La manifestation clinique des rétroviroses est protéiforme - La Semaine Vétérinaire n° 1365 du 19/06/2009
La Semaine Vétérinaire n° 1365 du 19/06/2009

Virologie féline

Formation continue

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Lauren Figueres

Il est souvent difficile de différencier cliniquement les maladies dues au FeLV de celles dues au FIV.

Les infections par le virus de l’immunodéficience féline (FIV) et celui de la leucose féline (FeLV) sont responsables de nombreux symptômes communs. Les spécificités de chacune sont liées à la nature des cellules atteintes. Lorsque les deux virus sont présents, leurs effets sont potentialisés (l’infection par le FeLV augmente la réplication et l’étendue du tropisme du FIV) et le pronostic est sombre.

Durant la phase d’infection, les manifestations cliniques peuvent consister dans les deux cas en de la fièvre, une neutropénie, une adénomégalie. La mort par septicémie survient parfois chez le chaton. Dans un premier temps, le FIV ne touche que les globules blancs, alors que le FeLV est souvent à l’origine d’une anémie. L’apparition des signes cliniques est plus précoce dans le cas du FeLV (entre deux et six semaines) et leur durée est plus importante, sauf pour l’adénopathie qui peut persister jusqu’à neuf mois avec le FIV.

La phase asymptomatique est assez courte lors de l’infection par le FeLV (de quelques mois à trois ans). Elle est plus longue pour le FIV, de cinq à sept ans en moyenne, mais peut durer jusqu’à dix ans selon les conditions de vie du chat.

Le FeLV atteint toutes les cellules sanguines et les épithéliums (oronasaux, intestin et vessie). Le FIV touche les lymphocytes T et B, les macrophages, les astrocytes, l’épithélium glandulaire des glandes salivaires et, tardivement, les mégacaryocytes et les cellules mononucléées de la moelle osseuse. Des lésions communes aux deux virus sont donc observées lors de la phase de maladie déclarée durant laquelle sont notés une fièvre chronique, une lymphopénie/neutropénie, un amaigrissement/ cachexie, une gingivite/ stomatite/parodontite, des diarrhées, une glomérulonéphrite, des troubles du comportement, des neuropathies, une immunosuppression et des infections opportunistes. De ce fait, leur distinction clinique est difficile.

Lors d’anémie, la recherche de la leucose est justifiée

Un grand nombre de lésions variées peuvent être dues à un rétrovirus. Il existe une longue liste d’anémies occasionnées par le FeLV (par perte de sang, hémolytiques, infection par des mycoplasmes, syndrome myélodysplasique, etc.). Un test FeLV est donc justifié lors de la démarche diagnostique à partir d’une anémie chez un chat.

Chez un animal atteint par le FIV, une anémie peut être dépistée, principalement de type inflammatoire, due à une coïnfection bactérienne ou protozoaire, ou d’origine centrale (observée tardivement). Des anémies hémolytiques sont décrites dans de rares cas, mais le lien avec le FIV n’est pas prouvé.

La localisation des lymphomes induits par la leucose varie selon l’âge

Des cancers sont également rapprochés des rétrovirus, en particulier les lymphomes du chat infecté par le FeLV. Il s’agit de lymphosarcomes dont la localisation varie selon le sous-type et l’âge de l’animal. Le thymus est atteint chez des chats âgés de moins d’un an. Des lymphomes multicentriques, nerveux et oculaires sont décrits chez des animaux d’un à quatre ans. Chez les individus de plus de huit ans, les lymphomes rénaux et intestinaux prédominent. Actuellement, l’observation des lymphosarcomes thymiques diminue, mais celle des lymphomes intestinaux augmente. Des leucémies lymphoïdes sont également rapportées, souvent associées à un lymphome multicentrique.

Le FeLV est également accusé d’être à l’origine de fibrosarcomes et de chondromes multicentriques chez les jeunes chats. Le FIV, pour sa part, est rapproché de lymphomes nasaux et d’autres cancers chez des chats généralement âgés.

Contrairement à la pratique chez le chien, la biopsie des ganglions est préférable à la cytoponction lors de suspicion d’un lymphome, car les résultats obtenus sont trop souvent équivoques. Le chat supporte bien la chimiothérapie, mais le lymphome répond moins bien au traitement que chez le chien.

Lors de FIV, le cortex cérébral peut être directement atteint

Des symptômes nerveux sont parfois présents, secondaires à un lymphome ou à des lésions des nerfs périphériques à l’origine d’anisocorie ou d’incontinence.

Lors de lymphome localisé au niveau de la moelle épinière, la sérologie FeLV peut être négative, mais d’autres organes sont atteints dans 82 % des cas.

Lors d’infection par le FIV, une atteinte directe du cortex cérébral est possible, provoquant des troubles du comportement comme de l’insomnie ou une agressivité brutale (due à la diminution du temps de sommeil ?). Un nystagmus peut être observé.

Les lésions oculaires les plus fréquentes en présence de FIV sont une uvéite antérieure, un pars planitis et un glaucome, dus à l’infiltration lymphoplasmocytaire des corps ciliaires et de l’iris. En cas d’infection par le FeLV, une uvéite précède parfois le lymphome oculaire.

Le FIV est à l’origine d’une dermatose nodulaire ou en plaques douloureuse

Au niveau cutané, le FeLV entraîne une dermatose à cellules géantes, qui est une dermatite croûteuse et squameuse de la tête et du cou, ainsi que des cornes cutanées, c’est-à-dire des excroissances kératinisées multiples des coussinets. Un lymphome cutané est également possible (forme nodulaire ou ulcérative).

Le FIV est à l’origine d’une dermatose nodulaire ou en plaques douloureuse (pododermatite ou chondrite plasmocytaire). L’infection exacerbe l’effet d’autres agents, comme Demodex, les agents de teigne ou le poxvirus. Par ailleurs, un état hyperkératoséborrhéique peut être noté dans les deux cas.

Il arrive que la fonction de reproduction soit touchée (un lien de cause à effet n’est pas mis en évidence pour le FIV), entraînant stérilité, résorption fœtale, avortements et mortinatalité. Les rétrovirus peuvent aussi atteindre les os et les articulations, notamment lors de coïnfection avec le virus syncitial dans le syndrome de polyarthrite aiguë ou progressive chronique du chat mâle, ce qui entraîne des boiteries. Le FeLV est éventuellement à l’origine d’ostéochondromes chez le jeune, sous forme de nodules douloureux sur les os plats (crâne, scapula) et parfois les os longs.

L’exacerbation des coïnfections attribuée au FIV est de plus en plus discutée. Cependant, les cas de démodécie féline sont principalement observés chez des chats FIV positifs. Quant à la poxvirose, elle évolue généralement vers la mort consécutive à une pneumonie chez un chat FIV positif.

Les tests Elisa ou immunochromatographiques sont utilisés en première intention

Le diagnostic des rétroviroses est d’abord clinique, grâce aux signes d’appel. Le dépistage à l’aide des tests présente plusieurs intérêts : repérer les porteurs et les isoler, permettre un diagnostic chez un chat malade et établir un pronostic, adapter le protocole vaccinal ou encore identifier le statut des donneurs de sang.

Pour diagnostiquer une infection par le FeLV, l’Elisa ou l’immunochromatographie, particulièrement sensibles, sont utilisées en première intention. Ces tests sont réalisés à la clinique, au chevet de l’animal. Assez précoces (trente jours après le contact), ils évaluent l’antigénémie (Ag viral P27 libre dans le plasma), mais pas la virémie. Un résultat négatif est assez fiable dans une population à bas risque. La technique d’immunofluorescence permet de confirmer un test positif, surtout dans une population à risque faible, et d’identifier les chats virémiques. Les faux négatifs sont possibles en cas de charge virale faible ou de neutropénie (la recherche de l’Ag P27 se fait dans le cytoplasme des globules blancs et des plaquettes). Elle est pratiquée sur un étalement de sang (frais ou prélevé sur EDTA). Pour sa part, la polymerase chain reaction (PCR) peut être utile pour confirmer un test positif dans une population à bas risque, identifier les chats en phase d’infection régressive ou rechercher la présence de virus sur des biopsies. Elle est particulièrement sensible, mais la fiabilité des différents tests sur le marché est discutée.

Le diagnostic de l’infection par le FIV repose également sur l’Elisa ou l’immunochromatographie en première intention. Ils mettent en évidence les anticorps, qui persistent pendant toute la durée de l’infection. Il faut cependant attendre deux mois après le contact pour tester les animaux. Il s’agit d’analyses sensibles et spécifiques, mais quelques faux positifs sont à déplorer. Le test de référence pour confirmer un résultat positif est le westernblot.

L’association des praticiens félins américains (AAFP) recommande de tester les chatons durant leur première visite (à renouveler soixante jours plus tard) et les sujets qui vivent dans des conditions à risque (les chats qui sortent), via un contrôle annuel.

CONFÉRENCIÈRE

Michèle Fradin-Fermé, praticienne à Paris (exercice félin exclusif).

Article rédigé d’après la conférence « Expression clinique et diagnostic des rétroviroses chez le chat », présentée lors du congrès de médecine féline organisé par la section vétérinaire de la Société française de félinotechnie, le 18/10/2008, à Lyon.

À LIRE DANS Le Point Vétérinaire

• Alexia Jongh-Aragon, Luc Chabanne : « Conduite à tenir face à un chat FeLV positif », PV n° 23, 2003.

Formations e-Learning

Nouveau : Découvrez le premier module
e-Learning du PointVétérinaire.fr sur le thème « L’Épanchement thoracique dans tous ses états »

En savoir plus

Boutique

L’ouvrage ECG du chien et du chat - Diagnostic des arythmies s’engage à fournir à l’étudiant débutant ou au spécialiste en cardiologie une approche pratique du diagnostic électrocardiographique, ainsi que des connaissances approfondies, afin de leur permettre un réel apprentissage dans ce domaine qui a intrigué les praticiens pendant plus d’un siècle. L’association des différentes expériences des auteurs donne de la consistance à l’abord de l’interprétation des tracés ECG effectués chez le chien et le chat.

En savoir plus sur cette nouveauté
Découvrir la boutique du Point Vétérinaire

Agenda des formations

Calendrier des formations pour les vétérinaires et auxiliaires vétérinaires

Retrouvez les différentes formations, évènements, congrès qui seront organisés dans les mois à venir. Vous pouvez cibler votre recherche par date, domaine d'activité, ou situation géographique.

En savoir plus


Inscrivez-vous gratuitement à nos Newsletters

Recevez tous les jours nos actualités, comme plus de 170 000 acteurs du monde vétérinaire.

Vidéo : Comment s'inscrire aux lettres d'informations du Point Vétérinaire

Retrouvez-nous sur
Abonné à La Semaine Vétérinaire, retrouvez
votre revue dans l'application Le Point Vétérinaire.fr