Le diagnostic des maladies vectorielles reste un défi pour les praticiens et les pathologistes - La Semaine Vétérinaire n° 1314 du 10/05/2008
La Semaine Vétérinaire n° 1314 du 10/05/2008

Parasitologie. Symposium international sur les affections vectorielles canines

Actualité

Auteur(s) : Jean-Pascal Guillet

Nous observons un risque croissant d’affections vectorielles, lié à la propagation des vecteurs », selon Norbert Mencke (Bayer, Allemagne). Notre confrère s’est exprimé lors de la troisième édition du Symposium international sur les maladies vectorielles canines (canine vector-borne disease, CVBD(1)). L’événement, organisé par Bayer, s’est tenu du 16 au 19 avril dernier, à Wiesbaden, en Allemagne. Il a rassemblé trente-six experts en sciences naturelles, médecine humaine et médecine vétérinaire d’Europe, d’Amérique du Nord et d’Asie. Norbert Mencke a notamment pris comme exemples les tiques Dermacentor reticular récemment identifiées dans toute l’Allemagne, les mille cinq cents cas de babésiose canine enregistrés dans ce pays en 2006, ainsi que l’incidence croissante de la leishmaniose canine dans des régions auparavant non endémiques (nord de l’Italie, sud de la Suisse, etc.). « Les affections vectorielles représentent la principale menace pour la santé et le bien-être des chiens. Par ailleurs, elles constituent un risque pour la santé humaine […]. La lutte contre ces vecteurs est primordiale. »

Durant deux jours, des experts ont discuté des données scientifiques actuelles et des développements futurs. Au total, une quinzaine de conférences ont traité successivement de la leishmaniose canine, des affections transmises par les tiques, des rickettsies, des arbovirus, et de sujets plus généraux tels que le diagnostic, l’épidémiologie et le changement climatique. Le dernier jour a été consacré à la présentation des principaux résultats à la presse.

Les co-infections sont plus souvent la règle que l’exception

Quelles idées principales retenir de ce congrès ? « Le diagnostic de ces affections reste difficile, a résumé Edward Breitschwerdt, professeur au collège de médecine vétérinaire de Caroline du Nord (Etats-Unis). Cela est notamment lié au fait que les co-infections sont plus souvent la règle que l’exception et que les signes cliniques sont peu spécifiques. » En outre, de nouveaux organismes, dont la pathogénicité est inconnue, sont constamment décrits. « Les chiens jouent un rôle important pour les maladies vectorielles humaines. En effet, ils peuvent constituer des réservoirs ou des sentinelles. » C’est pourquoi Edward Breitschwerdt a également insisté sur la nécessité de poursuivre les recherches sur l’épidémiologie, l’identification et le diagnostic de ces affections. « Une approche interdisciplinaire est nécessaire, de même qu’une information des vétérinaires et des propriétaires quant aux risques qu’elles représentent », a-t-il conclu. Le changement climatique serait-il présenté comme le principal responsable de cette évolution ? « Pas seulement », a précisé Jean-Pierre Dedet, professeur de parasitologie-mycologie au centre hospitalier universitaire de Montpellier et l’un des experts français membres du forum CVBD, avec Patrick Bourdeau, professeur de parasitologie-mycologie à l’école vétérinaire de Nantes. « L’évolution des modes de vie, l’intensification des mouvements de personnes et d’animaux sont d’autres facteurs sans doute en cause », a-t-il souligné.

40 000 chiens seraient cliniquement atteints de leishmaniose en France

Endémique dans plus de soixante-dix pays dans le monde (et récemment observée aux Etats-Unis), la leishmaniose canine a été le thème prédominant du symposium. Selon des études de séroprévalence en Italie, en Espagne, en France et au Portugal, environ deux millions et demi de chiens seraient infectés dans ces pays. Cependant, un grand nombre de ces animaux ne présentent aucun signe clinique. « En France, une première enquête a été réalisée en 1986 », a expliqué Patrick Bourdeau. D’autres ont été initiées en 2004. Elles sont fondées sur l’envoi de questionnaires aux praticiens. Près d’un millier de cabinets et de cliniques ont ainsi répondu à la dernière enquête. Les résultats montrent une intensification du nombre de cas autochtones de leishmaniose canine. En France, la maladie reste enzootique le long de la côte méditerranéenne et dans le Sud-Est. De nouveaux départements sont considérés comme touchés par l’infection et les réponses des praticiens semblent mettre en évidence une augmentation du nombre de cas dans le Sud-Ouest. La plupart des nouvelles zones infectées sont localisées à la périphérie de celles qui sont enzootiques. Les départements dans lequels plus de cinquante cas cliniques ont été identifiés dans l’année étaient au nombre de six en 1986 et le double en 2004. « On peut estimer à près de quarante mille le nombre de chiens cliniquement atteints. Il y aurait ainsi cinq fois plus d’animaux infectés, autant de réservoirs potentiels ! » Des études similaires portant sur l’ehrlichiose et la borréliose seront prochainement publiées. Par ailleurs, ces enquêtes seront bientôt extrapolées à d’autres pays de l’Union de manière à obtenir des cartes européennes homogènes.

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