La survie des derniers grands pandas est menacée par un nématode parasite - La Semaine Vétérinaire n° 1318 du 06/06/2008
La Semaine Vétérinaire n° 1318 du 06/06/2008

Maladie émergente

Formation continue

FAUNE SAUVAGE ET NAC

Auteur(s) : Stéphanie Bourgeois

Une larva migrans viscérale serait devenue la première cause de mortalité en milieu naturel.

Le grand panda (Ailuropoda melanoleuca) est endémique de la Chine et, surtout, fait figure d’emblème pour la conservation des espèces menacées. Classée comme « très rare », l’espèce est inscrite sur la liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) dès 1965(1) et sa chasse est déclarée illégale par le gouvernement chinois en 1957. La perte et la dégradation de son habitat sont généralement identifiées comme les principales causes de déclin du grand panda.

Des données pathologiques et parasitologiques, provenant d’autopsies de pandas morts en milieu naturel, existent en Chine depuis 1971. Ces rapports n’ont jamais été publiés. Des chercheurs ont finalement pu y avoir accès et les compiler pour analyser les causes de mortalité de près de huit cents individus adultes, au cours des quatre dernières décennies(2).

Avant l’an 2000, la famine et le braconnage sont incriminés dans le déclin de l’espèce

Trois périodes successives sont distinguées. Jusqu’au début des années 80, plus de 90 % des pandas meurent de faim, en raison de la floraison des bambous sur une large partie de leur aire de répartition. Le bambou fleurit en effet de manière périodique et synchrone tous les quinze à cent vingt ans, puis il meurt. Les pandas sont alors contraints de migrer, car les nouvelles pousses n’auront une taille suffisante pour les nourrir qu’au bout de dix ans. Mais la réduction, ainsi que la fragmentation de leur habitat ont considérablement perturbé le déplacement des pandas vers de nouvelles zones d’alimentation.

Entre 1986 et 2000, plus de 80 % des décès sont dus à un braconnage intense. La loi sur la protection de la faune sauvage en Chine (1989), qui prévoit des mesures particulièrement sévères, allant jusqu’à la peine de mort, a permis de faire reculer le braconnage.

Des larves disséminées dans le foie, les poumons, le cœur et le cerveau

Depuis 2000, la moitié des cadavres examinés présentent des lésions dues à un nématode, Baylisascaris schroederi. La mort est provoquée par une larva migrans viscérale (voir encadré). Ce nématode est identifié dès 1939 dans le tractus intestinal d’individus sauvages, mais jamais une telle mortalité n’est rapportée. Les pandas autopsiés présentent une lourde charge parasitaire et une forte inflammation intestinale, ainsi que des désordres métaboliques. Les larves sont disséminées dans le foie, les poumons, le cœur et le cerveau.

La contamination oro-fécale des pandas survient lorsqu’ils se déplacent dans un environnement contaminé avant de manipuler leur nourriture, ou quand ils reniflent le marquage territorial d’un congénère.

Deux hypothèses sont avancées par les chercheurs pour expliquer l’émergence de cette maladie qui menace la survie du grand panda. L’habitat disponible a diminué de plus de 50 % depuis les années 70, tandis que les mesures de protection de l’espèce ont permis une lente augmentation de la population de 1,7 % par an. La transmission du parasite serait donc grandement facilitée parmi des individus quatre fois plus nombreux au kilomètre carré. Si le panda n’est pas l’hôte naturel de B. schroederi, l’autre hypothèse est une hausse de la densité de population de l’hôte principal, qui n’est pas encore identifié.

Dans un cas comme dans l’autre, l’émergence de cette maladie est liée à la perte d’habitat disponible pour la faune sauvage. Cette étude est un exemple supplémentaire de l’impact de l’homme sur son environnement dans l’émergence des maladies infectieuses qui menacent la biodiversité.

  • (1) Bear Specialist Group 1996 : Ailuropoda melanoleuca in IUCN, 2007, IUCN red list of threatened species. www.iucnredlist.org.

  • (2) J.-S. Zhang, P. Daszak, H.-L. Huang, G.-Y. Yang, A. M. Kilpatrick et S. Zhang : « Parasite threat to panda conservation », EcoHealth, 2008, vol. 5, n° 1, pp 6-9.

Larva migrans viscérale

Le syndrome de larva migrans survient lorsque les formes immatures de parasites effectuent une migration aberrante et prolongée dans l’organisme de l’hôte. Ce phénomène apparaît en général lorsque l’hôte infecté, homme ou animal, n’appartient pas au cycle normal du parasite. Selon la localisation de la migration, il s’agit de larva migrans cutanée, oculaire ou viscérale. Les exemples les plus communs sont l’infection de l’homme par des nématodes : Toxocara canis, à partir du chien ou Baylisascaris procyonis, à partir du raton laveur. L’homme se contamine par ingestion, puis les larves franchissent la paroi intestinale et migrent dans l’organisme, provoquant des lésions tissulaires et des symptômes plus ou moins marqués (fièvre, toux, sifflement, éruptions cutanées, hypertrophie ganglionnaire, baisse de vision) qui peuvent néanmoins entraîner la mort.

S. B.
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