La prévention des problèmes respiratoires est un challenge en production porcine

La diminution de la marge annuelle d'un élevage de porcs confronté à des troubles respiratoires sévères est estimée à 3,24 € pour 100 kg de produit en 2008. « La pathologie respiratoire du porc est une histoire ancienne qui explose avec le processus d'intensification de l'élevage. En 1981, les deux tiers des porcs étaient atteints de pneumonie et 17 % de pleurésie. En 2005, les élevages français affichaient un taux de 72 % de pneumonie et de 14 % de pleurésie. » C'est ainsi que François Madec, sous-directeur de l'Afssa de Ploufragan, a introduit la réunion coorganisée par l'Association française de médecine vétérinaire porcine (AFMVP), l'Association des vétérinaires salariés de l'Ouest (AVSO) et la Société nationale des groupements techniques vétérinaires (SNGTV) sur la pathologie respiratoire porcine. Elle a réuni une centaine de vétérinaires spécialisés en production porcine à Ploërmel (Morbihan), les 18 et 19 juin derniers. Les chercheurs ont communiqué les résultats de leurs travaux sur le coût des affections respiratoires porcines, l'aérotransmission du virus du syndrome dysgénésique et respiratoire porcin (SDRP) et de Mycoplasma hyopneumoniae (Mhp), la pathogenèse et la dynamique de l'infection à Mhp, la diversité génomique de Mhp, la surveillance de la grippe porcine et l'identification des facteurs de variation en postsevrage et en engraissement.

L'émotion était également au rendez-vous de cette rencontre, avec l'hommage que Jean-Yves Jouglar et les vétérinaires de terrain ont rendu à Marylène Kobisch, qui a consacré sa carrière de chercheur à l'étude de Mycoplasma hyopneumoniae.

M. hyopneumoniae est caractérisé par la variabilité des souches et de leur virulence

Mycoplasma hyopneumoniae est présent dans tous les élevages porcins. « Il ne faut donc pas l'envisager en termes “présent-absent”, la pression d'infection doit prévaloir », a précisé François Madec. L'étude de la dynamique de l'infection par cet agent pathogène, conduite dans vingt élevages avec un score moyen de pneumonie différent (< à 0,5 versus ≥ 6,5), chez des porcs âgés de quatre, dix et seize semaines, montre que la quantité de Mhp est élevée en engraissement, quel que soit le score de l'élevage. A quatre semaines, les porcelets des élevages avec un score moyen de pneumonie élevé ont une quantité de Mhp dans la trachée plus importante que ceux issus des élevages avec un score moyen de pneumonie faible (10⁸ versus 10² Mhp/ml). La quantité de Mhp dans la trachée des porcs varie avec le microbisme respiratoire de l'élevage, la pratique de la vaccination et le type de vaccin utilisé.

Corinne Marois, chercheur à l'Afssa de Ploufragan, a également démontré la grande hétérogénéité des souches de Mhp et la coexistence de plusieurs d'entre elles dans un même élevage et chez plusieurs porcs. Un lien a été mis en évidence entre certaines souches et le score moyen de pneumonie en élevage.

« Le risque de transmission aérienne du virus SDRP et de Mhp est réel », a souligné Scott Dee, du collège de médecine vétérinaire de l'université du Minnesota (Etats-Unis). Il a mesuré une distance d'aérotransmission de 4,7 km pour les deux agents pathogènes. Cette distance varie significativement avec la vitesse du vent pour le virus SDRP et avec l'intensité solaire et la température pour Mhp.

La coïnfection H1N1-Mhp est un facteur de risque de la pneumonie enzootique

« La surveillance épidémiologique révèle la cocirculation des virus influenza H1N1 et H1N2, avec ponctuellement des réassortants », a exposé Gaëlle Kuntz-Simon, de l'Afssa de Ploufragan. 40 % des élevages porcins français sont séropositifs vis-à-vis du virus H1N1 et 41 % vis-à-vis du virus H1N2. La coïnfection des porcs par Mhp et le virus H1N1 montre l'effet synergique des deux agents pathogènes, ce qui n'a pas été démontré pour l'association de Mhp avec H1N2. Les porcs coïnfectés Mhp-H1N1 sont plus atteints cliniquement que ceux coïnfectés Mhp-H1N2. De nombreuses questions ont concerné le virus H1N1 de la grippe A observé cette année. Il a toutes les chances de repasser chez le porc. Un essai de reproduction de l'infection met en évidence un syndrome grippal relativement classique, mais avec une multiplication et une retransmission ultérieure. Une éventuelle protection croisée avec le virus classical swine H1N1 reste à démontrer.

L'auditoire a été stimulé par la conclusion à cette rencontre, apportée par François Madec : « La pathologie respiratoire ne devra plus freiner les performances des élevages. Concernant les ressources, le porc est un compétiteur de l'homme et un mauvais transformateur. Sur 3 kg de céréales ingérées, deux partent dans le lisier. Dans un contexte de manque de surfaces, les élevages vont devoir être efficaces. Les porcs devront donc être en bonne santé. La notion d'éthique en production animale est devenue incontournable. Il sera de moins en moins accepté de chercher à compenser les défaillances du milieu par des médicaments. »