La fête de l’Aïd engendre des situations inacceptables

L’Aïd-el-Kébir, la plus importante fête de l’islam, s’est déroulée du 8 au 10 décembre dernier. « Environ 200 000 moutons et 4 000 bovins ont été sacrifiés à cette occasion, la quasi-totalité sans étourdissement préalable », rappelle l’Œuvre d’assistance aux bêtes d’abattoirs (OABA) dans sa dernière lettre d’information. Comme chaque année en effet, les associations de protection animale montent au créneau pour dénoncer les conditions d’abattage lors de cette célébration religieuse. Si des abattoirs sont mis en place à cette occasion dans certains départements, les mises à mort clandestines se poursuivent, ainsi que les atteintes au bien-être animal, malgré des actions pédagogiques et de communication. L’OABA, présidée par notre confrère Jean-Pierre Kieffer, a ainsi participé aux réunions préfectorales de préparation de la fête du mouton, via ses délégués, et a notamment assisté au Comité interministériel de pilotage de l’Aïd, organisé au ministère de l’Agriculture, le 8 octobre dernier. Une démarche d’ouverture qui n’a pas toujours trouvé d’écho au sein des pouvoirs publics locaux, d’après l’association de protection animale : « L’OABA a interrogé chaque préfet sur l’organisation de la fête au sein de son département. Il est regrettable que seulement quarante et un représentants de l’Etat aient daigné nous répondre… »

Un camion agréé et un site d’accueil à l’ENVA pour les moutons récupérés par l’OABA

Certaines situations (conditions de transport déplorables, égorgements par des personnes non formées, absence de contrôles sanitaires, non-respect de la protection animale, etc.) demeurent inacceptables. Par ailleurs, de nombreuses récidives sont notées, sur des sites déjà pointés l’an passé pour non-respect de la réglementation. L’OABA relève notamment la récupération de cinquante-huit moutons en Ile-de-France, la veille et le jour de l’Aïd, « détenus dans des garages, des jardins de pavillons de banlieue, ou encore dans l’annexe d’une boulangerie dans les Hauts-de-Seine ». L’organisation avait affrété un camion de transport agréé et mis en place une structure temporaire à l’école d’Alfort pour accueillir les bêtes récupérées. Frédéric Freund, juriste de l’OABA, était chargé de la centralisation des actions avec les autres associations de protection animale et les pouvoirs publics.

Un tiers des abattages d’ovins ont lieu sous le manteau

La liste des sites temporairement agréés pour l’abattage des animaux est publiée au Journal officiel avant l’Aïd-el-Kébir. Ils étaient au nombre de cinquante-six cette année, à comparer au quarante-neuf en 2007 et quarante-trois en 2006. L’OABA déplore cependant la sous-exploitation de la capacité de certains abattoirs pérennes. « Par ailleurs, 80 % des sacrifices ont lieu la première journée, alors que la fête de l’Aïd dure trois jours. Le sacrifice réalisé les deuxième et troisième jours a autant de valeur “religieuse” que celui pratiqué le premier jour. Si les fidèles musulmans ne peuvent abattre le premier jour par manque de place, ils doivent alors différer leur sacrifice au lendemain », explique l’OABA.

« Les abattages “clandestins” existent toujours, n’en déplaise à certains responsables politiques ou religieux. Ils représentent même un tiers des abattages d’ovins lors de l’Aïd, un chiffre confirmé lors du comité de pilotage du 8 octobre », poursuit l’association.

L’OABA souligne toutefois que certaines initiatives vont dans le bon sens, comme celle d’une jeune entreprise du Val-d’Oise qui, à l’occasion de l’Aïd, proposait la livraison de moutons à domicile. Les animaux étaient égorgés selon le rite dans un abattoir de Vendée, puis acheminés jusqu’aux clients par camion frigorifique. « Un moyen de “concilier la législation sanitaire française et le respect du rituel musulman”, selon la formule d’un des gérants de cette entreprise », conclut l’OABA.