompétence du sujet atteint

Ce parasite cutané est à l’origine d’une inflammation importante et d’une réaction d’hypersensibilité à l’origine de nombreux symptômes. Cette réaction inflammatoire est mise à profit pour la recherche des immunoglobulines G circulantes, lors des tests sérologiques.

Les signes cliniques de la gale sarcoptique sont un prurit sévère, l’apparition progressive de papules érythémateuses, de croûtes, de sable conchinien sur le bord libre des pavillons et d’une alopécie en moucheture, essentiellement localisée sur le pavillon de l’oreille, les coudes, les jarrets, le ventre. L’intensité du prurit varie selon l’immunocompétence du sujet atteint : plus celle-ci est faible, moins le prurit est important.

Notre consœur Marie-Christine Cadiergues a illustré les difficultés diagnostiques de cette affection par plusieurs cas cliniques.

Une maladie sous-diagnostiquée, car les raclages sont trop peu réalisés…

Un golden retriever de six ans est référé pour un prurit intense depuis quelques semaines. Le chien vit dans une villa entourée d’un grand jardin, proche de la forêt et de la faune sauvage. Aucune contagion des propriétaires n’est rapportée. Le chien n’a jamais eu de problèmes cutanés auparavant. Une biopsie cutanée, réalisée par le vétérinaire référant, montre un tableau histopathologique évocateur d’une réaction d’hypersensibilité. La démarche allergologique tentée par le premier confrère ne donne rien. Le chien est alors référé. Les signes cliniques, la répartition des lésions et l’intensité du prurit évoquent en première intention une gale sarcoptique. Un raclage est alors effectué et met en évidence les parasites. Après un traitement spécifique, les symptômes disparaissent. Ce cas illustre parfaitement le risque de sous-diagnostic. En effet, l’histopathologie ne permet généralement pas de mettre en évidence le parasite. Seuls les raclages, trop peu effectués en pratique courante, permettent de le visualiser. Dans ce genre de cas, il convient donc de réaliser systématiquement une éviction parasitaire complète avant d’envisager les tests allergologiques ou autres.

De plus, apparaissent aujourd’hui des cas de gale en hypercentre urbain. Ils ne sont plus cantonnés dans les campagnes. En ville, les réservoirs sont les chiens des personnes sans domicile fixe et les zones contaminées par un grand nombre d’animaux, comme les canisites. La contagion des propriétaires n’est pas systématique et il convient de ne pas écarter l’hypothèse de gale devant l’absence de contamination humaine. Actuellement, cela semble d’ailleurs de plus en plus fréquent.

Une maladie surdiagnostiquée, car le réflexe otopodal est vu comme pathognomonique

Un chien est référé pour une gale réfractaire aux traitements. Il vit en milieu semi-urbain. Le réflexe otopodal est nettement positif. Le traitement acaricide mis en place par le confrère référant n’aboutit qu’à des améliorations partielles et peu durables. L’ajout de cortisone engendre une rapide extension des lésions. Là encore, des raclages multiples sont réalisés, mais sans permettre la mise en évidence de sarcoptes. En revanche, l’examen cytologique de la surface cutanée révèle la présence d’un grand nombre de germes : des coques et des Malassezia. Le chien souffre en réalité d’une prolifération microbienne de surface. Cette affection est effectivement très prurigineuse et peut s’accompagner d’un réflexe otopodal positif.

La cause de ce surdiagnostic est essentiellement la présence de ce réflexe et la distribution des lésions. Pourtant, ces deux facteurs ne sont absolument pas pathognomoniques de la gale sarcoptique, même s’ils restent évocateurs. En outre, l’extension des lésions observée lors du recours aux glucocorticoïdes ne permet pas non plus de conclure : tout phénomène infectieux peut aussi s’aggraver. Ces deux cas permettent de tirer quelques conclusions quant aux facteurs de surdiagnostic et de sous-diagnostic de la gale sarcoptique. Ainsi, un réflexe otopodal positif ne permet pas forcément de conclure.

La réponse aux acaricides doit être totale si la gale est effectivement suspectée. En outre, cette affection n’est pas la seule qui s’aggrave lors de l’emploi de corticoïdes. L’absence de contamination humaine n’est en aucun cas un facteur d’exclusion. Le mode de vie et l’environnement de l’animal peuvent aider au diagnostic, mais ne sont pas exclusifs. Il convient également de penser aux formes atypiques, en particulier chez des individus au bon statut immunitaire ou chez des sujets à poils longs pour lesquels la distribution des lésions peut être moins évocatrice et plus difficile à cerner.

La gale sarcoptique est donc toujours une parasitose d’actualité. Elle est certainement sous-diagnostiquée, en raison d’un manque de sensibilité des techniques de raclage, d’un tableau clinique souvent trompeur ou d’examens complémentaires mal effectués. Dans tous les cas, lors de prurit intense, mieux vaut, avant d’envisager une allergie, réaliser une éviction parasitaire et bactérienne complète.

À LIRE DANS Le Point Vétérinaire

• William Bordeau : « Un cas de gale sarcoptique chez un cocker », PV n° 275, mai 2007.

Les examens complémentaires réalisables

• Le raclage : cet examen est à effectuer en première intention, car il est facilement réalisable et permet un diagnostic de certitude. En raison de sa faible sensibilité (20 à 50 %), en particulier chez les sujets normalement immunocompétents, il convient de prévoir toujours plusieurs lames.

• L’histopathologie : généralement peu conclusif, cet examen est à proscrire.

• La sérologie : cette analyse est à réaliser tardivement après l’apparition des symptômes (deux à cinq semaines), afin de limiter les faux négatifs. La sensibilité et la spécificité sont de l’ordre de 85 à 90 %.

• L’épreuve thérapeutique : deux mois de traitement sont toujours nécessaires, en incluant bien entendu tous les animaux de la famille.

A. B.

CONFÉRENCIÈRE

Marie-Christine Cadiergues, diplomate de l’European College of Veterinary Dermatology, maître de conférences à l’école de Toulouse.

Article tiré de la conférence « Gale sarcoptique : surdiagnostic ou sous-diagnostic ? », présentée lors du congrès 2008 de l’Afvac à Strasbourg.

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