LA PHYSIOTHÉRAPIE PERMET UN RÉAPPRENTISSAGE MOTEUR - La Semaine Vétérinaire n° 1316 du 23/05/2008
La Semaine Vétérinaire n° 1316 du 23/05/2008

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Auteur(s) : Valentine Chamard

Les indications de la physiothérapie sont nombreuses : récupération postopératoire, prévention chez l’animal de sport, arthrose, etc. Si sa prescription est désormais courante dans certains pays, comme aux Etats-Unis, cette discipline est encore méconnue en France. Pourtant, elle peut être mise en œuvre en clientèle sans investissement onéreux.

Nous allons prescrire à votre animal des séances de physiothérapie.

— Des séances de phytothérapie ?

— Non, de phySIOthérapie… »

Si ce dialogue est fréquent et le terme souvent ignoré, tout un chacun s’est pourtant soigné, un jour ou l’autre, grâce à cette technique. Mettre un glaçon sur une articulation endolorie ou masser un muscle échauffé sont des gestes simples qui appartiennent à la physiothérapie. Celle-ci englobe, en effet, tous les traitements qui reposent sur l’action d’agents physiques, naturels ou artificiels. Elle fait ainsi appel aux mouvements, au froid, à la chaleur, à l’eau, à l’électricité, au son (ultrasons, ondes de chocs extracorporelles), à la lumière (laser), aux champs et aux ondes magnétiques, etc. Ces méthodes peuvent être utilisées dans un but curatif ou préventif.

La physiothérapie vétérinaire fait appel à des techniques variées qui dérivent de la pratique humaine, où elle est appliquée dans de nombreux domaines qui vont de la neurologie à la cardiologie, en passant par la dermatologie. Elle reste toutefois encore, chez les animaux, presque exclusivement une thérapeutique complémentaire des affections locomotrices. Les premiers vétérinaires à l’avoir développée sont les praticiens équins. Les carnivores domestiques commencent, depuis quelques années seulement, à en bénéficier en France. Le chat, moins sujet aux affections orthopédiques que le chien, est plus rarement présenté en consultation de physiothérapie, en raison de ses capacités de récupération rapides. Depuis quelque temps, la physiothérapie est l’objet d’un intérêt accru, dans le domaine des activités liées au chien de sport et d’utilité, car elle s’appuie sur des méthodes dépourvues de risque iatrogène et se révèle être une aide à l’entraînement.

La seule technique qui permet un réapprentissage moteur

Les principaux objectifs de la physiothérapie sont de combattre la douleur, de restaurer la mobilité des segments affectés dans leurs amplitudes fonctionnelles, de limiter les conséquences de l’inflammation et de l’immobilisation, de stimuler la circulation sanguine et lymphatique. En accélérant la restauration des fonctions musculo-tendineuses, ligamentaires et articulaires, elle induit un retour plus précoce à l’activité.

Sa spécificité par rapport à d’autres thérapies “non conventionnelles”, qui visent les mêmes objectifs (comme l’ostéopathie ou l’acupuncture), est d’offrir des moyens de rééducation et de réapprentissage moteur. Elle permet à l’animal d’apprendre à réutiliser ses membres, à retrouver ses schémas corporel et moteur, et sa proprioception. Certaines de ses techniques nécessitent des investissements peu onéreux, voire aucun, ce qui en fait une méthode applicable dans le cadre d’un exercice libéral.

La physiothérapie n’implique pas forcément l’achat de matériel

La physiothérapie s’appuie sur des techniques manuelles et instrumentales. Les premières constituent la base de tout protocole de rééducation fonctionnelle. La kinésithérapie regroupe les massages et les méthodes de mobilisation passive (le vétérinaire ou le propriétaire impose à l’articulation des mouvements) et active des divers segments du corps. Les exercices passifs peuvent en général être entrepris dès le lendemain de l’intervention chirurgicale. Ils sont réalisés, à raison de dix à quinze mouvements, pendant des périodes variables. Les exercices peuvent également être actifs et résultent alors du travail conscient de l’animal.

Soigner grâce à l’usage du chaud et du froid superficiels

La cryothérapie est l’application superficielle de froid, via une poche de gel refroidie au freezer, un spray cryogène, un appareil de cryothérapie au CO2 hyperbare ou tout simplement une poche de glace. A l’inverse, la thermothérapie est l’application superficielle de chaleur (poche de gel chauffée, lampe à infrarouge). Ces deux techniques permettent de lutter contre les différentes phases de l’inflammation. Le froid est employé en phase aiguë, afin de limiter le stade vasculaire et l’œdème. Le chaud est, au contraire, utilisé en phase subaiguë à chronique, quand il faut stimuler le stade cellulaire de la cicatrisation.

Si la cryothérapie hyperbare au CO2 est parfois considérée comme un moyen de traitement à part entière, bien connu de nombreux vétérinaires équins, le froid et la chaleur superficiels sont, en physiothérapie, essentiellement des moyens adjuvants qui facilitent et renforcent l’action d’autres techniques. En effet, l’analgésie procurée par le froid en phase postopératoire permet de mettre en place précocement des mobilisations passives douces à amplitude contrôlée. Ainsi, les tissus échauffés sont moins algiques et plus souples et donnent une meilleure efficacité et plus de confort aux massages, aux mobilisations et, surtout, aux étirements, ainsi qu’à l’électrostimulation neuromusculaire ou aux ondes de chocs. Pour un échauffement des tissus en profondeur, le recours aux ultrasons est préférable.

Les animaux aussi peuvent bénéficier de la balnéothérapie

Grâce à la poussée d’Archimède, l’animal dans l’eau est soulagé d’une partie de son poids. Cette propriété est mise à profit par la balnéothérapie, qui permet ainsi une mobilisation facilitée des articulations sans générer de traumatisme. La rééducation aquatique comprend la kinébalnéothérapie (mobilisations passives ou actives assistées dans l’eau), le déplacement sur un tapis roulant subaquatique et la nage. Son utilité est reconnue depuis plusieurs décennies chez le cheval. Le chien tire également bénéfice de ce mode de rééducation (un individu de 50 kg ne pèsera apparemment plus que 3 kg une fois immergé). Indiquée lors de nombreuses affections locomotrices orthopédiques (y compris en cas de fracture en cours de consolidation) ou neurologiques (rééducation après une opération du rachis), la balnéothérapie facilite la réalisation de mouvements que l’animal convalescent ne peut encore réaliser sur la terre ferme. Deux à trois séances d’une vingtaine de minutes par semaine sont en général indiquées.

Le courant électrique et les ultrasons ont des propriétés antalgiques

L’électrostimulation neuromusculaire est l’application, au moyen d’électrodes de surface, d’un courant électrique dans un but thérapeutique. Les électrodes sont généralement placées en regard du trajet superficiel d’un nerf, des points moteurs musculaires, ou même de points d’acupuncture. Selon les paramètres du courant (forme, fréquence, durée de l’impulsion, intensité), l’électrostimulation neuromusculaire peut avoir des effets antalgiques, trophiques, décontracturants ou excitomoteurs. La diélectrolyse médicamenteuse, quant à elle, est un transfert d’ions médicamenteux dans l’organisme par l’intermédiaire de l’application d’un courant galvanique sur le corps.

L’ultrasonothérapie s’appuie de son côté sur les effets mécaniques (compression et relaxation des molécules tissulaires) et thermiques (transformation de l’effet mécanique en chaleur qui diffuse en profondeur, jusqu’à plus de 3 cm) des ultrasons. Elle est essentiellement employée pour le traitement des atteintes musculo-tendino-squelettiques. Elle permet un soulagement de la douleur, une relaxation musculaire, un assouplissement des tendons, une augmentation de la perméabilité vasculaire, une destruction de la fibrose tissulaire et une accélération de la cicatrisation. Les ultrasons sont, par exemple, employés en cas d’entorse simple ou lors de plaies cutanées. Ils permettent en outre de véhiculer des substances médicamenteuses directement sur le site atteint (ultrasonophorèse).

De la préparation sportive à la rééducation postopératoire

En médecine vétérinaire, les applications de la physiothérapie concernent surtout les affections locomotrices, plus particulièrement après une intervention chirurgicale articulaire, osseuse ou neurologique, grâce à ses effets bénéfiques sur le mouvement et le système musculo-squelettique. Elle favorise en outre la cicatrisation des tissus traumatisés en augmentant la trophicité et le drainage des zones affectées. Elle peut aussi se révéler utile en période préopératoire, en diminuant par exemple une inflammation locale. Cette thérapie constitue également une alternative efficace dans le traitement de certaines affections (tendinites, entorses, douleurs musculaires, arthrose, embolies fibrocartilagineuses, polyradiculonévrites, rupture du ligament croisé cranial chez les races miniatures). Elle est en outre bénéfique à la physiologie générale, en favorisant, via la mobilité des organes locomoteurs, les circulations sanguine et lymphatique, et en conséquence les fonctions cardiovasculaire, digestive, hépatique et urinaire. Par ailleurs, elle permet d’impliquer le propriétaire dans les soins, favorisant ainsi l’observance et la récupération de l’animal.

La physiothérapie est une approche globale de l’animal à traiter

La physiothérapie répond à une démarche scientifique rigoureuse. Utiliser le froid ou tout agent physique n’est pas suffisant pour faire de la physiothérapie. L’esprit et la démarche de cette thérapie demandent une approche globale de l’animal à traiter, fondée sur un protocole élaboré après avoir réalisé un bilan algique et fonctionnel. A partir de ce bilan, des objectifs sont fixés, qui déterminent les techniques à employer pour les atteindre. Les possibilités de combinaison entre les techniques sont multiples et elles peuvent également être associées à des traitements médicamenteux ou non pharmacologiques (acupuncture, ostéopathie, etc.). Ce programme doit en outre être réévalué selon l’évolution de l’animal. La physiothérapie entre dans le cadre d’une thérapie multimodale où les différentes techniques combinées se potentialisent et sont plus efficaces que si elles étaient utilisées seules.

  • Sources : - Sarah Rivière et Serge Sawaya : « Rééducation fonctionnelle du chien et du chat, intérêt de la physiothérapie », Le Point Vétérinaire, n° 263 du 1er/3/2006. - Caroline Jourdain de Muizon et Karine Le Bleis : « La rééducation fonctionnelle, techniques appliquées chez les carnivores domestiques », 14/11/2006, conférence en ligne sur le site de l’Umes. - Sarah Rivière : « La physiothérapie chez les carnivores domestiques, étude bibliographique et élaboration de protocoles de rééducation fonctionnelle », thèse de doctorat vétérinaire, ENVA, 2002.

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