Le chemin vers la bientraitance des bêtes d'abattoirs est long - La Semaine Vétérinaire n° 1354 du 03/04/2009
La Semaine Vétérinaire n° 1354 du 03/04/2009

Protection animale. Assemblée générale de l'OABA

Actualité

Auteur(s) : Marine Neveux

Le 28 mars dernier, l'œuvre d'assistance aux bêtes d'abattoirs (OABA), réunie en assemblée générale, a dressé un constat plutôt sombre de la situation.

Abattage rituel d'ovins dans un pré (en dehors de la période de l'Aïd-el-Kébir), tradition du pèle-porc dans les Hautes-Pyrénées (qui consiste à acheter un porc pour le ramener chez soi, le suspendre et l'égorger), animaux abandonnés sans entretien… Pour l'Œuvre d'assistance aux bêtes d'abattoirs (OABA), les chevaux de bataille se multiplient. « Depuis la fin de l'année dernière, nous avons été particulièrement sollicités par les Directions départementales des services vétérinaires (DDSV) pour prendre en charge des animaux à l'abandon, privés de soins, de nourriture et d'abreuvement », souligne par ailleurs Jean-Pierre Kieffer, président de l'association. Notre confrère a notamment cité l'exemple d'un éleveur de bovins de la Nièvre qui a laissé plusieurs animaux mourir d'épuisement et de noyade en raison de la crue de la Loire, malgré les demandes répétées de la préfecture de procéder à l'évacuation et à la mise en sécurité du cheptel. Mais « en France, combien existe-t-il de structures qui permettent d'héberger vaches, chevaux, moutons ou cochons abandonnés dans leurs élevages, privés de nourriture et de soins ? Aucune ! », déplore Frédéric Freund, juriste et directeur de l'OABA. Lors des rencontres “Animal et société”, l'association avait pourtant demandé au ministre de l'Agriculture la mise en place de telles structures régionales d'accueil. « Une bonne idée, mais difficile à mettre en œuvre, nous a-t-on répondu. Et alors ? » Face aux nombreux problèmes sur le territoire national, cette inertie suscite l'inquiétude des responsables de la protection animale.

« Force est malheureusement de constater que les principales attentes des associations de protection animale restent déçues. On peut même considérer qu'il y a un recul par rapport à certaines réflexions entamées précédemment ou à des promesses ministérielles. La question de l'abattage rituel est un bel exemple », estime Jean-Pierre Kieffer. L'OABA a ainsi refusé de participer à la première séance plénière de la commission nationale de suivi des rencontres “Animal et société”, présidée par Thierry Tuot, conseiller d'Etat. Une façon de marquer « sa déception quant aux mesures annoncées par le ministre de l'Agriculture, malgré la bonne volonté affichée par le conseiller d'Etat et l'implication du bureau de la protection animale, en particulier son nouveau chef, Marie-Aude Montely ».

Des moyens dérisoires face à l'ampleur des problèmes

En résumé, la situation est inquiétante et les perspectives aussi. Seulement une demi-douzaine de personnes sont chargées, au sein du bureau de la protection animale, de s'occuper des affaires “animalières” qui concernent les animaux d'élevage, de compagnie, d'expérimentation, de spectacle, etc. « Les problématiques sont vastes, importantes, et les moyens associés dérisoires, même si les membres de ce bureau font preuve de grande volonté », explique Frédéric Freund.

La situation pourrait encore se dégrader en province, en raison de la réforme générale des politiques publiques, qui devrait conduire à la dissolution des DDSV. « Elles sont appelées à se fondre dans une direction régionale chargée de la sécurité alimentaire et sanitaire. L'OABA, comme les syndicats de fonctionnaires, s'inquiète de cette disparition et, parallèlement, du risque de voir redéployer vers d'autres missions les effectifs – déjà insuffisants – aujourd'hui chargés des différents contrôles en termes de bien-être animal », ajoute Frédéric Freund. Il souligne par ailleurs « la réorientation de près de 1,4 milliard d'euros d'aides agricoles vers le secteur animal, au détriment des grandes cultures, principalement les céréales ». Pour lui, cela signifie « plus de primes pour les éleveurs, selon la décision du gouvernement, sans aucun renforcement des garde-fous qui permettent d'éviter les abus ». Le directeur de l'OABA ne s'étonne donc pas que le récent rapport de la Cour des comptes européenne dénonce l'inefficacité du système de la conditionnalité des aides, en raison d'un contrôle insuffisant, voire inexistant, du respect des obligations qui y sont liées.

L'assemblée générale a aussi permis de revenir sur les enjeux de la révision de la directive européenne relative à la protection des animaux lors de leur abattage(1), qui doit prochainement aboutir à l'adoption d'un règlement applicable dans les vingt-sept Etats membres. Certains amendements soulèvent des problèmes en termes de protection animale, mais aussi d'atteinte à l'information des consommateurs.

Dans les abattoirs, certaines pratiques restent contestables

« La dérogation à l'étourdissement est imposée dans tous les pays européens pour l'abattage rituel. De plus, le recours à l'étourdissement juste après la jugulation n'a pas été adopté. Pour les associations de protection animale, il s'agissait pourtant d'un moyen d'éviter la souffrance des bovins égorgés en pleine conscience, dont l'agonie peut durer plus de cinq minutes. En effet, pour respecter les cadences dans les abattoirs, des bovins sont suspendus au cours de leur saignée, encore conscients. Face à cette situation, l'étourdissement post-jugulation paraissait un compromis acceptable, mais il a été rejeté », insiste Jean-Pierre Kieffer.

L'amendement qui prévoyait un étiquetage spécifique des produits issus des abattages rituels, dans un souci d'information des consommateurs, a aussi été repoussé, explique notre confrère, qui pointe par ailleurs la généralisation des abattages sans étourdissement en dehors de l'abattage rituel, en infraction avec la réglementation.

Outre les dysfonctionnements relevés dans les abattoirs, les responsables de l'OABA rappellent aussi la situation difficile dans laquelle ils se trouvent, en raison du manque d'inspecteurs vétérinaires, rejoignant en cela le constat de l'Office alimentaire et vétérinaire européen(2).

Dans ce tableau morose, une note d'espoir a tout de même été apportée par la thèse de Fanny Allmendinger (ENVA) sur la « bientraitance des bovins à l'abattoir », récompensée par le prix de l'OABA, qui ouvre des pistes de réflexion intéressantes.

  • (1) Directive 93/118.

  • (2) Voir La Semaine Vétérinaire n° 1352 du 20/3/2009 en page 19.

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