Des implants d’or permettent de traiter l’arthrose invalidante - La Semaine Vétérinaire n° 1317 du 30/05/2008
La Semaine Vétérinaire n° 1317 du 30/05/2008

Nouvelle approche thérapeutique

Formation continue

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Esteban Pujol*, Bernard Bouvy**

Fonctions :
*praticien au centre hospitalier vétérinaire Frégis (Arcueil, Val-de-Marne)
**praticien au centre hospitalier vétérinaire Frégis (Arcueil, Val-de-Marne)

Lorsque les options médicale, diététique et hygiénique échouent, l’implantation périarticulaire de filaments d’or métalliques peut être une solution intéressante.

L’arthrose est une maladie fréquente chez les carnivores domestiques. Comme tout processus dégénératif, elle a tendance à progresser tout au long de la vie. De nombreux efforts sont faits pour tenter de trouver un remède à cette évolution. Idéalement, la lutte contre l’affection vise à empêcher son apparition. Tel est, par exemple, l’objectif des interventions chirurgicales de la dysplasie de la hanche chez les jeunes animaux. Une fois que l’arthrose devient chronique, les possibilités thérapeutiques dépendent de la réaction de l’animal.

Du côté de la chirurgie, la pose de prothèses articulaires est envisageable. Seule celle de hanche est pratiquée couramment. Certains spécialistes l’ont presque abandonnée, notamment en raison des complications postopératoires. D’autres prothèses, de coude ou encore de genou, sont en cours de mise au point. Leur implantation induit des taux de complication encore trop importants. Les arthroplasties (exérèse de la tête et du col fémoraux, arthroplastie de l’épaule) sont une autre voie chirurgicale, de dernier recours, mais qui ne présente pas les risques de complications spécifiques aux prothèses.

Dès lors, le traitement de l’arthrose chronique doit, le plus souvent, être hygiénique et multimodal. Il associe une médication et une alimentation appropriées, un contrôle du poids, un exercice physique adapté, ou encore une rééducation fonctionnelle. Malgré tous les efforts pour en diminuer les signes cliniques, la maladie continue de progresser et certains animaux ne répondent pas au traitement hygiénique. L’implantation périarticulaire d’implants Berlock® (Goldtreat, Danemark), qui sont des micropelotes de filaments d’or métalliques, peut alors être une solution intéressante. Deux publications clés sur ce sujet permettent d’étudier cette modalité thérapeutique en termes cliniques et physiologiques.

Une étude randomisée en double aveugle menée chez quatre-vingts chiens

L’implantation de filaments d’or au niveau de sites d’acupuncture a été décrite au début des années 70, aux Etats-Unis. De nombreux cas isolés semblaient montrer l’efficacité de cette technique.

Chez le chien, un essai clinique randomisé en double aveugle et à haut pouvoir statistique, réalisé par une équipe norvégienne, a testé les effets de l’implantation d’or métallique à la suite d’une dysplasie invalidante des hanches(1). L’étude inclut des chiens de moins de huit ans qui présentent des signes cliniques de douleur coxofémorale et de boiterie de l’arrière-train. Aucun d’entre eux n’a reçu d’anti-inflammatoire stéroïdien (AIS) ou non stéroïdien (AINS), respectivement pendant les quatorze jours ou les trois mois qui précèdent l’essai. Durant celui-ci, des AINS peuvent êtres utilisés si les propriétaires le jugent nécessaire. Une évaluation est réalisée quatorze jours, trois mois et six mois après l’implantation, via un questionnaire, un examen orthopédique et une vidéo.

Le poids moyen des animaux est de 34,8 kg et les signes cliniques sont présents depuis deux ou trois ans. Deux groupes d’animaux sont constitués. Chez trente-huit chiens, l’implantation d’or est réalisée à proximité de la capsule articulaire grâce à des aiguilles hypodermiques (deux perles de 24 carats, pesant de 35 à 40 mg, au niveau de cinq sites d’acupuncture différents autour de l’articulation coxofémorale). Chez les quarante-deux chiens du groupe placebo, aucune implantation n’est effectuée. En revanche, ils subissent une perforation de la peau à l’aiguille sur des sites qui ne sont pas des sites d’acupuncture.

Les deux groupes sont équivalents en termes d’âge, de sexe, de poids, de degré de dysplasie et de durée des signes cliniques. Toutefois, le degré de douleur et la nécessité de repos ont tendance à être supérieurs chez les animaux qui vont subir l’implantation.

La douleur est diminuée en moyenne de 65,5 % après six mois

Plusieurs paramètres sont évalués : l’impression générale du propriétaire, la douleur, le temps écoulé avant de noter une amélioration, le degré de difficulté pour monter des escaliers, sauter, jouer (dysfonction articulaire), la motivation de l’animal, l’appétit et la qualité de vie.

Chez les chiens choisis pour l’implantation, une amélioration significative de la réponse générale est observée. Elle est notée après quatorze jours chez 40 % d’entre eux, trois mois chez 70 % et six mois chez 83 %. Dans le groupe placebo, une amélioration est constatée chez 52 à 59 % des animaux pendant les six mois du suivi.

Chez les animaux traités, une diminution du score de la douleur est enregistrée. Il passe ainsi de 5,6 au début de l’étude à 4,8 à quatorze jours, 2,6 à trois mois puis 1,9 à six mois (la baisse moyenne de la douleur est de 65,5 %). Dans le lot placebo, le score s’arrête à 3,1 après trois mois (36 % de diminution moyenne).

Chez les animaux implantés, la dysfonction articulaire diminue significativement de 4,6 à 1,6 après six mois. Pour les autres, la chute s’échelonne de 4,1 à 2,4 après six mois.

La motivation de l’animal, ainsi que sa qualité de vie, sont significativement améliorées chez les chiens qui ont subi l’implantation, après six mois. Dans le même groupe, l’appétit s’accroît de façon significative, également après six mois. La perception de la douleur par le vétérinaire est aussi significativement diminuée.

Entre trois et six mois après le début de l’essai, huit chiens du groupe placebo nécessitent un traitement avec des AINS, alors que cela n’est indispensable chez aucun des implantés.

Une amélioration est notée dans les deux groupes, mais elle est statistiquement plus importante chez les implantés, après six mois. En raison du nombre d’animaux dans chaque groupe, les différences notées dans cette étude donnent aux statistiques un pouvoir qui approche de 100 % (aucune probabilité de faux négatifs). D’un haut niveau (1/5) sur l’échelle de la médecine fondée sur les preuves, elle démontre que l’implantation de filaments d’or soulage significativement la douleur chez les chiens coxarthrosiques. Des praticiens danois ont étendu les indications à de multiples articulations canines (sans tenir compte des points d’acupuncture) pour des centaines de cas, avec des taux d’amélioration affichés de 80 à 90 % (communication personnelle Gregersen Pedersen, 2007).

L’or est un puissant inhibiteur de certaines cellules de la lignée blanche

Certains médicaments à base d’or sont actuellement autorisés pour le traitement par voie orale de l’arthrite rhumatoïde chez l’homme. Cet élément dissoudrait les enzymes lysosomiaux des cellules phagocytaires du tissu synovial enflammé. Par ailleurs, il est admis que les ions d’or sont de puissants inhibiteurs de macrophages et de leucocytes polymorphonucléaires.

Concernant l’or métallique, une équipe danoise(2) a étudié, en 2002, la libération in vivo d’ions d’or à partir d’implants. Elle en a identifiés, de façon univoque, dans les cellules adjacentes aux implants. Celles qui se trouvent à côté des implants sont plus chargées que les cellules plus lointaines. Les auteurs démontrent que les macrophages entraînent une oxydation de la surface des implants d’or. Ces derniers libèrent des molécules d’or qui sont ensuite phagocytées par les cellules inflammatoires et accumulées dans les lysosomes. Les macrophages et les mastocytes concentrent une quantité d’or majeure par rapport aux autres cellules (fibroblastes).

L’équipe conclut que ces implants modulent la réaction immunitaire par la libération d’ions d’or qui réduisent la production de facteurs de l’inflammation. Cette action peut durer des années.

Le traitement de la douleur arthrosique chronique reste majoritairement médical ou hygiénique. Néanmoins, l’implantation de filaments d’or peut être envisagée lorsque les résultats obtenus ne sont pas satisfaisants ou quand le traitement chirurgical n’est pas retenu. Sur la base des données scientifiques évoquées, le centre hospitalier vétérinaire Frégis commence à utiliser l’implantation d’or métallique dans les cas difficiles.

  • (1) G.T. Jaeger, S. Larsen, N. Søli, L. Moe : « Double-blind, placebo-controlled trial of the pain-relieving effects of the implantation of gold beads into dogs with hip dysplasia », Vet. Rec., 2006, vol. 158, n° 21, pp. 722-726.

  • (2) G. Danscher : « In vivo liberation of gold ions from gold implants. Autometallographic tracing of gold in cells adjacent to metallic gold », Histochem. Cell Biol., 2002 vol. 117, n° 5, pp. 447-452.

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