Quelles sont les particularités de l’exercice exclusivement félin ?

Limiter toutes les agressions sonores et olfactives

La première clinique dédiée aux affections félines a ouvert en Californie, dans le milieu des années 50. Une deuxième a vu le jour en 1973, à Chicago. Ce n’est qu’en 1988 que la première a été créée en Europe. Aujourd’hui, en France, six structures sont dédiées au chat (Paris, Nancy, Le Havre, Lyon, Marseille, Bordeaux). Une clinique réservée à cet animal doit le rester pour garder sa particularité, d’abord liée à l’ambiance générale. Le chat est moins stressé au contact exclusif de ses congénères. Le but est de limiter les agressions sonores et olfactives. Les locaux sont dessinés à sa taille. Les salles de consultation sont petites, sans recoin ni espace sous les meubles que l’animal pourrait être incité à visiter ! Manipuler un chat nécessite parfois patience et humilité. Le recours à une auxiliaire, elle-même dévouée à la “cause chat”, est souvent nécessaire et permet d’écarter les cages de contention et autres lassos…

La clientèle est elle-même spécifique et se révèle parfois redoutable ! Le client “chat” est exigeant, mais aussi extrêmement intéressant et attachant. Il est particulièrement attentif aux symptômes de son compagnon et aux soins qui lui sont prodigués. La démarche qu’il engage en choisissant une clinique réservée à son animal favori fait souvent de lui un demandeur de traitements pointus, que l’avancée de la science ne nous permet pas toujours de mettre en œuvre.

Se consacrer exclusivement à l’exercice de la médecine féline peut paraître restrictif. Mais, au final, cela permet de multiplier les cas et les approches. Aux Etats-Unis, de nombreux congrès sont destinés aux praticiens félins. En Europe, une formation complète, dispensée par l’European School for Advanced Veterinary Studies, a lieu tous les ans à Zurich (Suisse).

Le bonheur de traiter des animaux attachants

Pourquoi les chats ? Parce qu’arrivé à un certain moment de son existence, il est impossible d’éCHApper à son destin ! Autant l’accepter avec bonheur. Même si ce choix a un coût. Par exemple, malgré un nombre égal de clients, une structure dédiée aux chats ne peut pas générer le même revenu “diététique” qu’une structure classique. Une autre difficulté est liée aux chats errants et aux tarifs “SPA” pratiqués pour la stérilisation, qui paupérisent la médecine féline, en raison même des décisions des instances vétérinaires qui ont instauré ces pratiques.

Toutefois, ce choix signifie le bonheur de côtoyer des animaux attachants. Cocteau disait aimer les chats, car il n’y a ni chat méchant ni chat policier. C’est vrai. Il existe souvent des raisons identifiables pour expliquer la colère du plus agressif. A nous de les traiter. Par ailleurs, leurs propriétaires sont doués d’une qualité d’observation précieuse pour le diagnostic. En termes relationnels, cela constitue un renforcement positif déterminant pour la praticienne que je suis. Les chats apportent en outre une sérénité olfactive et auditive dans la clinique. Les propriétaires constatent que leurs compagnons sont d’emblée à l’aise. « Il doit y avoir quelque chose en plus chez vous », me disent-ils. En fait, il y a quelque chose en moins : les chats sont heureux de ne pas sentir ni entendre les chiens… Travailler en féline pure exige un certain nombre d’aménagements et une pratique spécifique. Je publie et prêche sur le sujet depuis longtemps⁽¹⁾. Une chose est certaine, les clients sont exigeants, curieux (la “Toile” est leur planète) et travailler avec eux oblige à se former en permanence, ce qui est une excellente chose.

Une clientèle dynamique, mais particulièrement exigeante

Quand j’ai annoncé que je créais une clinique vétérinaire réservée aux chats à Marseille, mon entourage a crié au suicide professionnel ! Or, cinq ans après, le pari est gagné. Non seulement la clinique tourne bien, mais j’enregistre toujours une progression annuelle de plus de 20 %. Cela prouve que la demande existait et que le concept satisfait une clientèle. Je viens donc d’engager un collaborateur.

Contrairement à l’idée reçue, les propriétaires qui fréquentent la clinique sont jeunes. Il s’agit essentiellement de couples. C’est une clientèle sympathique et dynamique, mais exigeante.

Nous nous devons donc d’avoir un équipement complet et un plateau technique performant. Gérer la douleur est aussi une préoccupation permanente de la structure.

Le monde de la médecine féline bouge beaucoup, sous l’impulsion des Anglo-Saxons. Nous comprenons de mieux en mieux le fonctionnement de cette espèce. Suivre son évolution est passionnant.

Je regrette d’ailleurs qu’une véritable formation universitaire ne soit pas créée en France, comme dans certains pays. Je ne suis pas un “spécialiste par organes” du chat.

Bien des confrères sont plus compétents que moi dans leur spécialité.

Mais dans ma clinique, conçue pour leur bien-être, les chats sont considérés dans leur globalité.

Ils s’y sentent bien et, après tout, n’est-ce pas le plus important chez cette espèce qui stresse pour un oui ou pour un non ?

• (1) Références sur www.wk-vet.fr (rubrique “Semaine Vétérinaire”, puis “Compléments d’articles”).