Par chance… ou l'histoire d'un cas de rage en Isère

Grungy est un chiot de cinq mois que ses propriétaires ont ramené du sud de l'Espagne lors d'un voyage en camionnette. Il est en pleine forme lors de sa première visite et de sa primo-vaccination. Il ne présente qu'une fâcheuse tendance à mordiller. Une semaine plus tard, il est conduit en urgence à la clinique pour anorexie, difficultés à avaler et vomissements. Sur les conseils de mon associé, sa propriétaire nous le présente de nouveau le lendemain. Je constate en outre une photophobie, des signes nerveux et une suspicion d'encéphalite. Et si c'était la rage ? Par chance, ma proposition d'hospitalisation pour une surveillance et la mise en place d'un traitement est acceptée. Curieusement, le traitement symptomatique améliore sensiblement l'état du chiot. Par chance, juste avant de le restituer à sa propriétaire, une brutale dégradation m'oblige à le garder. Par chance, et grâce à l'abnégation d'une de nos assistantes, Grungy ne s'échappe pas lors d'une de ses promenades, au prix d'une profonde morsure. L'animal meurt une semaine après l'hospitalisation. Par chance, je ne travaille pas le 11 novembre et je peux apporter le cadavre au Laboratoire départemental vétérinaire. L'Institut Pasteur fournit rapidement les résultats et trente-deux personnes sont convoquées à l'hôpital, dont vingt et une subissent un traitement antirabique. Par chance, Grungy a toujours été promené en laisse et n'a eu de contact qu'avec trois chiens et deux chats (tous euthanasiés). Tout est rage et rien n'est rage, disaient nos anciens. Mais ce cas m'a rappelé que tout diagnostic comporte sa part de chance.