Que pensez-vous du rapprochement des écoles vétérinaires et d’agronomie ?

A Lyon, la distance rend la fusion plus difficile

Je suis bien entendu partant pour participer à la fusion de l’école de Lyon avec l’Enita de Clermont-Ferrand, le 1^er janvier 2010, et prêt à en tirer le meilleur parti. Cela sera possible et sans doute avantageux sur les plans administratif et financier. En revanche, par rapport aux autres écoles, le rapprochement physique des établissements est difficile, car ils sont distants de près de 200 km, et séparés par un col qui culmine à plus de 900 m d’altitude. En termes pédagogiques, notamment pour les formations initiales, cela réduira les échanges, car les déplacements des enseignants entre les écoles seront limités par la distance et les intempéries hivernales.

En revanche, nous aurons la possibilité d’associer les compétences des laboratoires, ce qui sera positif en matière de recherche. Des unités plus importantes seront créées et auront plus de poids et de crédibilité à l’échelle nationale.

Nous fondons aussi beaucoup d’espoirs sur les masters, avec le développement de collaborations dès la prochaine campagne de labellisation. L’intérêt de la fusion des établissements sera mis en évidence en proposant des masters dans les thématiques communes que sont la qualité sanitaire des aliments et les productions animales.

Le changement de nom me rend néanmoins un peu nostalgique, bien que cela n’ait aucun rapport avec l’intérêt de la fusion. Nous nous appellerons Vet Agro Sup, campus vétérinaire de Lyon. La première école vétérinaire du monde, avec l’histoire qui y est attachée, n’existera plus pour le grand public.

La concrétisation d’une collaboration historique

Dans le domaine particulier de la sécurité des aliments, nous collaborons depuis plusieurs années avec des écoles d’ingénieurs agronomes. L’école de Toulouse est l’un des membres fondateurs du pôle de compétences en recherche et enseignement, Toulouse Agri Campus, moteur pour la création d’un pôle de compétitivité, AgriMip Innovation. Pour les enseignants d’autres domaines, ce rapprochement paraît sans doute moins évident, mais il s’inscrit pour nous dans une démarche logique, qui prolonge d’ailleurs la classe préparatoire commune aux concours.

Les collaborations qui existent déjà entre l’ENVT et l’Ecole nationale supérieure agronomique de Toulouse (Ensat) se concrétisent non par une fusion dans le but de créer un établissement unique, mais par un rattachement à l’Institut national polytechnique de Toulouse (INPT), fédération de grandes écoles qui a le statut d’université, dans une démarche commune avec l’école d’ingénieurs de Purpan (EIP) et l’Ecole nationale de formation agronomique (Enfa). Cette dynamique, différente d’une intégration, est pertinente, car sans perdre notre autonomie ni notre identité, elle nous permettra de participer encore plus à la structuration de l’enseignement supérieur et de la recherche en sciences agronomiques et vétérinaires, à travers le renforcement des actions déjà engagées. Bien entendu, les connaissances en santé animale et en santé publique vétérinaire sont plus spécifiques, mais des formations innovantes peuvent être imaginées pour un enseignement commun entre étudiants vétérinaires et agronomes concernant l’élevage et la sécurité des produits et de l’environnement.

Des formations complémentaires pour une alimentation sûre

Cette fusion s’inscrit en toute cohérence dans l’évolution des politiques agricoles nationale et européenne, qui visent à identifier les activités de l’agriculture, de la pêche et de l’agro-alimentaire comme étant au service d’une alimentation sûre, suffisante et saine des populations. Le nouvel intitulé de notre tutelle n’est-il pas le ministère de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Pêche ? La fusion des établissements qui forment les cadres intervenant à toutes les étapes de la chaîne alimentaire autorisera une maîtrise de la sécurité et de la qualité des denrées, depuis la production primaire, par une chaîne d’acteurs responsables et coopérants. L’esprit du “paquet hygiène” trouve donc là des racines à sa mise en œuvre. Des ponts solides entre les formations respectives pourront s’établir, conduisant indiscutablement à leur décloisonnement, à une meilleure identification de leurs complémentarités à chaque étape de cette chaîne. D’aucuns y verront des risques de perte d’identité et de réductions de moyens ! Je préfère voir une mutualisation possible pour plus d’efficacité dans la formation d’un vétérinaire, cadre de santé, légitimement positionné par la société comme un acteur à part entière de la santé publique et de la qualité de l’alimentation de l’homme.

La pleine réussite de ces fusions passera néanmoins par la prise en considération des contextes régionaux respectifs, une structuration respectueuse de la large pluridisciplinarité engendrée et une pointe d’esprit d’aventure.